Agriculture : une petite contribution FPSPP, mais des chômeurs qui restent formés

Par - Le 16 octobre 2013.

Le saviez-vous ? Le secteur de la production agricole bénéficie d'un taux de contribution au FPSPP
(Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels) deux fois inférieur au régime commun.
Mais attention, ce système est conditionné à la mise en place d'actions pour des publics prioritaires.
Pour encadrer celles-ci, la branche et l'État viennent de signer une convention-cadre.

Permettre d'agir de manière renforcée
pour l'accès à l'emploi et
à la qualification des jeunes et
des salariés les plus fragiles et de
sécuriser les parcours professionnels
des actifs face aux mutations
que connaît le secteur [de la production
agricole]." C'est ce que prévoit une
convention-cadre triennale (2013-
2015) signée le 25 septembre dernier
par Michel Sapin, ministre du Travail,
de l'Emploi, de la Formation pro
fessionnelle et du Dialogue social, et
Stéphane Le Foll, ministre de l'Agriculture,
de l'Agroalimentaire et de la
Forêt, avec les organisations professionnelles
et syndicales représentatives
du secteur.
Si les ministères se réjouissent de la
signature de ce texte “en pleine cohérence
avec les orientations de la loi
sur la sécurisation de l'emploi et de la
négociation en cours sur la formation
professionnelle", les dispositifs et financements
concernés par la conventioncadre
ne sont pas nouveaux. En effet,
celle-ci prend la suite d'une première
convention triennale, et concerne plus
précisément “la part non affectée au
FPSPP".

Une demi-contribution FPSPP pour le Fafsea

La part non affectée au FPSPP ?
Kesako ? Petit rappel historique par Yves
Honoré, directeur général du Fafsea
(Opca des salariés des entreprises et
exploitations agricoles) : “Depuis le
vote de la loi du 24 novembre 2009, les
organismes collecteurs sont tenus de verser
une portion de leur collecte au Fonds
paritaire. Cependant, en application du
Code du travail, le Fafsea est le seul à ne
verser que 50 % de cette portion, au titre
de la production agricole." Une revendication
portée à l'époque par la FNSEA
(Fédération nationale des syndicats
d'exploitants agricoles), qui, en 2009,
faisait valoir que la branche avait mis
en place un dispositif destiné à ouvrir
l'accès des demandeurs d'emploi aux
métiers de l'agriculture via des stages
d'acquisition de prérequis [ 1 ]Avenant n° 3 du 6 janvier 2009 à l'accord du 2 juin
2004 relatif à la formation professionnelle.
. Un versement
trop élevé au FPSPP risquait,
selon l'organisation, de diminuer d'autant
les fonds destinés à cet effort. Ainsi,
la fédération souhaitait participer pour
moitié de la contribution au Fonds et
réserver l'autre moitié à son dispositif,
l'Adema (Accès des demandeurs d'emploi
aux métiers agricoles).

“On ne peut pas faire n'importe quoi avec
cette somme, confirme Yves Honoré.
L'argent doit être dépensé pour des objectifs
similaires à ceux du FPSPP. C'est pour
cadrer cela que nous signons une convention
avec l'État." La part non affectée
au Fonds finance donc les actions qui
seront réalisées pour les publics prioritaires
identifiés par les signataires
(demandeurs d'emploi, salariés en
situation de chômage partiel, titulaires
de CDD, personnes handicapées, personnes
rencontrant des problèmes d'illettrisme,
jeunes sortis du système scolaire
sans qualification, salariés seniors
et de premiers niveaux de formation).

