La mise en oeuvre du compte personnel de formation, dossier complexe...

Par - Le 01 mai 2014.

Le compte personnel de
formation sera bien lancé
le 1er janvier 2015 comme
prévu, assure la DGEFP.
Mais la mue du Dif s'avère
compliquée. Parallèlement,
les nouvelles instances,
qui vont accompagner
de la manière la plus
directe les transformations
en cours, se mettent en
place. À commencer par
le “Copanef", Comité
paritaire interprofessionnel
national pour l'emploi et la
formation.

C'était lors d'un colloque organisé
par Opcalia, le 11 avril
dernier. La déléguée générale à
l'emploi et à la formation professionnelle
(DGEFP), Emmanuelle
Wargon, aurait laissé entendre que le
compte personnel de formation pourrait
ne pas être comme prévu effectif au
1er janvier 2015...

“Un projet lourd et ambitieux"

Interrogée par L'Inffo, elle récuse
cette interprétation, et précise : “Le
compte personnel de formation est un
projet lourd et ambitieux, fondé sur
un système d'information piloté par la
DGEFP en partenariat avec la Caisse
des dépôts et consignations. Nous mettons
tout en oeuvre pour que l'ouverture
des comptes soit effective au 1er janvier
2015 et que le versement des droits se
fasse dès 2015. Mais ce projet complexe
est à l'intersection d'un système d'information
et des questions d'organisation
des acteurs. Nous sommes outillés pour
atteindre l'objectif, même s'il reste toujours
une marge d'incertitude dans ce
type de projet."

Et d'ajouter : “La capacité de la Caisse
des dépôts à résoudre les questions techniques
n'est pas un facteur d'inquiétude
pour moi. En revanche, nous nous
posons beaucoup de questions relatives à
l'accès au compte, ou sur son fonctionnement
que nous devons trancher. Ce type
de questionnement est classique pour
tout projet complexe, et à ce stade nous
sommes dans les temps pour être prêts au
1er janvier 2015."

Pour “presser le pas"

Pour sa part, Christian Janin, secrétaire
confédéral de la CFDT, ne perçoit aucune
annonce quant à un hypothétique
retard de la mise en oeuvre du CPF,
mais juste “une adresse aux partenaires
sociaux à presser le pas pour que, justement,
ce nouveau droit devienne effectif
comme prévu". Alors que la CFE-CGC
affirme, par la voix de sa déléguée nationale
emploi-formation Dominique
Jeuffrault, que son syndicat “avance
avec l'Igas sur la détermination de ces
listes avec en tête l'échéance du 1er janvier
2015". Tout en reconnaissant les
problèmes techniques pour assurer leur
mission dans les temps impartis rencontrés
par la [Direction des retraites et
des solidarités->www.cdc.retraites.fr], qui est le département
de la Caisse des dépôts et consignations
(CDC) actuellement en charge de créer
ces comptes personnels de formation.
“C'est une vraie révolution que de mettre
en place un tel service dématérialisé
d'information dédié, équivalent à l'instauration
du permis à points", justifie
Dominique Jeuffrault.

“Le CPF ne doit pas devenir une
arlésienne"


En revanche, la CGT, elle, appelle
les pouvoirs publics à se donner les
moyens d'aboutir dans les temps. Pour
Paul Desaigues, conseiller confédéral,
la complexité technique ne saurait être
une excuse à l'éventuel retard de la mise
en oeuvre du CPF, en dépit de la charge
de travail que ce chantier représente
pour la Caisse des dépôts.

Quant à l'élaboration des listes – là
encore, chantier considérable – il ne
juge pas l'exercice ardu au point de
justifier un report ultérieur à la date
prévue. “Entre les titres, diplômes et
CQP enregistrés au RNCP, d'un côté, et
le plan de formation régional à destination
des demandeurs d'emploi, de l'autre,
les éléments majeurs et fondateurs sont
déjà là. Et si jamais ces listes n'étaient
pas achevées à temps, ce ne serait pas
grave : on aurait une période pendant
laquelle le CPF ne serait éligible qu'à ce
qui existe, or, il y a une telle masse qu'on
peut commencer." Et de regretter que le
compte personnel puisse devenir “une
arlésienne pour les demandeurs d'emploi
et les salariés".

Béatrice Delamer et Benjamin d'Alguerre

LE NOUVEAU “COPANEF", COMITE PARITAIRE POUR LA FORMATION

Le Comité paritaire national de la formation
professionnelle (CPNFP) est mort, vive le
Comité paritaire interprofessionnel national
pour l'emploi et la formation, ou Copanef − en
lieu et place du “Copinef" initialement prévu.
Les organisations syndicales et patronales
l'ont annoncé, il sera effectivement installé le
19 mai.

