La Région Martinique va créer un établissement public chargé de la formation professionnelle

Par - Le 01 janvier 2014.

“La Martinique vient de loin en matière de formation. Dès et après l'abolition de l'esclavage,
l'épanouissement de notre peuple passe par l'éducation et la formation. À ce titre, l'homme martiniquais
doit figurer au centre de nos préoccupations et de nos attentions." Ces mots de Catherine Conconne,
première vice-présidente du Conseil régional de la Martinique, ont ouvert les 1ères Assises régionales de la
formation, organisées par la Région Martinique les 11 et 12 décembre à Schoelcher, près de Fort-de-France.

“Depuis trois ans, a expliqué Catherine
Conconne, nous avons souhaité une certaine
porosité entre toutes les politiques publiques
(éducation, formation, transports, etc.)."
La question centrale, pour la Région,
étant la coordination de ces politiques.
Représentant le préfet de région, Philippe
Maffre a fait écho aux propos de la viceprésidente,
en rappelant que “le taux
de chômage des jeunes Martiniquais est
scandaleux et choquant et il doit être
présent à nos esprits quand nous parlons de
formation". Et le secrétaire général de la
préfecture d'ajouter : “Nous avons développé
des dispositifs − emplois aidés − pour lutter
contre ce chômage des jeunes, mais la forme
la plus exigeante en matière de formation
est celle qui marche le moins bien (dans le
cadre des emplois d'avenir, notamment). Il
faut prendre la pleine mesure de cette réalité,
et le contexte doit nous aider à rechercher des
formes innovantes."

De ce point de vue, Philippe Maffre a
évoqué certains dispositifs “porteurs d'espoir
et qui fonctionnent bien" en Martinique,
comme le service militaire adapté. “Cet
exemple de pratique doit être source de
réflexion et il faut y trouver un ressort.
Après la formation de base qui leur revient,
les services de l'État continueront à apporter
leur contribution au-delà de la formation
initiale. Il y a d'ailleurs tous les dispositifs que
la Direccte développe (anticipation des compétences,
travail avec différentes filières pour
définir des politiques de formation professionnelle,
etc.). Parmi les différentes actions
menées (avec une enveloppe de l'État d'un
million d'euros) citons par exemple le développement
des emplois et des compétences."

Bilan d'étape de la stratégie
régionale


Le deuxième vice-président du Conseil
régional de Martinique, Daniel Robin,
également président de la commission
éducation-formation professionnelle, a
présenté un bilan d'étape de la stratégie
régionale en matière de formation :
“La formation s'inscrit dans une logique
transversale tout en étant éminemment
un champ qui doit être consensuel." La
Région souhaite participer à la gouvernance
des trois Missions locales au
côté de l'État. Un contrat d'objectifs et
de moyens (2011-2015) pour le développement
de l'alternance est financé à
hauteur de 5 millions d'euros par l'État
et de 5 millions par le Conseil régional.

La Région a créé une prime régionale
pour les contrats de professionnalisation
de 2 000 euros. Pour les demandeurs
d'emploi, elle a signé une convention
annuelle avec Ladom (l'Agence de l'outremer
pour la mobilité) qui se traduit par
une dotation de 1,5 million d'euros pour
150 à 200 stagiaires par an.
“La formation n'est pas une fin en soi, a fait
valoir Daniel Robin. Il faut également agir
sur les PMI et PME sur le plan de la gestion
prévisionnelle des emplois et des compétences,
et relancer l'activité. L'évolution de
la politique d'achats réalisés par la Région et
Pôle emploi est aussi une priorité. Il faudra
inventer de nouvelles modalités avec les
organismes de formation."

Un établissement public
formation-orientation


“Nous sommes engagés dans la création
d'un établissement public à caractère administratif,
a-t-il par ailleurs annoncé. Il
sera chargé d'exercer les missions de service
public de formation tout au long de la
vie et de coordonner les services publics de
l'orientation et de la formation tout au
long de la vie, et de l'emploi." Sa création
repose sur une demande d'habilitation
du Conseil régional au Parlement. Elle
implique une réforme partielle de la loi
du 13 février 2008 relative à la réforme
de l'organisation du service public de
l'emploi en outre-mer. Daniel Robin
s'est félicité d'un récent courrier de
Michel Sapin, ministre du Travail, dans
lequel ce dernier se déclare“favorable à
cette initiative qui pourrait s'intégrer au
projet de loi à venir" sur la décentralisation.
Cette réforme permettrait la modification
du mode de gouvernance du
Conseil régional de l'emploi, instance
consultative actuellement présidée par
le préfet, qui le serait désormais par
la Région, aux côtés des partenaires
sociaux, des acteurs des services publics
de l'emploi, de l'orientation et de la
formation.

