Tant que la question du patrimoine ne sera pas réglée, le futur de l'Afpa restera incertain

Par - Le 01 juin 2012.

La dévolution du patrimoine de l'État à l'Afpa n'est pas encore réglée, ce qui lui interdit actuellement tout plan de modernisation de ses équipements", peut-on lire dans l'annexe du rapport de Gérard Larcher. Victime d'une situation dégradée tant sur le plan de la gestion RH que du point de vue financier, l'Afpa est également “prise en otage" concernant son patrimoine. Un ensemble considérable, qui perd actuellement de la valeur, faute d'entretien,
et risque finalement de coûter cher à son futur
propriétaire…

L'État, qui a décidé de se désengager complètement de l'Afpa, a choisi de lui transférer ce patrimoine dont il était propriétaire. Il a pour cela utilisé la loi du 24 novembre 2009, dont l'article 54 prévoit : “Sont apportés en pleine propriété à l'Afpa, au 1er avril 2010, les biens appartenant à l'État mis à sa disposition dans le cadre de son activité. (…) Cet apport en patrimoine s'effectue à titre gratuit et ne donne lieu à aucune indemnité ou perception de droits ou de taxes (…) au profit de l'État."

Un transfert qui n'a pas satisfait les Régions. Deux d'entre elles, Poitou-Charentes et Centre, ont même saisi le Conseil constitutionnel d'une QPC (question prioritaire de constitutionnalité) “afin de contester les conditions du transfert des biens immobiliers" prévu par l'article 54. “La loi a transféré les crédits alloués par l'État à l'Afpa aux Régions, nous avons considéré que nous devions également bénéficier du transfert du patrimoine", explique Dominique Gaudin, responsable du service juridique du Conseil régional Poitou-Charentes. Et le Conseil constitutionnel a tranché : l'État ne peut pas transférer ces biens.

Compétences = moyens

Les Régions veulent avoir une vision globale sur la formation professionnelle : la compétence est transférée, les moyens doivent l'être aussi", résume Dominique Gaudin : c'est pour ce motif que le Conseil régional de Poitou-Charentes a alors demandé au préfet la mise à disposition de ce patrimoine. Devant son refus, le tribunal administratif, à son tour, a tranché le 29 mars dernier : dans l'état actuel des choses, la Région n'a pas plus de droits qu'un autre sur le patrimoine de l'Afpa. C'est à la loi de parler.

“D'où une situation pour le moins incertaine", souligne Dominique Gaudin, “les biens sont toujours la propriété de l'État qui ne les utilise pas… C'est une véritable impasse. Après la décision du Conseil constitutionnel en 2010, nous attendons que le législateur règle la question. Le fera-t-il avant la fin de l'année ?" Compétences, crédits, bâtiments, les Régions veulent être propriétaires de tout pour être responsables de tout, “pour une gestion globale de la formation professionnelle", insiste Dominique Gaudin. Que va-t-il se passer ? La bataille juridique va-t-elle se poursuivre ? “Nous nous interrogeons sur l'opportunité de faire appel de la décision du tribunal administratif, ce qui est d'ailleurs assez anecdotique, car la procédure risque de durer quatre ans !"

La piste des baux emphytéotiques

Une mission composée d'experts de l'Inspection générale des finances et du Conseil d'État a présenté, lors de l'assemblée générale de l'Afpa du 27 juin 2011, un rapport commandé par Nadine Morano, alors ministre chargée de l'Apprentissage et de la Formation professionnelle, sur le devenir des biens immobiliers de l'Afpa. Ce groupe a suggéré la solution des baux emphytéotiques signés entre l'État et l'Afpa.

Il s'agirait de baux d'une durée de quatre-vingt-dix-neuf ans, conférant au preneur un “droit réel sur la chose donnée à bail", à charge pour lui d'améliorer le fonds, en échange d'une redevance. Chacun des 200 sites de l'Afpa signerait un bail de ce type.
Cette hypothèse écarte donc celle du transfert de l'immobilier aux Régions, ce que n'a pas manqué de dénoncer l'ARF : cette solution “maintient l'État en position d'arbitre sur l'évolution de ce patrimoine".

L'association a alors proposé que l'État transfère le patrimoine aux Régions à titre gracieux et assume l'entretien “en attendant la mise en œuvre de la solution juridique retenue".
Mais rien n'a été décidé. D'autres réflexions ont été engagées, telles que le transfert de l'usufruit aux Régions, le patrimoine restant propriété publique. Compte tenu du contexte politique, l'élection présidentielle, suivie des législatives, la question reste en suspens. Mais quelle que soit la décision politique, elle sera déterminante pour l'avenir de l'Afpa.