Assises de l'apprentissage : la prime à l'embauche de 1 000 euros est confirmée
Par Knock Billy - Le 20 septembre 2014.
Une prime de 1 000 euros par apprenti aux entreprises de moins de 250 salariés, sans condition, jusqu'en juin 2015. C'est l'annonce majeure des Assises de l'apprentissage, qui ont réuni une cinquantaine de représentants syndicaux, patronaux, des Régions et des chambres consulaires (commerce et industrie, artisanat, agriculture) le 19 septembre dernier à Paris.
“Il y a à peu près 420 000 jeunes qui sont en parcours d'alternance ou d'apprentissage, c'est trop peu. D'ailleurs, la tendance en 2013 a été plutôt à la baisse, comme pour les contrats de professionnalisation", a déploré le président de la République, François Hollande. Pour changer la donne, il a confirmé l'objectif de 500 000 apprentis d'ici 2017. Comment y parvenir ?
Une prime “sans condition, pour cette rentrée"
François Hollande veut que l'État et les collectivités publiques donnent l'exemple, “en accueillant des apprentis en plus grand nombre qu'aujourd'hui. Il faut savoir que l'État forme 700 apprentis aujourd'hui. 700 ! L'objectif serait que d'ici deux ans, l'État puisse accueillir 10 000 apprentis".
Le deuxième levier est financier. La nouvelle prime de 1 000 euros pour les entreprises de moins de 50 salariés qui embauchent un premier apprenti, votée en juillet par le Parlement, s'appliquera finalement “à tout apprenti supplémentaire", concernera les entreprises jusqu'à 250 salariés. Pour les moins de 11 salariés, elle s'ajoutera à celle de 1 000 euros qui leur était accordée par les Régions. Cette prime sera accordée “sans condition, pour cette rentrée", a annoncé le président de la République. Cependant, elle ne sera prolongée à la rentrée 2015 que pour les entreprises des secteurs “ayant signé un accord de branche" d'ici juin prochain.
Mobilisation de l'Éducation nationale...
François Hollande veut affecter 150 millions d'euros aux centres de formation d'apprentis. Soit un effort de 80 millions d'euros consacré à l'hébergement des jeunes. Pour le chef de l'État, l'implication de l'Éducation nationale est indispensable pour la réussite de sa politique de promotion de l'apprentissage.
Il entend porter le nombre de jeunes en apprentissage dans les établissements publics d'enseignement de 40 000 à 60 000, “afin de compléter l'offre des centres de formation d'apprentis, les lycées professionnels, qui sont des établissements de grande qualité, devront avoir les soutiens indispensables et être sur les bonnes filières de formation".
Symbole de cette implication, selon le chef de l'État, une instruction adressée le 14 septembre par la ministre de l'Éducation nationale Najat Vallaud-Belkacem aux recteurs d'académie les invite à élaborer des “plans de développement de l'apprentissage" destinés à augmenter de 50 %, d'ici à 2017, le nombre d'apprentis formés dans les établissements publics.
... des entreprises...
Pour mobiliser les entreprises dans cette politique, François Hollande demande la mise en place d'une cartographie “pour que tous les gisements d'apprentissage puissent être exploités". Elles devront être disponibles pour les branches professionnelles pour jouer leur rôle. “Il y a un lien à établir entre le pacte de responsabilité et les négociations qui doivent avoir lieu. Les négociations de branche doivent tenir compte de la nécessité de proposer des emplois aux jeunes. L'apprentissage fait partie des engagements que les entreprises doivent souscrire dans le cadre du pacte de responsabilité", a-t-il rappelé.
... et des Régions
Les Régions étant au cœur du dispositif d'apprentissage, comment ne pas les inclure dans les plans d'amélioration du système d'apprentissage ? Le chef de l'État a demandé une évaluation des emplois, des besoins et des métiers : “La mobilité se prépare aujourd'hui par la formation. C'est donc dans les régions que nous devons réaliser des formations pour que cela puisse déboucher sur les emplois qui sont proposés dans les territoires."
Pour François Hollande, “ce qui compte, c'est moins le chiffre lui-même que la qualité de la formation, de l'accompagnement permettant d'accéder à un emploi et à un véritable métier".