“Impacter l'offre de formation"

“Le service public régional de l'orientation
va s'inscrire dans un pilotage régional,
mais l'enjeu majeur est d'impacter l'offre
de formation. Nous avons changé de cap
et de stratégie et à ce titre, l'ensemble
de l'appareil public doit aussi muter",
revendique Daniel Robin. La Région
relève en effet que, malgré les actions
de formation menées chaque année par
les centres privés de formation, l'employabilité
des demandeurs d'emploi
n'a guère évolué. En effet, le taux de
chômeurs n'ayant aucun diplôme est
de 69 %... La population titulaire d'un
niveau V (CAP, etc.) n'est pas épargnée :
40 % de demandeurs d'emploi. Et les
centres de formation privés ne disposent
pas toujours de moyens techniques et
humains nécessaires.

Dans ce contexte martiniquais, la Région
a signé le 18 novembre dernier avec dix
financeurs de la formation professionnelle
la Charte régionale pour le développement
de la qualité de la formation professionnelle.
“Nous avons engagé cette démarche
de charte régionale avec des acteurs volontaires
afin de les inscrire dans un processus
d'amélioration continue. Nous souhaitons
ainsi que la prestation de formation en
Martinique progresse", souligne Daniel
Robin. L'Agefma (Association de gestion
de l'environnement de la formation en
Martinique) a été mandatée par la collectivité
pour jouer le rôle de régulateur
dans cette démarche de développement
de la formation. Max Burdy, directeur
général adjoint de l'Agefma, a d'ailleurs
rappelé les enjeux d'une telle démarche
pour la Région : réduire les inégalités
d'accès, “passer d'une logique de gestion
de formation tous azimuts à une logique
réfléchie", construire une carte régionale
de formations (initiale et continue)
“cohérente sur le territoire", offrir des
parcours sécurisés et évaluer l'efficacité
des actions.

50 000 MARTINIQUAIS FORMÉS CHAQUE ANNÉE

L'Observatoire régional de l'emploi et de
la formation de Martinique, en collaboration
avec la Direccte (Direction des entreprises, de
la concurrence, de la consommation, du travail
et de l'emploi), procède à l'enregistrement et
au suivi des dispensateurs de formation. Il a
ainsi réalisé une analyse des données recueillies
par la Direccte entre 2010 et 2012, de
manière à établir une photographie du marché
de la formation en Martinique.

Dans le cadre des Assises régionales de la
formation, Valérie Marlin Retour, directrice
technique du pôle d'études de l'Agefma
(Association de gestion de l'environnement
de la formation en Martinique), a présenté
les chiffres-clés du marché de la formation.
“La déclaration des organismes de formation
est en hausse, entre 320 et 420 déclarations,
soit une augmentation de 20 % entre
2010 et 2012, et plus de 60 % de déclarations
d'activité de plus enregistrées entre
2009 et 2013", a-t-elle indiqué. En outre, les
organismes de formation ont formé environ
50 000 personnes chaque année (56 % de
salariés, 22 % de demandeurs d'emploi, et
12 % de particuliers).

5,4 millions d'heures
de formation en janvier


L'analyse révèle également une baisse du
nombre de stagiaires (environ 20 %) entre 2011
et 2012, compte tenu “d'une durée moyenne
des formations plus longue" (83 heures en
2010 contre 120 heures en 2012). En 2012, le
nombre d'heures de formation réalisées s'établissait
à 5,4 millions. Toujours pour la période
concernée, 200 organismes de formation ont
assuré les formations. Ils s'agit à 95 % d'organismes
privés. Au sujet des actions menées,
près de 70 % d'entre elles ne débouchaient
pas sur une certification dans la mesure où
elles étaient avant tout professionnalisantes
par rapport à des postes de travail.

Parmi les divers champs concernés par ces
actions en 2012, les principaux étaient : la
sécurité des biens et des personnes (police,
etc.) soit 19,6 % des actions (7 701 stagiaires),
et la santé avec 6,5 % des actions (1 959 stagiaires).
Enfin, les financements des produits
réalisés au titre de la formation professionnelle
continue (FPC) oscillaient entre 45 à 50 millions
d'euros. “Entre 2010 et 2012, 50 % des
fonds provenaient des pouvoirs publics (Région,
Fonds social européen, et État), et 14,7 % des
entreprises, notamment."