Questions à Stéphane Lardy, secrétaire confédéral de Force ouvrière, chargé de l'emploi et de la formation professionnelle

Par - Le 01 juin 2012.

“Comme l'Apec, l'Afpa pourrait cumuler une partie commerciale et une partie mission de service public"

Quel diagnostic faites-vous aujourd'hui de la situation de l'Afpa ?

L'Afpa est aujourd'hui en danger de mort. La question première est de savoir si cet acteur essentiel de l'emploi et de la formation doit toujours être présent à l'avenir. L'une des missions premières de l'association est de former des demandeurs d'emploi, et elle en forme encore 90 000 par an ! L'Afpa a des atouts : une offre innovante qui permet la réinsertion durable, beaucoup de formations qualifiantes, et son maillage territorial. Mais elle n'est pas structurée pour survivre dans le secteur privé.

Nous pensons que l'Afpa peut s'exonérer en partie du droit concurrentiel. Il faut travailler sur la mise en place d'un mandat de service public, ce qui éviterait d'avoir recours au système de la notification. En effet, le paquet “Almunia-Barnier" élargit les SIEG en y intégrant les politiques d'insertion et de réinsertion. Pour FO, cela concerne clairement l'Afpa. Sur le marché de l'insertion, il y a peu d'opérateurs dans ce champ de compétences.

Comment faire pour sauver l'association ?

Il reste des pistes à explorer. Par exemple, on peut se demander s'il ne serait pas possible de faire avec l'Afpa ce qui a été réussi avec l'Apec. Cette dernière a conservé une partie commerciale et une partie mission de service public. Je ne vois pas pourquoi l'Afpa ne pourrait pas fonctionner sur le même modèle. Cela permettrait, de plus, d'éviter le mécanisme de la notification. Je ne comprends pas comment on peut dire que l'association est un OF comme un autre, alors qu'elle a dans son CA des représentants de l'État, des Régions et des partenaires sociaux.

Certaines Régions souhaitent voir le patrimoine de l'Afpa leur revenir. Qu'en pensez-vous ?

C'est le deuxième niveau de débat : veut-on un opérateur SIEG régional ou national ? Nous pensons que l'égalité de traitement entre tous les citoyens passe par un opérateur national. En effet, la question du maillage se pose toujours, car toutes les régions ne sont pas également pourvues en centres Afpa, et certains campus sont mieux équipés que d'autres. S'ajoute la question du statut des personnels, qui risque l'éclatement. Dire que la mission des Régions se limitera à la mise en œuvre et que les grandes orientations resteront du ressort de l'État ne suffira pas à empêcher que, selon leur lieu d'habitation, certains demandeurs d'emploi seront plus ou moins bien pris en charge que d'autres. En effet, la mise en œuvre implique des arbitrages budgétaires, qui ont nécessairement des impacts. Si l'on veut des petites Afpa, ce ne sera plus l'Afpa, cela deviendra autre chose.

L'association n'a de sens qu'au niveau national. Son objet n'est pas de répondre uniquement à des logiques de reconversion et de ne satisfaire que les besoins en main-d'œuvre des Régions. J'irais même plus loin, en affirmant que c'est une vision trompeuse de la réalité du marché du travail. Certains bassins d'emploi n'offrent quasiment que des contrats intérimaires. Comment faire alors pour permettre aux demandeurs d'emploi d'aller vers l'emploi stable et durable, éventuellement par le biais d'une mobilité géographique ? L'adaptation au marché local ne doit pas être l'unique donnée à prendre en compte. Il faut que l'État mette la main à la poche, et c'est une question que nous posons au nouveau gouvernement.