L'accord national interprofessionnel du
14 décembre 2013 et la loi du 5 mars 2014
sur la réforme de la formation professionnelle
prévoyaient la mise en place d'un nouveau
comité paritaire conçu comme une “instance
de gouvernance politique paritaire nationale
et interprofessionnelle en matière de formation
professionnelle et d'emploi" et effective
rapidement. D'où la volonté des partenaires
sociaux de prendre les choses en main au plus
vite et de “jouer pleinement leur rôle dans la
mise en oeuvre de la réforme".
L'Ani avait donc envisagé la création d'un
“Comité paritaire national pour la formation
professionnelle et l'emploi", “CPNFPE" (L'Inffo
n° 847, p. 5), projet qui avait ensuite évolué en
“Comité paritaire interprofessionnel national
pour l'emploi et la formation". Avec l'acronyme
Copinef, rapidement moqué. “Copinef,
copinage… c'était un peu malheureux", reconnaissait
Christian Janin, secrétaire confédéral
CFDT. Une voyelle a donc opportunément
été changée.

Au programme

Le nouveau Copanef se réunira au moins une
fois tous les deux mois afin d'assurer les
missions confiées par la loi. Au programme,
donc, définition et coordination des orientations
politiques paritaires, définition des
politiques mises en oeuvre par le FPSPP, et
suivi de la mise en oeuvre du compte personnel
de formation. Toutefois, la priorité est
donnée à l'élaboration des listes de formations
éligibles au compte personnel de formation
(CPF), à la mise en place des comités
paritaires interprofessionnels régionaux
pour l'emploi et la formation (Coparef), à la
préparation des décrets d'application de la
réforme et à la réflexion sur les missions et
le fonctionnement des instances paritaires
nationales, telles que le FPSPP.
Ces Coparef doivent être mis en place
le 15 juin au plus tard, selon les mêmes
modalités que le Copanef. Ils auront pour
mission, notamment, l'animation et la coordination
en région des politiques paritaires
du Copanef, la coresponsabilité de l'élaboration
des listes éligibles et la transmission
d'un avis motivé sur la carte des formations
au Conseil régional.

Gouvernance

À l'instar de son prédécesseur le Comité paritaire
national de la formation professionnelle,
le Copanef est composé de deux représentants
de chacune des organisations syndicales
de salariés et d'un nombre égal de représentants
des organisations d'employeurs. La présidence
et la vice-présidence sont assurées en
alternance tous les deux ans par chacun des
deux collèges, et ce sont les organisations
syndicales qui assureront la première présidence,
jusqu'au 31 décembre 2015. À la différence
de l'instance précédente, le secrétariat
ne sera plus assuré par le Medef, mais par le
Fonds paritaire de sécurisation des parcours
professionnels (FPSPP).

La CGT exclue du bureau

En revanche, si les cinq organisations syndicales
représentatives siégeront bien autour
de la table, les quatre signataires de l'Ani du
14 décembre 2013 – CFDT, CFTC, CFE-CGC
et FO – se sont accordées, au cours de réunions
préparatoires à la tenue de la dernière
session du CPNFP, sur l'exclusion de la CGT
(non signataire) du bureau de la nouvelle
structure. “Nous sommes unanimes pour
considérer qu'une formation syndicale qui
s'est opposée à l'Ani ne peut être en mesure
de porter l'instance qui le mettra en oeuvre",
expliquait Christian Janin, le secrétaire
confédéral CFDT.

Réponse de Paul Desaigues, conseiller formation
CGT : “Nous ne nous sommes pas opposés
à l'Ani, nous ne l'avons pas signé, c'est
très différent." La nuance ? “Les Ani sont dans
une logique du tout ou rien, on ne peut pas
être d'accord à 70 ou 80 %. Nous ne l'avons
pas signé mais on ne peut pas dire que nous
nous sommes opposés, puisqu'il contient
énormément de choses que nous avons demandées."
Au-delà, “nous avions l'habitude
de fonctionner dans le cadre de réunions interconfédérales,
là, il y a une pierre dans le jardin
syndical, avec l'abandon de cette réflexion
collégiale", estime-t-il. Selon lui, c'est le fait
que l'emploi rejoigne la formation qui “nuit
complètement à cette habitude et débouche
sur la construction d'antagonismes". Même
si des Copire (commissions paritaires interprofessionnelles
régionales de l'emploi), mais
aussi des Fongecif, fonctionnent déjà comme
cela.

B. d'A., Célia Coste et Nicolas Deguerry