Pour une vraie individualisation de la notion de parcours

Par - Le 01 octobre 2011.

“Un parcours professionnel ne relève pas que de variables statistiques : il est avant tout vécu et ressenti par celui qui le suit." Lors de la conférence “Comprendre les parcours : outils, méthodes, enjeux", Thierry Berthet, chercheur au CNRS et directeur du centre associé au Céreq de Bordeaux, a souligné l'impact psychologique des transitions sociales vécues par les individus lors de leurs parcours
professionnels.

Loin des simples considérations statistiques, le chercheur a tenu à mettre en évidence la nouvelle norme induite par la notion même de parcours : “Historiquement, les parcours scolaires, puis professionnels, s'inscrivaient dans une démarche d'obtention d'un emploi stable et d'évolution dans cet emploi. Ce n'est désormais plus le cas." Aux yeux de Thierry Berthet, cette démarche privilégiant la “voie royale" des études générales a vécu. La conjoncture et les transformations de la société contraignent désormais tant les universitaires que les
acteurs publics de l'emploi à tenir compte des parcours atypiques. “Au Québec, 40 % des parcours scolaires peuvent être considérés sous l'angle de l'éclectisme et de l'atypisme, a-t-il indiqué, et il en va de même des parcours professionnels et de l'emploi en général. La norme est aujourd'hui la précarité, la flexisécurité." Si le chercheur a déploré le fait que la notion même de parcours induise de facto une déstabilisation générale des relations salariales classiques, il a rappelé qu'il appartenait tant aux sociologues qu'aux statisticiens d'assumer ce fait social et de tenter d'analyser cette nouvelle “culture de la capacité à naviguer entre plusieurs situations de travail variables".

Harmoniser les approches sociologiques et statistiques

“Autant de variables, autant de typologies sociologiques", a-t-il souligné, insistant sur l'absence d'homogénéité entre les différentes instances universitaires étudiant ce sujet. “Devant ce flou analytique, les acteurs publics n'ont qu'à se contenter de piocher dans les différentes approches pour choisir celle qui correspond le mieux à leur vision politique de l'emploi. Il est nécessaire d'harmoniser les connaissances sociologiques et statistiques suite p. 18 s
suite de la p. 17 s en la matière afin de permettre aux acteurs publics de développer un dispositif juste
d'évaluation des politiques publiques en matière de parcours professionnels !"

Une harmonisation qui ne saurait se limiter au cadre hexagonal, mais bien s'étendre à toute l'Europe, tant la notion même de parcours est différente d'un pays à l'autre. “Certains chercheurs européens ont appris à raisonner en termes de capital humain, de capacité aux transitions professionnelles, d'approches individuelles, de flexisécurité. En France, le débat sur cette dernière notion n'a même pas eu lieu, a-t-il estimé. Le concept même de sécurisation des parcours a anesthésié toute réflexion en la matière."

Car Thierry Berthet préconise avant tout une approche individuelle de la notion de parcours. “Les acteurs publics ne doivent plus se cantonner au diptyque territoire-secteur, mais intégrer l'individu et sa capacité à transiter d'un emploi à un autre. Évidemment, cela suppose de prendre en compte ces individualités dans leur ensemble, y compris en termes de santé ou de logement."