Une anaphore pour l'apprentissage
Le président a estimé que relancer l'apprentissage, c'est relancer l'emploi. “Relancer l'apprentissage, c'est réaffirmer la priorité à la jeunesse. Relancer l'apprentissage, c'est permettre l'élévation du niveau de qualification. Relancer l'apprentissage, c'est aussi relancer l'Éducation nationale. Relancer l'apprentissage, c'est revaloriser le travail, le travail qui est une grande valeur républicaine à condition qu'il soit offert à tous", a-t-il conclu.
“Annonces encourageantes"
La satisfaction était presque générale chez les partenaires sociaux au sortir de l'Hôtel de Marigny où se tenaient les Assises de l'apprentissage. “Ces annonces prouvent que la chute du nombre de contrats d'apprentissage constatée en 2013 représente une préoccupation pour les pouvoirs publics et qu'ils entendent y remédier", notait Jean-Michel Pottier, président de la commission éducation-formation de la CGPME. Pour autant, “l'an prochain, ces primes seront conditionnées à la conclusion d'accords de branche. Qu'adviendra-t-il des petites entreprises rattachées à des branches qui n'auront pas conclu d'accords ou qui n'adhèrent à aucune fédération professionnelle ? Il existe un risque important de voir ces PME et TPE passer complètement à côté de ces primes."
Dans l'économie sociale et solidaire
Dans un secteur aussi peu employeur d'apprentis que celui de l'économie sociale et solidaire (celui des employeurs associatifs, non assujettis à la taxe d'apprentissage et plutôt concernés par les dispositifs de contrats aidés à l'image des emplois d'avenir). “80 % des entreprises du secteur restent des structures de moins de dix salariés ; ces primes peuvent les encourager à s'engager sur l'apprentissage", observait Alain Cordesse, président de l'Udes.
Orientation et filières d'avenir
C'est avec une belle unanimité – tant du côté patronal que chez les syndicats de salariés – qu'ont été accueillies les annonces concernant les mesures de renforcement du suivi des jeunes par les centres de formation, en vue de prévenir les ruptures de contrat, ainsi que l'implication accrue des acteurs de l'orientation dans l'information des futurs apprentis sur les filières qui recrutent. “On compte 20 à 25 % de décrocheurs en cours de contrat. Il suffirait de ramener ces chiffres à zéro pour quasiment atteindre l'objectif de 500 000 apprentis en 2017", calculait Jean-Pierre Therry, secrétaire confédéral de la CFTC en charge du dossier de la formation.
“Donner un statut à l'apprenti, renforcer son accompagnement, lui permettre de se loger ou de se déplacer plus facilement... tout cela va dans le bon sens pour développer l'apprentissage", soulignait pour sa part son confrère de la CFDT, Yvan Ricordeau, dont la confédération défendait, lors de ces assises, l'implication accrue des services publics régionaux de l'orientation (SPRO) et des Missions locales dans l'information et l'accompagnement des jeunes vers l'apprentissage.
“Développeurs de l'apprentissage"
À condition, toutefois, que cette orientation ne s'achève pas dans une voie sans issue et que les filières choisies soient de nature à déboucher sur l'emploi. “Nous avons rappelé au président que, pour nous, la formation professionnelle doit répondre aux objectifs d'émancipation des hommes et des femmes dans un monde de plus en plus complexe et aux besoins des entreprises. Encore faut-il que celles-ci puissent nous dire quels sont les métiers de demain", avertissait Thierry Lepaon, le secrétaire général de la CGT.
Une identification des secteurs porteurs d'emploi et des priorités de branche que l'Unsa se propose de faciliter par la création de “développeurs de l'apprentissage" − comme il en existe déjà au sein des Chambres de commerce et d'industrie – chargés de faire se rencontrer apprentis et entreprises en fonction des besoins des territoires.
Coopération Travail-Éducation
La présence à ces assises de la ministre de l'Éducation nationale et de plusieurs représentants du monde enseignant (FSU, Conférence des présidents d'Université) a été également jugée encourageante. “Le Travail et l'Éducation qui acceptent de s'asseoir à la même table pour parler ensemble d'apprentissage, il était temps !", soufflait un syndicaliste. Changement de paradigme ? En tous cas, même du côté patronal, on salue la performance : “L'Éducation, c'est le début de la chaîne d'orientation et d'entrée des jeunes dans la vie active", expliquait Patrick Liébus. Alors que, de son côté, la CFTC n'hésite pas à évoquer la création d'une “prime à la rentrée des apprentis", calquée sur celle qui existe déjà dans le système scolaire.