80 % des fonds pour l'Adema

Selon le directeur de l'organisme paritaire,
80 % des fonds couverts par la
convention, soit environ 5 millions
d'euros, bénéficient aux demandeurs
d'emploi via l'Adema. “9 000 stages
ont été financés en trois ans, et six mois
après la fin du dispositif, 50 % des bénéficiaires
sont soit en emploi, soit en formation
professionnelle", se félicite-t-il.
Le dispositif s'adresse aux demandeurs
d'emploi qui ne connaissent pas les
métiers et les activités agricoles. Il s'agit
d'une formation courte, d'une durée
de vingt-deux jours (154 heures), dont
quinze jours ouvrés (trois semaines)
au sein d'une entreprise agricole où le
chômeur découvre la réalité du métier.
Et les 20 % restants ? Ils sont ventilés
entre plusieurs dispositifs : des actions
de lutte contre l'illettrisme, un soutien
au contrat de professionnalisation et
au Cif-CDD pour les salariés les plus
fragiles, notamment. La
convention couvre également
les actions mises
en place au titre de la
POE (préparation opérationnelle
à l'emploi)
individuelle et collective
: “Nous avons financé
200 POE en 2012.
Nous en sommes encore
au démarrage, mais
nous constatons d'ores et
déjà une forte demande,
particulièrement dans
les petites entreprises",
explique Yves Honoré.
Et en agriculture, plus
que partout ailleurs, les besoins varient
beaucoup entre les différents bassins
d'emploi. “Avec l'aide d'observatoires
de la branche en régions, nous essayons
de coller au plus près aux spécificités des
territoires. En Languedoc-Roussillon, par
exemple, les demandes sont fortes pour des
formations en viticulture. Mais cela peut
être encore plus précis. En Champagne-
Ardenne, notamment, c'est spécifiquement
dans le domaine de la taille de la
vigne que des compétences sont nécessaires",
dit-il.

Depuis la signature de la première
convention-cadre, de nouveaux dispositifs
ont été mis en place par le
gouvernement Ayrault, au premier
rang desquels l'emploi d'avenir et le
contrat de génération. Ceux-ci constituent
ainsi une nouvelle entrée. “Si
la convention cite les emplois d'avenir,
ceux-ci sont en fait financés par le biais
d'un appel à projets du FPSPP, et non
directement par le Fafsea", précise Yves
Honoré. Contrairement au contrat de
génération pour lequel, selon le texte
signé, “les partenaires sociaux sont prêts
à mobiliser les dispositifs de formation
pour les entreprises qui voudraient entrer
dans la démarche et permettre aux futurs
salariés d'acquérir les compétences nécessaires
au remplacement de ceux partant
à la retraite".

65 millions d'euros en trois ans

Si la convention couvre environ 5 millions
d'euros par an (soit un “demi-
FPSPP"), Yves Honoré fait valoir que ce
sont en fait 65 millions d'euros qui ont
été dépensés pour les publics et dispositifs
couverts par la convention au cours
des trois dernières années. “Il ne faut pas
oublier que nous versons aussi 5 millions
d'euros au Fonds tous
les ans, ce qui porte la
dépense à 10 millions à
chaque exercice, et donc
30 millions sur la durée
de la première convention.
Mais nous allons
bien au-delà de cette obligation
: nous avons plus
que doublé la mise !", se
félicite-t-il.

Par ailleurs, le texte
signé entre la branche
et l'État permet la mise
en place de cofinancements
“afin de mener à
bien les actions et utiliser
les outils de la manière la plus efficace et la
plus pertinente possible. Les sources pourront
être nationales ou régionales – Pôle
emploi, FPSPP, Agefiph (Association
de gestion du fonds pour l'insertion des
personnes handicapées), Régions…".
Cependant, Yves Honoré pointe le fait
qu'il “n'est pas toujours facile, notamment
dans le cadre de cofinancements avec
les Régions, d'isoler ce qui relève de la
convention ou non. Nous sommes sur des
partenariats transversaux, qui couvrent
l'ensemble des secteurs", dit-il.

Suivi de la convention

Un groupe technique composé de
deux représentants du ministère du
Travail, de l'Emploi, de la Formation
professionnelle et du Dialogue social,
de deux représentants du ministère de
l'Agriculture, de l'Agroalimentaire et
de la Forêt, et d'une délégation de dix
membres représentant les partenaires
sociaux de la production agricole assurera
le suivi de la présente convention
dans le cadre de réunions régulières
(cinq du collège employeurs et cinq
du collège salariés, un représentant par
syndicat de salariés représentatif ). Le
Fafsea, quant à lui, adresse et présente
annuellement au groupe technique un
bilan détaillé quantitatif, qualitatif et
financier des actions conduites dans le
cadre de la convention.

Notes   [ + ]

1. Avenant n° 3 du 6 janvier 2009 à l'accord du 2 juin
2004 relatif à la formation professionnelle.