Un “service public régional de la formation permanente par mandatement avec octroi de droits"

Par - Le 16 avril 2012.

“Trouver une troisième voie entre le tout marché et le tout service public de l'État", voilà à quoi Yanic Soubien, vice-président de la Région Basse-Normandie en charge de la formation tout au long de la vie, assure réfléchir “depuis quasiment 2006". Au cœur de la réflexion, la mise en place d'un service public régional qui repose sur l'ensemble des opérateurs, publics, associatifs ou privés.

Valider des opérateurs sur plusieurs années

“Peu importe le statut juridique de l'opérateur s'il est en capacité de répondre aux missions de service public suivantes, précise Yanic Soubien : lutte contre l'illettrisme, accès aux compétences-clés, processus d'orientation, formation qualifiante ou certifiante, etc. Qui y répond peut entrer dans le cadre du service public régional de formation permanente, qui s'apparente à un service social d'intérêt général ou à un service économique d'intérêt général, lu sous l'angle du droit européen." Et de préconiser de s'affranchir d'une interprétation restrictive des marchés publics, en déployant un système de “mandatement avec octroi de droits spéciaux" sur une base pluriannuelle. Commentaire : “Permettre à des opérateurs, qu'ils soient publics, associatifs ou privés, de mener à bien leur mission sur un territoire donné pendant trois ou quatre ans, au bout desquels la mission est revisitée et un mandat redonné pour de nouveaux publics, besoins d'entreprise, métiers, etc." Selon l'élu, une telle solution aurait l'avantage de “pérenniser" l'activité des opérateurs, lesquels seraient présélectionnés à partir d'un “diagnostic de situation lié aux besoins d'un territoire". Ce faisant, la Région travaillerait avec des “opérateurs déjà identifiés", qui seraient invités à déposer leur candidature afin d'être “validés comme opérateurs du service public régional" pour une période de trois ou quatre ans.

S'appuyer sur les “services associés" pour subventionner

Le choix de travailler avec des “opérateurs déjà identifiés" ne lui fait-il pas craindre de marcher dans les pas du Limousin, condamné pour avoir subventionné l'Afpa ([voir l'interview de Jean-Paul
Denanot->38170]) ? “L'Afpa est l'exemple parfait pour nous obliger à innover en matière de politique d'achats, de subventions ou de service public, répond l'élu régional. Subventions, SSIG avec mandats, délégation de service public… 22 Régions pratiquent aujourd'hui de manière différente. J'ai fait le choix d'une politique d'allotissement qui garantit quasiment 98 % du marché à l'Afpa sur quatre ans. Ceux qui ont fait le choix d'aller trop vite avec le SSIG se sont, à mon avis, un peu trompés, en privilégiant une réflexion sur le type de contrat à passer, plutôt que sur le type de service à rendre !" Et d'expliquer : “L'Afpa étant capable de loger et de restaurer ses stagiaires, nous avons fait une politique d'allotissement qui nous a permis de faire du marché sur la formation et de la subvention sur les services associés..."

“Au niveau national, le système va évoluer"

Convaincu que l'Afpa aura sa place dans le cadre du service public régional de formation permanente fonctionnant par mandat, le vice-président bas-normand compte sur “une évolution du cadre réglementaire français pour sortir des situations d'illégalité qu'ont pu connaître certaines Régions. Je pense que la discussion est à présent très sérieuse entre l'ARF et la DGEFP, pour reconnaître la formation professionnelle comme une mission relevant du SSIG ou du SIEG". Se déploierait alors un système dual, avec d'un côté, “le mandatement avec octroi de droits spéciaux", de l'autre, “une politique de l'ordre du marché".

Où seront les frontières ? “Dans le cadre du service public, nous devons garantir l'accès au premier niveau de qualification sans entrer dans une démarche de marchandisation. Tout ce qui relève des savoirs de base, de la culture générale, des compétences sociales et numériques, du processus d'orientation et de l'accès à un premier niveau de qualification (jusqu'au bac pro), voilà, à grands traits, le périmètre qui doit faire l'objet du service public régional de formation permanente entendu comme SSIG", estime Yanic Soubien. Et de conclure : “Si nous sommes capables de définir et de territorialiser une offre globale de services par des partenariats qui permettent d'héberger, de restaurer, de transporter, de garder les enfants, etc., nous aurons réussi à faire valoir qu'il peut y avoir un service public régional, et non seulement national."