Entretien avec Jean-Robert Pitte, délégué à l'information et à l'orientation
“Nous avons voulu que les relations soient aussi simples que possible"
Par Patricia Gautier-Moulin - Le 01 juin 2011.
Avez-vous eu des réactions à la publication du décret et de l'arrêté sur la labellisation des lieux d'accueil, et dans quels délais envisagez-vous la mise en place du SPO ?
Oui, les retours sont dans l'ensemble très positifs. Même s'il subsiste encore des inquiétudes du côté des conseillers d'orientation psychologues des CIO. Ils doivent savoir qu'ils font déjà très bien leur travail, et qu'en s'adaptant à la nouvelle approche de l'orientation tout au long de la vie, ils peuvent rendre d'éminents services au service public d'orientation (SPO).
Sur les délais, j'ai déjà appris que des propositions vont émaner d'organismes qui souhaitent ensemble demander
la labellisation. Certains vont déposer très vite leur dossier auprès du préfet de région afin qu'il soit examiné lors de la prochaine réunion du CCREFP. Les premiers labels “Orientation pour tous" devraient être accordés avant les vacances d'été et j'espère qu'à la fin de l'année, la moitié de la France sera couverte.
Nous sommes passés des termes “lieu unique", dans la loi, à “un même site géographique", dans le décret. Pouvez-vous préciser à quoi correspond exactement cette notion ?
La formule “même site géographique" qui a été adoptée est celle qui était souhaitée par le gouvernement et qui a été confirmée par le Conseil d'État. Si l'on avait décidé qu'un lieu unique désignait strictement des organismes regroupés sous le même toit pour assurer ensemble le premier conseil en orientation, il aurait fallu un siècle pour que la France soit couverte. En acceptant une application plus réaliste, nous allons favoriser les “mariages d'amour" qui déboucheront à terme, je l'espère, sur des regroupements immobiliers lorsque l'occasion s'en présentera.
Que ce soit un lieu unique comme une Cité des métiers ou un ensemble d'organismes, appartenant à des réseaux variés (CIO, ML,
Pôle emploi, MDE, Crij, etc.), l'important est que la décision soit prise d'un commun accord à l'échelle d'un bassin de vie.
Nous avons voulu que les relations soient aussi simples que possible. Ces organismes ne sont pas obligés de créer une association.
Ils peuvent conclure une simple convention de bonnes pratiques et de coordination sur la base du cahier des charges relatif à l'attribution du label. Lorsque ces organismes seront labellisés, ils pourront afficher le logo “Orientation pour tous". Cela signifie que, sans perdre leurs spécificités, ils acceptent d'accueillir tous les publics pour un premier conseil en orientation personnalisé (documentation, premier entretien et accompagnement éventuel vers la structure qui répond le mieux aux besoins exprimés). Dans le même quartier, plusieurs organismes peuvent avoir le logo. C'est à eux de décider s'ils peuvent ou non mettre en place un lieu matériel unique.
Quelle place pensez-vous accorder aux réseaux ?
Il sera obligatoire dans les groupements d'organismes qui demanderont une labellisation que participent Pôle emploi, un CIO,
une Mission locale et une structure du Réseau information jeunesse. Par contre, certaines structures sont appelées à relever du “deuxième cercle". Il s'agit de structures d'information, très spécialisées et souvent peu nombreuses, comme, par exemple, les centres d'information sur les métiers de l'armée ou des différentes branches professionnelles, qui n'ont pas vocation à une labellisation. En revanche, elles sont très utiles et pourront être mentionnées dans les conventions en tant que partenaires.
Quel maillage du territoire envisagez-vous ?
Dans la France rurale et semi-urbaine, la labellisation de trois à quatre lieux par département me semblerait satisfaisante.
Dans les grandes métropoles et les zones urbaines, il faudra trouver la bonne échelle. Cependant, tout le monde a beaucoup réfléchi
au “découpage" du territoire et je me réjouis d'avoir rencontré partout une envie forte d'avancer, en particulier de la part des Conseils régionaux. Certaines Régions, comme Rhône-Alpes, Paca, Bretagne, Limousin ou Champagne-Ardenne, par exemple, ont déjà beaucoup avancé sur l'organisation de la carte des lieux d'orientation. Une circulaire va très prochainement être adressée aux préfets et aux recteurs, insistant sur la nécessité de réfléchir avec les présidents de Régions au bon maillage du territoire pour l'usager.
Prévoyez-vous des moyens financiers pour accompagner cette mise en place ?
Non, mais nous pouvons très bien avancer avec les moyens déjà disponibles. Rappelons que l'orientation, personnels compris, est financée à 84 % par l'État, 12 % par les partenaires sociaux et 4 % par les Régions (chiffres CNFPTLV).
Pour la formation complémentaire et la polyvalence des conseillers, je fais confiance aux échanges : lorsque différents partenaires travaillent ensemble, il communiquent plus facilement sur leurs méthodes et leurs pratiques, les cas à traiter ou le contexte local, et s'enrichissent mutuellement. C'est dans cet esprit que j'envisage la formation des professionnels, c'est-à-dire une démarche qui permet aux différentes familles de mieux se connaître et de travailler plus efficacement ensemble.
Je suis très enthousiasmé par les réalisations des Cités des métiers où se côtoient les professionnels de la plupart des réseaux : c'est un modèle remarquable, créé voici dix-huit ans. Mon rêve est que ce modèle soit contagieux.
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