L'Assemblée nationale autorise la suppression de la 24 83

Par - Le 01 septembre 2014.

La déclaration fiscale 24 83 était comme le symbole de l'ancien système français
de formation, lié au principe “former ou payer". La loi du 5 mars 2014 lui avait retiré
sa raison d'être, à présent le projet de loi relatif à la simplification de la vie des
entreprises en prend acte et signe la fin de l'emblématique Cerfa. Un projet de loi qui
comporte d'autres dispositions relatives à la formation : sur le réseau des établissements
d'enseignement supérieur gérés par les CCI, et sur la prime à l'apprentissage.

De la formule à l'action. Plus
d'un an après l'intervention
télévisée du chef de l'État,
qui annonçait sa volonté de
réaliser un “choc de simplification",
voilà le projet de loi d'allègement
administratif pour les entreprises
présenté devant les parlementaires. Ce
dernier a été soumis le 22 juillet, dans le
cadre d'une “procédure accélérée", aux
députés présents dans l'hémicycle par
Arnaud Montebourg, alors ministre de
l'Économie, et Thierry Mandon, secrétaire
d'État à la Réforme de l'État et à
la Simplification (lequel a conservé ces
mêmes fonctions lors du remaniement
du 26 août). Sophie Errante, députée PS
de la Loire-Atlantique, en a été nommée
rapporteure. Après les 50 propositions
du Conseil de la simplification, rendues
publiques en avril 2014, 15 mesures
ont été retenues pour faciliter la vie des
entreprises, tant pour leurs déclarations
que dans leurs démarches. Concernant
la formation professionnelle, l'article 15
du projet de loi relatif à la simplification
de la vie des entreprises confirme la prochaine
disparition de la “24 83".

“Simplification des
obligations déclaratives"


Cette déclaration fiscale attestant de la
participation au développement de la
formation professionnelle des entreprises
permet de vérifier ce qu'elles
ont versé à leur Opca et qu'elles ont
effectué des dépenses à hauteur de leur
obligation légale, selon les règles antérieures
à la réforme. Certes, la loi du
5 mars 2014 induisait déjà de facto la
disparition de ce formulaire Cerfa, mais
le texte adopté au Palais-Bourbon l'enterre
définitivement.

“Le gouvernement est autorisé à prendre
par ordonnance toute mesure relevant du
domaine de la loi afin de tirer les conséquences,
en matière de simplification des
obligations déclaratives des entreprises, de
la suppression de la déclaration relative à
la participation au développement de la
formation professionnelle continue pour
les employeurs d'au moins dix salariés",
énonce l'exposé des motifs du projet de
loi.

140 000 entreprises concernées

Au total, cette mesure de réduction des
charges administratives devrait concerner
les 140 000 entreprises de plus
de dix salariés jusqu'alors astreintes à
consacrer 1,6 % de leur masse salariale
à la formation, dont le fameux “0,9 %"
du plan de formation supprimé par la
réforme. Un véritable acte de foi dans
la responsabilisation des entreprises,
qui se voient conférer une obligation
de faire, se substituant à l'obligation de
financer. Pari qui s'inscrit d'ailleurs fidèlement
dans la philosophie du pacte
de responsabilité. La suppression de la
24 83 sera effective au 1er janvier 2016.
À l'Assemblée, lors des discussions parlementaires,
l'article 15 n'a pas suscité
de débat chez les députés.

Création par les CCI
d'entités autonomes


Le statut du réseau des établissements
d'enseignement supérieur (EES) gérés
par les Chambres de commerce et d'industrie
va aussi se voir impacté par le
projet de loi relatif à la simplification de
la vie des entreprises. En effet, par son
article 28, le texte permet désormais
aux CCI la création d'entités de droit
privé dédiées à la gestion de ces établis
sements : les établissements d'enseignement
supérieur consulaire (EESC).
Des mesures présentées par l'exposé
des motifs du projet de loi comme de
nature à garantir l'autonomie de ces
écoles – dont l'enseignement s'effectue
souvent par voie d'alternance – et à
leur offrir une souplesse de gestion, leur
permettant notamment de signer des
accords avec des établissements étrangers
; mais aussi de contracter avec des
entreprises ou des mécènes.

Mutation du statut des écoles

Parmi les établissements gérés par les
CCI, seront également éligibles à ce
nouveau régime les écoles à statut associatif
que compte le réseau consulaire.
“Non seulement un tel statut n'est pas toujours
bien adapté à la gestion d'écoles, parfois
de très grande taille, mais au surplus,
il implique une aliénation, par les CCI,
d'actifs sans contreparties véritables, ce qui
soulève des difficultés juridiques et conduit
généralement les Chambres à conserver
l'essentiel des actifs en cause, limitant ainsi
sérieusement l'autonomie recherchée", précisent
les auteurs du texte parlementaire.
A contrario, grâce à ce statut d'EESC, les
écoles ne seront plus considérées comme
des associations, mais bien comme des
sociétés anonymes susceptibles de posséder
des biens immobiliers.

Actionnariat consulaire

Toutefois, le législateur, dans sa rédaction,
a tenu à veiller à garantir l'actionnariat
consulaire de ces établissements,
puisque seuls 33 % des droits de vote
aux assemblées générales des EESC
pourront être détenus par des extérieurs
aux Chambres de commerce et
d'industrie, parmi lesquels pourront
figurer des collectivités territoriales ou
leurs groupements dans le but de faciliter
les partenariats locaux.

