Des leviers de financement adaptés au secteur de la formation émergent

La formation est devenue un marché comme un autre. Ou presque. Devenu plus concurrentiel depuis la désintermédiation du CPF et la libéralisation de l'apprentissage, le secteur est entré dans une période de fortes mutations intensifiées par les enjeux de transformation digitale. Des mouvements de fond qui poussent les prestataires de formation à trouver des leviers financiers pour diversifier leurs activités, moderniser leur offre et faire la différence sur un marché qui attire de nouveaux entrants.

La finance à impact s'intéresse à la formation

A la faveur des plans de soutien au développement des compétences et à la relance, l'éventail des solutions de financement s'élargit avec, par exemple, des appels à projets tels que Deffinum ou Compétences et métiers d'avenir. Dans le même temps, le secteur de la finance, en pleine mutation lui aussi, développe des logiques d'investissement à impact qui font écho aux préoccupations des acteurs de la formation. Dans ce modèle, il s'agit en effet d'investir dans des organisations affichant des performances financières mais aussi des résultats positifs concrets sur le plan social ou environnemental.

Des performances sur le plan social et territorial

Sur le terrain, de nouvelles solutions émergent comme celles proposées par la Banque des territoires. En plus de ces interventions dans le cadre des programmes d'investissement d'avenir (PIA), cette entité de la Caisse des dépôts a développé, depuis la réforme, des offres de financement destinées aux prestataires de formation répondant à des critères bien spécifiques. « En tant qu'investisseur à impact, nous finançons des acteurs de la formation qui accompagnent des personnes fragiles ou éloignées de l'emploi, qui répondent aux besoins en compétences des secteurs en tension ou qui développent des offres dans les zones rurales, les QPV et les territoires d'industrie », explique Benoît Sénéchal, responsable du pôle formation de la Banque des territoires.

Des solutions pour les sociétés et les associations

L'institution financière s'adresse aux organismes de formation, CFA ou acteurs de l'Edtech en phase de développement. Différents instruments financiers leur sont proposés en fonction de leur structure juridique : apports en capital et obligations convertibles pour les acteurs organisés en société et d'autres formules (prêts subordonnés à intérêt participatif, titres associatifs ou emprunts obligataires, etc.) pour les associations qui sont nombreuses dans le secteur de la formation.

Fédérer les investisseurs autour de projets vertueux

La Banque des territoires intervient sur des opérations dont le montant peut aller de 200 000 à plus d'un million d'euros, en partenariat avec d'autres investisseurs à impact comme France Active. « Quand nous entrons au capital d'une entreprise nous n'avons pas vocation à y rester au-delà d'un horizon de 7 à 10 ans. Notre objectif en tant que tiers de confiance est de créer un effet d'entraînement auprès d'autres investisseurs », explique Benoît Sénéchal. Ces alliances ont déjà permis de financer « une trentaine de structures pour un montant cumulé de 10 millions d'euros », précise-t-il.

Des candidats aux profils variés

Des acteurs aux profils très différents ont déjà bénéficié des solutions de financement de la Caisse des dépôts et de ses partenaires. Les Écoles de production qui préparent des jeunes aux métiers de l'industrie en tension et l'association Social Builder qui agit par la formation en faveur de l'égalité homme-femmes dans le secteur du numérique en font partie. Parmi les structures soutenues figurent aussi des acteurs plus spécialisés tels que Frello, qui développe une application pour l'enseignement du français langue étrangère ou encore les Cuistots migrateurs qui forment des réfugiés aux métiers de la restauration.

Conjuguer performances économiques et extra-financières

Dans le domaine de la finance à impact, chaque investisseur aura des critères de sélection particuliers. « Certains se concentreront par exemple sur l'innovation technologie ou l'impact environnemental, d'autres comme c'est le cas à la Banque des territoires sur les publics et les territoires accompagnés, avec à la clé des attentes bien spécifiques en termes d'impact », illustre Roxanne Pauty, chargée d'investissements à la Banque des Territoires. Un des enjeux pour les candidats est de bien comprendre le champ d'intervention des financeurs et leurs grilles de sélection. Lors de l'examen des dossiers, la Banque des territoires passe en revue la situation financière du candidat pour voir si son modèle économique est soutenable, et procède à une analyse de son historique et de ses ambitions en termes d'impact. « L'objectif est de vérifier que la structure sera capable de générer, avec le changement d'échelle, de la croissance économique corrélée à une augmentation de son impact extra-financier par rapport aux priorités que nous avons définies », précise Adim Meziani, chargé d'investissement à la Banque des territoires.

Des outils de mesure d'impact

Avec l'essor de la finance à impact, les outils de mesure des performances extra-financières se développent. La Banque des territoires travaille par exemple avec Antropia, un incubateur de l'Essec, sur un référentiel de mesure d'impact spécifique au secteur de la formation, un outil qui sera utile aux prestataires pour évaluer leur impact et justifier de la pertinence de leur projet face à un potentiel partenaire financier. Sur un marché désormais libéralisé, formation ne rime pas systématiquement avec impact. Seuls les modèles le plus vertueux se verront ouvrir les portes de ces investisseurs nouvelle génération.

La Banque des territoires animera un atelier sur le financement à impact dans le cadre de la 18^ème Université d'hiver de la formation professionnelle qui se déroulera à Cannes du 25 au 27 janvier.