« La crise devrait être favorable au développement de la formation » (Christophe Catoir, Adecco)
Le groupe de travail temporaire Adecco a traversé la période de confinement en s'appuyant sur la formation et sa transformation digitale. « La crise devrait être favorable au développement de la formation », selon Christophe Catoir. Le président de la région France, Europe du Nord, Royaume-Uni et Irlande souligne toutefois l'exigence d'une réforme de l'orientation professionnelle et d'une approche pragmatique et territoriale.
Par Catherine Trocquemé - Le 17 juillet 2020.
Formidable catalyseur des transformations, la période de confinement laisse les entreprises sous le choc. Mais toutes ont bien conscience de la nécessité de s'interroger sur l'évolution de leurs métiers et de leur modèle économique alors que la révolution digitale s'accélère. Le sujet du développement des compétences est omniprésent dans la stratégie de relance. Considérée comme une arme pour la préservation de l'emploi et la conduite de nouvelles stratégies industrielles, la formation a trouvé sa place dans la reprise post-Covid-19. « La crise devrait être favorable à la formation », estime Christophe Catoir, président d'Adecco France, Europe du Nord, et, depuis peu, de l'Irlande et du Royaume-Uni. Très engagé dans la réforme, le spécialiste de l'intérim en a fait une de ses priorités pour ses collaborateurs dans la période de confinement. Au total, son investissement dans la formation augmentera fortement sur l'année 2020 pour atteindre 130 millions d'euros. C'est ainsi que 200 parcours de validation des acquis d'expérience (VAE) ont été engagés dont 70 par des intérimaires en CDI. En outre, 2 400 collaborateurs ont été formés, principalement sur la gestion agile, la prise de parole en public et les techniques commerciales dont 235 sur des modules à distance de son CFA interne. Dans le même temps, ce dernier, créé par Adecco en novembre 2019 sur les métiers du recrutement, est passé dans un format 100% digital. Pour consolider le modèle économique de son nouvel outil, le groupe a ouvert la session de septembre aux besoins en formation continue de ses clients et accueillera 60 apprentis. « Durant cette période de confinement, nous avons fortement déployé la formation en interne. Pour accompagner cette accélération, nous avons noué des partenariats avec des "pure players" de la formation à distance comme OpenClassrooms ou Coorpacademy. Nous avons aussi beaucoup appris sur la transformation digitale », confirme Christophe Catoir.
Une réforme de l'orientation
Incitées à faire de même par le dispositif du FNE (Fonds national emploi) formation mis en place par le gouvernement, les entreprises se sont montrées volontaires mais, à la sortie du confinement, peu auront concrétisé leurs projets. Un déploiement décevant que la complexité administrative souvent évoquée n'explique pas totalement. Selon Christophe Catoir, pour former, il est essentiel d'identifier les compétences à développer et les métiers émergents. Sur le marché de l'emploi, l'éternelle distorsion avec les besoins réels de l'économie persiste : « Il y a encore davantage d'écarts entre l'offre et la demande qu'avant la crise sanitaire. Nous avons besoin d'une réforme de l'orientation professionnelle et d'une approche territoriale. » La crise met en lumière une des faiblesses de notre système. Tout ce qui participe à cartographier et anticiper les compétences doit être renforcé au niveau des entreprises et des branches. On le pressent, le secteur de l'automobile en pleine transition écologique n'est pas confronté aux mêmes enjeux sur les compétences que celui de la restauration et de l'hôtellerie dont la baisse d'activité reste conjoncturelle. D'autres, comme l'aide à domicile, souffrent d'une pénurie structurelle de compétences. « Toute la difficulté va être d'articuler les plans de formation avec les stratégies industrielles. Les opérateurs de compétences auront un rôle à jouer au sein des grandes filières économiques mais sur les territoires les entreprises vont avoir besoin d'être accompagnées », assure Christophe Catoir. Il faudra rassembler autour d'une table les partenaires sociaux, des représentants de la Région, des institutionnels et des organismes de formation pour trouver des solutions locales autour de la question de la mobilité et de la formation. « Tous les acteurs ont conscience de la gravité de la crise économique et sociale. Il va falloir faire preuve de pragmatisme et de souplesse. » La rentrée sociale sera dense. Dans un contexte aussi stratégique pour Adecco, le groupe renforce son équipe dirigeante. Alexandre Viros, ex-SNCF, Fnac-Darty prendra la présidence de la France en septembre prochain et reportera à Christophe Catoir.