Démarrage difficile pour le reclassement des salariés de Sernam-Aster

Lorsqu'un plan social est inévitable, se déclenche une procédure qui prévoit, à travers le PSE (plan de sauvegarde de l'emploi) la reprise ou le reclassement des salariés. Ce dernier n'est pas simple à mettre en œuvre. Exemple avec le groupe de transports Sernam-Aster, dont les salariés ont reçu leur lettre de licenciement le 4 avril dernier.

Par - Le 17 juin 2012.

Le 1er juin, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault estimait à 36 le nombre d'entreprises menacées par des plans sociaux. Mais de nombreuses grandes entreprises ont déjà subi une liquidation menant au licenciement collectif de leurs salariés. Sernam-Aster, spécialiste du transport express, en fait partie, comme Lejaby ou Arcelor-Mittal, qui ont fait l'actualité en raison de la mobilisation des salariés contre la fermeture de leur usine. Quelques jours avant la liquidation judiciaire, prononcée le 13 avril dernier, 611 salariés de Sernam et 141 d'Aster recevaient leur lettre de licenciement, annonçant pour la plupart d'entre eux le début d'une traversée du désert. Si certains ont pu retrouver un emploi par eux-mêmes, la majorité se trouve confrontée au reclassement.

Toute entreprise qui licencie pour motif économique doit en effet mettre en place, dans le cadre d'un PSE, une cellule aidant les licenciés dans la recherche d'un nouvel emploi. Compte tenu de l'ampleur du plan social, Sernam-Aster a également bénéficié du soutien des pouvoirs publics, mobilisés à quelques semaines du premier tour de l'élection présidentielle.

Le groupe et ses salariés ont subi de nombreuses difficultés depuis 2000 : la situation économique se dégradant, des licenciements importants ont été décidés par vagues.

L'entreprise a été maintenue hors de l'eau par l'entrée dans son
capital d'investisseurs, notamment la SNCF et Butler Capital Partner, qui l'ont recapitalisée. Pourtant, si elle a été stabilisée, la situation commerciale de Sernam-Aster ne s'est pas améliorée, en raison des choix stratégiques de la SNCF, selon les organisations syndicales qui l'accusent d'avoir “programmé" la liquidation depuis plusieurs années [ 1 ]Les comités d'entreprise Sernam et Aster ont d'ailleurs porté plainte contre la SNCF. . C'est donc dans un contexte extrêmement tendu que le plan de sauvegarde de l'emploi s'est mis en place.

Mobilisation des acteurs

L'avenir des salariés licenciés a mobilisé pouvoirs publics et monde du transport. Le 3 avril, une table ronde a réuni tous les partenaires autour du ministre des Transports, à l'époque Thierry Mariani. Le président de la SNCF s'est engagé à proposer environ 500 offres d'emploi réparties sur tout le territoire. La FNTR (Fédération nationale des transports routiers), en partenariat avec Job-transport
Site emploi de la logistique.
, a proposé au ministère du Travail et aux partenaires sociaux de mettre en place, sur internet, un espace dédié exclusivement aux salariés afin qu'ils y déposent leur CV et que les employeurs y placent gratuitement des offres d'emploi (plus de 1 600 offres étaient disponibles en mai). Une “réponse pragmatique face à une situation exceptionnelle".

Malgré ces propositions, des insatisfactions se sont exprimées du côté des représentants des salariés. Pour Alain Delpuech, de la CGT Transports, deux mois après cette table ronde, “la SNCF n'a pas tenu parole. Au lieu des 500 postes, elle propose en réalité une poignée d'emplois, ce qui va à l'encontre des engagements pris lors de la réunion avec les pouvoirs publics". Et d'ajouter, plus indulgent : “Quant à la FNTR, elle a fait avec ses moyens. Le problème est qu'elle ne peut pas donner ce qu'elle n'a pas." “Entre 150 et 200 propositions ont été faites", souligne FO, qui n'hésite pas à parler de “promesse électorale". Par ailleurs, “la bourse à l'emploi vise des postes qui n'ont rien à voir avec les métiers du transport".

Lent démarrage de la cellule

Parallèlement à la mobilisation des acteurs économiques et politiques, la cellule de reclassement prévue dans le PSE s'est mise en place le 4 avril. Sa mission : soutenir les salariés, favoriser leur mobilité et leur adaptation à de nouveaux environnements de travail. Réunions collectives, entretiens individuels, ateliers, mise à disposition de moyens logistiques, tels que le téléphone ou les ordinateurs, la cellule choisie par les élus du personnel tient un rôle fondamental de suivi, y compris psychologique. Le cabinet d'experts Anveol, cinquième acteur français de l'accompagnement des transitions professionnelles, a été désigné pour accompagner les licenciés de Sernam-Aster. Les consultants lancent actuellement les entretiens individuels.

Là encore, la solution ne semble pas satisfaire totalement les représentants des salariés. “Nous ne sommes pas tout à fait satisfaits de l'engagement de la cellule, que l'on souhaitait plein et entier, pointe en effet Alain Delpuech. Les choses se sont mises en place trop lentement, les salariés ont reçu leur lettre de licenciement le 4 avril et ce n'est que début mai que la cellule a démarré. Les réunions collectives qui devaient être organisées avant la fermeture de l'entreprise (telles que prévues dans le cahier des charges) n'ont pas eu lieu." Par ailleurs, “la bourse à l'emploi proposée ne recense qu'un copier-coller des offres de Pôle emploi, et le démarchage auprès des entreprises a beaucoup tardé, déplore-t-il. Un mois après, nous en étions encore au stade du recensement, ce n'est pas ce que nous avions souhaité. Nous avions demandé des actions avant les licenciements, il fallait rechercher des solutions afin d'éviter que la misère sociale s'installe. Ce qui est malheureusement en train d'arriver". La cellule de reclassement a été mise en place pour six mois, une “aberration", aux yeux des syndicats.

Notes   [ + ]

1. Les comités d'entreprise Sernam et Aster ont d'ailleurs porté plainte contre la SNCF.