Stéphane Lardy - un fin politique à la tête du pôle formation de FO

Par - Le 16 mai 2013.

“Quelqu'un de froid dans la négociation, qui n'agit pas sur des coups de tête." Voilà comment Jean-Claude Quentin, ancien secrétaire confédéral de Force ouvrière pour la formation et l'emploi, décrit son successeur.

C'est vrai qu'à première vue, Stéphane Lardy, 47 ans, ne fait pas dans le tonitruant. “Quand on est à ma place, on prend des coups. Mais moi, je dis toujours ce que je pense", résume celui que certains désignent comme le possible successeur du secrétaire général, Jean-Claude Mailly. Le ton est posé, courtois, mais néanmoins ferme.

Ne vous fiez pas aux dehors discrets et aux sages vestes sombres. Négociateur de l'accord sur la sécurisation de l'emploi, il est de ceux, à l'instar de ses homologues de la CGT, qui ont radicalement refusé de signer. Il a ses propres armes, au premier rang desquelles une parfaite maîtrise de son sujet et une vraie horreur de l'à-peu-près. L'instauration, par le projet de loi transcrivant l'Ani, du compte personnel de formation, n'échappe pas à une revue méthodique : “Quel est l'objectif du CPF ? Quels sont les publics visés ? Les types de formations éligibles ? Comment va-t-il s'articuler avec les dispositifs existants ? Comment le financer ? Sur quels critères l'employeur doit-il abonder ?" Autant de questions qu'il compte mettre sur le tapis à l'occasion de la négociation formation qui devrait s'ouvrir à l'automne prochain. “Stéphane Lardy est techniquement mieux armé que je ne l'étais quand je suis arrivé à son poste. Jean-Claude Mailly et moi-même avons peu hésité pour le choisir comme mon successeur", nous confie Jean-Claude Quentin, ancien préparateur en pharmacie. _ C'est en 1991, muni d'un doctorat en sociologie, d'une maîtrise en sciences politiques et d'une autre en droit social que le jeune Parisien, fils d'employés, fait son entrée à FO en tant que juriste. À partir de 2000, il prend un mandat électif et devient secrétaire fédéral de la FGTA (agroalimentaire). Djamal Teskouk, conseiller confédéral à la CGT, reconnaît ses talents : “Il est toujours très pertinent et précis, et sait par ses traits d'humour faire passer, sans en avoir l'air, des messages très politiques." Mais ne peut-on reprocher à Stéphane Lardy un manque d'expérience sur le terrain ? Jean-Claude Quentin s'y refuse : “L'expérience, on se la fait, alors que les pré-requis techniques, il est difficile de les acquérir une fois en fonction…"

Un négociateur en “porte-à-faux" ?

Vice-président de Pôle emploi, membre du bureau de l'Unedic, Stéphane Lardy est aujourd'hui le seul négociateur formation à prendre aussi en charge les questions d'emploi. Pour François Hommeril, ancien secrétaire national CFE-CGC en charge de la formation professionnelle, candidat malheureux à la présidence de son syndicat, “cette double casquette a pu le mettre en porte-à-faux. Stéphane Lardy a voté pour une contribution du FPSPP (Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels) au financement de la R2F (rémunération de fin de formation) dans le cadre du CA de Pôle emploi. Cette décision s'est imposée au CPNFP (Comité paritaire national pour la formation professionnelle) qui s'était prononcé contre". “Ses prises de position reflètent les choix de son organisation, parfois au détriment, selon nous, de la dimension formation professionnelle", renchérit Djamal Teskouk. “La question de la R2F a fait débat. Parfois, il faut faire des choix. Nous sommes face à des politiques, et en période de chômage de masse, le temps politique ne s'accorde pas avec le temps social", se défend l'intéressé. Il est d'ailleurs à noter que sur ce dossier, d'autres organisations − même dotées de deux négociateurs différents − ont pris la même décision. Et de rappeler que c'est bien Force ouvrière qui, en mars 2012, a pris l'initiative d'attaquer le décret précisant les modalités de prélèvement de 300 millions d'euros par l'État sur les ressources du FPSPP, en soulevant une question prioritaire de constitutionnalité [ 1 ]Que le Conseil d'État a finalement décidé de ne pas renvoyer au Conseil constitutionnel..

Le négociateur de FO déplore par ailleurs une vision politique “curative" de la formation : “Ce n'est pas en formant que l'on crée de l'emploi !" Et l'avenir ? “Dans cinq ou six ans, je ne pense pas que je serai toujours à mon poste. Je verrai ce que l'avenir me propose. Au bout d'un moment, on tourne en rond et il devient difficile d'avoir un regard neuf…" Clair, net et précis.

1991 entre à Force ouvrière, au service juridique

2000 secrétaire fédéral de la FGTA-FO

2007 secrétaire confédéral FO en charge de la formation professionnelle et de l'emploi

2010 vice-président de Pôle emploi

Notes   [ + ]

1. Que le Conseil d'État a finalement décidé de ne pas renvoyer au Conseil constitutionnel.