La loi du 5 mars expose-t-elle les entreprises à un “risque juridique" ?

Par - Le 01 juillet 2014.

Un “changement de paradigme".
Au sujet de la nouvelle
réforme, l'expression a été utilisée
dès la négociation de l'accord
interprofessionnel. Mais à
présent, la loi du 5 mars 2014, qui
entre progressivement en vigueur
avec ses decrets d'application,
change-t-elle la nature du risque
pour les employeurs ? C'est l'opinion
défendue par l'association
de DRH Entreprise & personnel,
qui parle d'un “risque juridique et
social".

“Le principe
civiliste de
la bonne foi
contractuelle"...


Un document de travail de
l'association, présenté à la
presse le 11 juin dernier, précise
que trois principes juridiques
fondent la nature et l'amplitude
de la responsabilité formative
de l'entreprise. À savoir, d'une
part, “le principe civiliste de la
bonne foi contractuelle" : la loi
mettant à sa charge une obligation
d'adaptation à l'emploi et
de maintenir l'employabilité de
ses salariés, comme l'a rappelé
encore récemment la Cour de
cassation (voir ci-contre).

Un “droit opposable à
la qualification" ?


Second principe, la loi reconnaît
le droit des salariés à la qualification,
à laquelle doit contribuer
la politique de formation de l'entreprise.
Reste à savoir jusqu'où.
“Nos adhérents [ 1 ]150 grandes entreprises cotisent à
Entreprise & personnel.
nous disent
qu'il n'y aura pas de baisse des
budgets formation, largement
financés sur fonds propres. La
question qu'ils se posent est
plutôt : « La réforme crée-t-elle
un droit opposable à la qualification
? » Si c'est le cas, il faut
revisiter l'offre de formation. Nos
juristes disent que nous nous rapprochons
d'un droit opposable à
la qualification, mais que ce dernier
n'est pas encore effectif", a
fait valoir Sophie Pagès, consultante
à Entreprise & personnel.
Anticiper le risque
d'“inemployabilité"...
Troisième principe, selon
l'association,“la loi précise et
renforce des procédures de négociation
collective et de dialogue
social, dans le but de garantir
les droits individuels des salariés
à la formation". Par voie de
conséquence, “l'effectivité de
l'obligation d'adaptation au
poste de travail et de gestion
de l'employabilité sera assurée
par des mesures procédurales,
organisationnelles et financières
permettant d'anticiper le risque
d'inemployabilité".

… au service de la
“compétitivité"


Directeur d'étude à Entreprise &
personnel, Bernard Masingue a
noté que le précédent système,
issu de la loi de 1971, se caractérisait
par “un tropisme du monde
de la formation professionnelle
consistant à privilégier la tuyauterie
administrative et financière".
À rebours du nouveau modèle,
selon lui. “La nouvelle loi consacre
l'apport de la formation
à la compétitivité des
entreprises et des
salariés. Une employabilité
conçue comme
un instrument de compétitivité
dans les bassins d'emploi,
les entreprises, et au niveau des
salariés", a-t-il relevé.
Précédemment
négligé, le dyptique employabilité-
compétitivité deviendrait donc
la clé. Au risque néanmoins que
“certaines entreprises considèrent
la formation comme étant du seul
ressort de l'individu, sur le thème
« ce n'est pas notre affaire ». Or
l'enjeu prioritaire réside bien dans
une politique de co-développement
entre l'entreprise et le salarié",
a défendu Bernard Masingue.

Notes   [ + ]

1. 150 grandes entreprises cotisent à
Entreprise & personnel.