Zbyslaw Adamus, directeur du CIO de Verdun et vice-président de l'Association nationale des directeurs de CIO (AND-CIO)

“Les CIO constituent une des bases fondamentales de l'organisation du service public de l'orientation"

Par - Le 01 juin 2011.

Que pensez-vous du cahier des charges tel que précisé par l'arrêté du 4 mai ? Certains points posent-ils problème aux CIO ?

Pour ce qui est des critères de qualité des activités d'orientation proposées et des critères généraux de qualité des services rendus, les CIO répondent globalement aux caractéristiques des paragraphes 1 à 23. Pour ce qui est de l'organisation, il s'agira d'institutionnaliser et de développer des partenariats qui existent déjà, à des degrés divers selon les endroits. Mais globalement, il n'y a rien de rédhibitoire : des travaux d'accessibilité aux personnes handicapées seront parfois nécessaires et il faudra procéder à quelques ajustements, en matière de communication notamment. Nous n'avons par exemple pas de livret d'accueil précisant “les modalités d'accès et de délivrance du service", mais des affiches ; il suffira d'en décliner le contenu…

Vous êtes surtout connus sur le champ de la formation initiale, accueillez-vous d'autre type de public ?

Tout à fait, je peux vous donner l'exemple du CIO de Verdun, qui accueille 7 % d'adultes, salariés ou demandeurs d'emploi, en quête de perfectionnement ou de reconversion. Ces personnes ne sont pas perdues et ne viennent pas chez nous par défaut. Et si, après le premier accueil, nous nous rendons compte que le service ou la poursuite du service serait mieux rendu chez un partenaire, nous le disons. À cet égard, l'idée qu'il faudrait remettre de l'ordre entre des services concurrents est une idée fausse. À titre d'exemple, le CIO de Verdun suit 7 000 jeunes par an, la Mission locale 1 500 et nous n'établissons annuellement que 35 fiches de liaison. En ce qui concerne la Lorraine, il existe par ailleurs déjà une organisation régionale, concrétisée par la Charte régionale des structures de l'AIO, signée en novembre 2009, qui préfigure la labellisation.

Envisagez-vous des partenariats avec d'autres acteurs de l'orientation ?

Ces partenariats existent déjà à des degrés divers (PAIO et Missions locales, réseaux publics de l'insertion des jeunes, etc.) et impliquent fortement les directeurs de CIO. Ainsi font-ils partie des services publics de l'emploi local dans la plupart des bassins d'emploi, de même qu'ils sont dans diverses académies les responsables des plateformes de suivi et d'appui aux décrocheurs. On peut aussi citer les parcours de découverte des métiers et des formations en collège et en lycée, qui nécessitent des partenariats de plus en plus actifs avec les milieux socioéconomiques.

De façon plus générale, quelle est la position de l'AND-CIO sur le label ?

Il y a trois aspects. En ce qui concerne la question de la labellisation des CIO, il est évident pour l'AND-CIO que nos centres sont les éléments de base du service public d'orientation (SPO) : la capacité à s'orienter tout au long de sa vie ne provient pas d'une génération spontanée à l'entrée dans la vie active mais se construit à partir de l'entrée au collège. D'aucuns ont même suggéré de parler d'orientation et de faire découvrir des métiers aux écoliers, cela ne me paraît absolument pas ridicule. Pour ce qui est du label, le cahier des charges est assez précis, mais n'est pas un référentiel dont les critères seraient les mêmes sur tout le territoire, les composantes des “pôles information et orientation"… varieront sans doute d'une région à l'autre. Enfin, le cahier des charges introduit dans la partie III des critères d'organisation prévoyant un “responsable de la coordination", qui est probablement l'élément le moins clair de l'arrêté. D'une part, chacun des partenaires ne fait pas seulement du premier accueil, mais remplit les missions pour lesquelles il a été créé. D'autre part, le cadre d'action de ce responsable et ses relations aux différentes institutions représentées n'est pas précisé : on pourrait le concevoir dans une logique de partenariat et d'incitation à des actions communes, mais chaque institution doit garder son cadre de référence et son identité. Il n'y aurait d'ailleurs plus lieu d'établir des partenariats si nous étions tous pareils. Aucun de nous n'envisage d'avoir un ascendant sur ses partenaires, qui, rappelons-le, sont des pairs.

Comment percevez-vous la notion de “lieu unique" ?

Plutôt qu'un lieu unique “contenant", ce qui se profile est un réseau local où les collaborations seraient mieux affichées. Cela nous paraît plus réaliste : les usagers sont bien mieux accueillis chez nous, avec notre environnement personnel et professionnel, que si nous devons juste prendre notre ordinateur portable sous le bras pour aller assurer des permanences avec d'autres. L'idée d'un lieu unique où vous avez tout est séduisante, mais nécessite des crédits.

Comment allez-vous procéder pour la demande de labellisation : en tant que réseau, ou CIO par CIO ?

Un CIO ne peut pas demander individuellement la labellisation, même s'il remplit les critères : d'abord, il n'a pas la personnalité juridique lui permettant de contracter, ensuite c'est à l'échelon régional que se font les propositions. Par ailleurs, des préfigurations de conventions régionales existent dans plusieurs régions avec des déclinaisons locales, c'est donc l'échelon rectoral qui devra se saisir du dossier et interviendra dans la plupart des cas, surtout si la délégation régionale de l'Onisep devient siège d'une des plateformes virtuelles.

En tout état de cause, nous sommes prêts, et l'AND-CIO souhaite que les CIO ne soient pas “oubliés" dans le processus et qu'ils constituent une des bases fondamentales de l'organisation du SPO. Nous demanderons à nos adhérents d'être vigilants sur la préparation de ces conventions et, là où les Rectorats “tarderaient" à se saisir du dossier, de rappeler la nécessité que l'Éducation nationale organise à travers ses CIO sa participation au SPO et à la labellisation. Nous serons également vigilants quant au respect des critères : nous proposons des prestations de qualité, et nous ne souhaitons pas une distribution généreuse du label à des acteurs qui proposeraient des prestations plus légères.

Le cahier des charges ne dit rien des éventuels financements liés au label. Qu'en pensez-vous ?

C'est le moins que l'on puisse dire : aucun crédit n'est prévu. Ainsi, par exemple, du financement du responsable de la coordination évoqué précédemment et de ses moyens de fonctionnement, qui ne sont pas évoqués. Pour ce qui est de la “professionnalisation" des acteurs - dont il faut préciser qu'il s'agit en fait d'échanges de pratiques, puisqu'a priori, tous sont déjà des professionnels -, chaque partenaire participe sur ses propres deniers, même si certaines Régions ont pu créer des lignes de crédit à cet effet.

[(Pour faire plus ample connaissance avec les positions de l'AND-CIO et ses propositions sur l'ensemble de la problématique de l'orientation tout au long de la vie : www.andcio.org)]