Un nouveau statut qui se traduit également
par le passage au régime d'école
technique privée dont les titres et
diplômes sont reconnus par l'État.
D'ailleurs, il appartiendra à une future
convention conclue entre les Chambres
et les établissements de définir les activités
de formation relevant soit de
l'EESC lui-même, soit des CCI. Cette
convention – dont le contenu a vocation
à être fixé par décret du Conseil
d'État – fixera par ailleurs les modalités
de participation de l'école aux activités
de formation qui demeurent sous la
responsabilité des Chambres. Quant
au volet fiscal de ce nouveau statut, il
relèvera du domaine de la prochaine loi
de finances.

Prime à l'apprentissage
pour les entreprises de moins
de 50 salariés


Les députés ont également dû se prononcer
sur un volet apprentissage.
Lequel prévoit qu'à partir du 1er juillet
2014 – rétroactivement, donc, d'autant
que le projet de loi n'est pas définitivement
adopté –, la conclusion d'un
contrat d'apprentissage dans une entreprise
de moins de 50 salariés ouvrira
droit à une aide d'au moins 1 000 euros
versée par la Région.
_ç Elle est soumise à deux conditions : que
l'entreprise justifie ne pas avoir employé
d'apprentis depuis le 1er juillet de l'année
précédente dans l'établissement du
lieu de travail de l'apprenti et qu'elle soit
couverte par un accord de branche étendu
“comportant des engagements en faveur
de l'alternance".

Un coût évalué à 50 millions
d'euros en 2015


Une mesure qui fait écho au plan de
relance de l'apprentissage présenté à la
conférence sociale des 7 et 8 juillet. [ 1 ]L'Inffo n° 860, p. 2.. Le
Premier ministre, Manuel Valls, avait
annoncé à cette occasion l'affectation de
200 millions d'euros supplémentaires à
l'apprentissage, notamment la mise en
place de primes pour les entreprises d'un
montant de 1 000 euros par apprenti
“dans les secteurs professionnels où un accord
de branche aura été conclu". Cette
aide au recrutement des apprentis est
consécutive à un amendement du gouvernement.
“Son coût est évalué à 50 millions
d'euros en 2015", a précisé Thierry
Mandon lors des débats à l'Assemblée.
Le gouvernement proposera d'ailleurs
dans le projet de budget 2015 des modalités
de compensation aux Régions. Par
ailleurs, le projet de loi autorise la transmission
à Pôle emploi de la liste nominative
des entreprises payant la contribution
supplémentaire à l'apprentissage
(CSA) [ 2 ]Les entreprises de plus de 250 salariés doivent
employer au minimum 4 % (5 % à partir de 2015 en
vertu de la loi de finances rectificative pour 2012)
d'alternants dans leurs effectifs, faute de quoi elles
doivent s'acquitter de la CSA proportionnelle à leur
éloignement par rapport à l'objectif.
, afin de permettre à Pôle emploi
de mieux les conseiller dans le recrutement
par la voie de l'alternance.

Des questions techniques

Favorable à cet amendement en faveur
de l'apprentissage, le député socialiste
(Indre-et-Loire) Jean-Patrick Gille a
néanmoins soulevé quatre questions
techniques. “Il existe déjà une prime
de 1 000 euros pour les entreprises qui
comptent moins de 11 salariés, et à ce
titre, est-ce que les deux primes se cumulent
? Ne pourrait-on pas appliquer
aussi cette prime aux collectivités locales,
puisque le président de la République a
souligné avec raison que l'apprentissage
devait être développé au sein des collectivités
locales ?", a-t-il déclaré. Et de
poursuivre : “Puisque nous avons dit
que la prime de 1 000 euros concerne
l'entreprise qui n'a signé aucun contrat
d'apprentissage, sera-t-elle multipliée par
le nombre de contrats conclus ? J'imagine
que oui. La prime étant d'au moins
1 000 euros, les Régions peuvent-elles la
moduler ?"

Une aide cantonnée au privé

Dans ses réponses, Thierry Mandon
a indiqué que pour les entreprises
de moins de onze salariés, l'aide de
1 000 euros serait cumulable avec les
aides existantes, mais qu'elle ne bénéficierait
pas aux collectivités territoriales
: “Cette aide concerne exclusivement
le secteur privé." Il a ajouté qu'une
réflexion portait actuellement sur l'aide
aux collectivités territoriales pour relancer
l'apprentissage [ 3 ]Voir notre dossier, p. 19.. D'autre part, at-
il précisé, “une entreprise qui aurait recours
pour la première fois à ce dispositif
et qui embaucherait deux, trois ou quatre
apprentis ne recevrait d'aide que pour
le premier". Enfin, Thierry Mandon a
pointé que les Régions avaient la possibilité
de moduler à la hausse cette
prime – si elles le souhaitaient.
Le projet de loi n'ayant pas encore été
examiné par le Sénat, le versement de la
prime sera bien entendu conditionné à
l'adoption du texte transmis le 23 juillet
au Sénat et examiné à la rentrée parlementaire
– en octobre [ 4 ]L'ouverture de la session parlementaire du
Sénat a été repoussée pour cause des élections
sénatoriales à la fin du mois de septembre.
.

Notes   [ + ]

1. L'Inffo n° 860, p. 2.
2. Les entreprises de plus de 250 salariés doivent
employer au minimum 4 % (5 % à partir de 2015 en
vertu de la loi de finances rectificative pour 2012)
d'alternants dans leurs effectifs, faute de quoi elles
doivent s'acquitter de la CSA proportionnelle à leur
éloignement par rapport à l'objectif.
3. Voir notre dossier, p. 19.
4. L'ouverture de la session parlementaire du
Sénat a été repoussée pour cause des élections
sénatoriales à la fin du mois de septembre.