« Détours créatifs vers l'emploi », programme de remobilisation efficace
Une restitution du dispositif de remobilisation « Détours créatifs vers l'emploi », était organisée le 30 juin par la fédération nationale des UROF (Union régionale des organismes de formation). Ses points forts sont la réalisation d'un projet collectif, la valorisation des « soft skills » par l'attribution « d'open badges », et le partenariat avec des agences d'intérim.
Par Mariette Kammerer - Le 04 juillet 2023.
« J'ai repris confiance en moi et j'ai vu les autres participants s'ouvrir, se transformer », « j'ai pu reprendre contact avec le monde extérieur », « améliorer mon expression orale », « faire un stage dans un musée », témoignent des bénéficiaires de « Détours créatifs vers l'emploi », réunis vendredi 30 juin à Paris pour une matinée de bilan. En trois ans d'expérimentation, ce dispositif destiné aux publics les plus éloignés de l'emploi, financé dans le cadre du PIC (Plan d'investissement dans les compétences) 100% inclusion et conçu par la Fédération des Urof, a été déployé dans neuf territoires par dix organismes de formation, auprès de 564 bénéficiaires. Son objectif était « d'inventer de nouvelles méthodes d'accompagnement » en laissant une grande liberté aux accompagnants.
Recrutement d'un médiateur
Les organismes ont dû d'abord repérer ces publics « invisibles ». Certains ont recruté un médiateur, démarché des relais locaux (épicerie solidaire, clubs sportifs), ou participé à des animations de quartier. Ils ont réussi à toucher un public de jeunes, d'exilés, de personnes en situation de handicap, ou exclues en raison d'accidents de la vie. 42% n'avaient aucune qualification.
En début de parcours il est « indispensable de bien expliquer le dispositif - qui dure 15 mois non rémunérés - pour s'assurer que la personne y trouve son compte. De fait nous n'avons eu presque aucun abandon », indique Florence Dupont, coordinatrice IFRA. L'accompagnement global se partage entre suivi individuel (freins sociaux, santé, projet professionnel) et ateliers collectifs : création, sorties, conférences, rencontres avec des professionnels, etc. « C'est une pédagogie horizontale, les bénéficiaires peuvent aussi animer des ateliers en fonction de leurs compétences », ajoute Florence Dupont.
Projet collectif et compétences transverses
Le fil rouge de l'accompagnement est la réalisation d'un projet collectif - culturel, environnemental, sportif - pour mobiliser et développer des compétences. Une remise de prix valorise les créations : une vidéo contre le harcèlement scolaire ; un diaporama photos et chansons sur les migrations ; un court-métrage humoristique sur le développement durable ; etc.
Les compétences transverses - « soft skills » - sont travaillées à partir du référentiel RECTEC, expliqué en ateliers. Il comprend 4 pôles : s'organiser (organiser son activité, suivre les règlements, travailler en équipe), communiquer, réfléchir, et agir (gérer des informations, agir face aux imprévus, développer ses savoirs). « Les bénéficiaires acquièrent ces savoir-faire tout au long du parcours, remplissent un livret, puis on leur demande de verbaliser les situations où ils ont mobilisé ces compétences », explique Stéphanie Lachery, formatrice AFP2i. Chaque compétence acquise est valorisée par un open badge.
Partenariat avec des entreprises d'intérim
Pendant leur parcours les stagiaires réalisent des missions rémunérées en entreprise - pour connaître les exigences d'un travail alimentaire -, et des stages de découverte pour nourrir un projet de qualification à plus long terme. Les accompagnants continuent à les suivre pendant les périodes d'emploi ou de formation pour éviter les ruptures.
Accompagnement sur les soft skills
Le partenariat avec les agences d'intérim d'insertion avait deux objectifs : « proposer des missions à nos bénéficiaires et accompagner leurs intérimaires sur les soft skills », explique Stéphanie Lachery. « Certains de nos intérimaires n'étaient jamais appelés en mission car ils n'avaient pas le savoir-être attendu. Désormais la grille RECTEC nous permet d'évaluer leurs Soft skills. Nous avons conçu une carte des savoir-faire attendus pour chacun des métiers », explique Anne Cleuet, ex-consultante pour Leader intérim. Un partenariat similaire a été passé avec une structure organisatrice de chantiers d'insertion (Essor 10).
En trois ans, Détours créatifs a conduit à 54% de sorties positives, dont 19% en formation et 34% en emploi. Plus de la moitié des bénéficiaires ont réalisé au moins une immersion en entreprise. La durée d'un parcours est de 9 mois en moyenne. Une mesure d'impact a été réalisée par le Cnam.