Olivier Las Vergnas : “Ne pas se limiter à des accords de bon voisinage"

Par - Le 01 juin 2011.

Le label “Orientation pour tous - Pôle information et orientation sur les formations métiers" et le cahier des charges correspondant se sont beaucoup inspirés des Cités des métiers. Olivier Las Vergnas, secrétaire général du réseau Cité des métiers et délégué à l'insertion, la formation et l'activité professionnelles d'Universcience, donne ici son sentiment sur ces textes.

Que pensez-vous du cahier des charges relatif au label national “Orientation pour tous" ?

Un seul niveau de label, alors que le paysage de l'orientation est très complexe et que les convergences ne se constituent que dans la durée, ne peut malheureusement pas suffire à résoudre tous les problèmes de qualité et d'efficacité de l'orientation tout au long de la vie. Le choix qui a été fait par le Conseil d'État d'ouvrir à des “réseaux de lieux" et pas seulement à des “lieux uniques" permettra de labelliser assez vite des systèmes déjà existants, en s'appuyant sur beaucoup de critères de qualité inspirés des Cités des métiers, et c'est déjà un point très positif.

En revanche, le décret ne permettra sans doute pas de pousser les acteurs à s'intéresser à la “réingénierie" des lieux d'implantation. Or, nous pensons que des grandes plateformes multi publics sont des compléments indispensables aux “petits lieux" éclatés qui, eux, permettent une grande proximité, car elles peuvent bien mieux jouer un rôle de vitrine de la formation tout au long de la vie. En effet, elles sont beaucoup plus efficaces pour faire découvrir aux personnes peu informées les opportunités que représentent les différents dispositifs de qualification, de validation ou de sécurisation : elles rendent plus compréhensible et crédible l'idée de “formation tout au long de la vie" qui paraît, force est de le constater, complètement abstraite si elle n'est pas incarnée dans de tels lieux d'accueil et d'écoute facile d'accès, ouverts et polyvalents.

Vous êtes donc déçu ?

L'idéal serait maintenant de mettre en chantier un deuxième niveau de label, correspondant à cet objectif de convergence des acteurs vers des projets territoriaux ambitieux. Cela revient à dire qu'à terme, le label ne devrait pas se limiter à un système « tout ou rien », mais que la loi devrait être aussi utilisée comme un moyen d'incitation à aller plus loin, à construire des convergences entre les acteurs. Aujourd'hui, la qualité du service va être labellisée grâce à ce décret, mais il faudrait un second niveau qui incite davantage les mises en réseaux d'acteurs prêts à travailler en profondeur la question de la gestion commune d'implantations et d'offres de service mutualisées.

À votre sens, quel est l'enjeu ?

Il faut bien se rappeler que l'objectif de la loi[ 1 ]Loi du 24 novembre 2009 relative à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie.
est l'augmentation du niveau de qualification de l'ensemble de la population nationale. Et donc, l'une des priorité est la mobilisation des personnes qui sont les moins informées. C'est pour cela qu'il faut favoriser l'émergence de ce type de projets plus ambitieux qui améliorent la visibilité de l'orientation et de la formation tout au long de la vie, avec un système où les acteurs créent ensemble un lieu commun avec des centres associés. Il est de fait dommage que les textes ne permettent pas d'accompagner – y compris en termes de moyens financiers ou humains – de tels projets qui iraient au-delà d'un simple accord de principe entre des lieux préexistants. Ces premiers textes devraient être complétés par un autre décret ou une circulaire qui permettrait de passer à un second niveau. Par le choix de ne pas se limiter au lieu unique, le label ne va pas permettre d'améliorer la visibilité de l'orientation tout au long de la vie, comme peuvent le faire des dispositifs type Cité des métiers. La différence entre une Cité des métiers et un simple accord de bon voisinage signé entre une Mission locale, une agence Pôle emploi et un CIO, c'est la visibilité et le niveau de mutualisation.

Labelliser à l'instant T l'offre existante permet de contrôler la qualité, mais ne rend pas vraiment l'offre plus visible et plus évolutive. J'aurais préféré que l'arrêté donne aussi une vision dynamique de la convergence. Mais ce label premier niveau est déjà incontestablement très important pour la qualité et la lisibilité du paysage. C'est pourquoi les Cités des métiers étudient actuellement la possibilité d'avoir une démarche nationale concertée.

Notes   [ + ]

1. Loi du 24 novembre 2009 relative à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie.