Loi de transformation de la fonction publique : les mesures concernant l'apprentissage
Plusieurs dispositions de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique publiée au JO du 7 août 2019 ont pour objet de faciliter le développement de l'apprentissage au sein des trois versants de la fonction publique.
Par Valérie Michelet - Le 20 août 2019.
Rapport sur les freins au développement de l'apprentissage dans la fonction publique
Dans un délai d'un an à compter du 7 août 2019, soit avant le 7 août 2020, le Gouvernement remettra au Parlement un rapport sur les freins au développement de l'apprentissage dans la fonction publique, en particulier au sein des administrations d'Etat, des collectivités territoriales et des établissements publics (amendement CL766 Assemblée nationale).
Ce rapport identifiera les mesures envisageables pour lever ces freins et favoriser l'embauche d'apprentis au sein de la fonction publique.
Loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, article 65
Contribution financière du CNFPT au développement de l'apprentissage dans la fonction publique territoriale
Il a été acté en commission mixte paritaire que le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) verse aux centres de formation d'apprentis une contribution fixée à 50 % des frais de formation des apprentis employés par les communes, des départements, des régions ou des établissements publics en relevant. Cette obligation de financement s'applique aux contrats d'apprentissage conclus après le 1er janvier 2020.
Non prévue initialement dans le projet de loi, cette participation du CNFPT a connu de nombreuses évolutions.
Un amendement du Gouvernement, adopté par l'Assemblée nationale en séance publique avec l'avis favorable de la rapporteure, a tout d'abord instauré la prise en charge des coûts de formation des apprentis via une convention conclue entre le CNFPT, l'autorité territoriale et le Centre de formation d'apprentis (CFA) pour un montant qui ne pouvait être inférieur à 75% de ces coûts de formation (Amendement 1141) Un autre amendement supprimait dans la foulée ce plancher proposant un taux fixe abaissé à 30 %, le taux de 75 % étant jugé excessif eu égard au budget du CNFPT et à l'absence de nouvelle ressource envisagée (Amendement 1164). Au Sénat, un amendement des rapporteurs instituait une répartition du financement entre l'État (30 % des coûts de formation) et le CNFPT (20 % des coûts de formation), ce dernier bénéficiant, en contrepartie, d'une adaptation de ses flux financiers avec les centres de gestion coordonnateurs. Le « reste à charge » aurait été assumé par l'employeur territorial (Amendement COM 429)
Comme l'a rappelé le Sénat, en 2016, le législateur a reconnu la compétence du CNFPT pour mettre en œuvre des actions « visant au développement de l'apprentissage » et pour contribuer aux frais de formation des apprentis dans la fonction publique territorial. Ces compétences devaient s'exercer dans le cadre de plusieurs conventions :
- une convention annuelle d'objectifs et de moyens conclue entre l'État et le CNFPT ;
- des conventions entre le CNFPT, l'employeur territorial, le CFA et la région pour fixer le montant de la contribution du CNFPT.
Aucune de ces conventions n'a été conclue. Considérant qu'il ne disposait pas des ressources nécessaires, le CNFPT n'a pas assuré cette nouvelle mission. Pour rappel, l'obligation de participation mise en place par la loi du 6 août 2019 ne s'accompagne d'aucune augmentation de ressources du CNFPT.
Loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, article 62
Possibilité de recrutement d'appentis au sein des organismes publics ne disposant pas de la personnalité morale
Les organismes publics ne disposant pas de la personnalité morale peuvent, sous réserve d'avoir la capacité juridique de recruter des personnels, conclure des contrats d'apprentissage dans les mêmes conditions que celles prévues pour les personnes morales de droit public dont le personnel ne relève pas du droit privé (amendement S402).
Depuis la loi du 17 juillet 1992, le secteur public est autorisé à accueillir des apprentis en application des dispositions du code du travail. Pour autant, seules les « personnes morales de droit public dont le personnel ne relève pas du droit privé" pouvaient conclure des contrats d'apprentissage », excluant ainsi les entités ne disposant pas de la personnalité morale, telles que les autorités administratives indépendantes. Plusieurs autorités administratives indépendantes disposent du pouvoir de recruter des agents contractuels et souhaitent s'engager dans la politique de développement de l'apprentissage, ce dispositif ne leur est pas ouvert.
Cet élargissement du champ des administrations pouvant recruter des apprentis doit permettre d'ouvrir plus largement la possibilité de recruter des apprentis dans la fonction publique et de ne pas exclure les entités volontaires dans cette démarche.
Article L6227-1 du code du travail
Loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, article 18
Coût de l'apprentissage dans la fonction publique
Afin de favoriser le développement de l'apprentissage dans la fonction publique, les modalités de rémunération des apprentis du secteur public sont alignés sur celles du droit commun prévu par le secteur privé (amendement 410 abrogeant en conséquence l'article L. 6227-7 du code du travail).
La rémunération des apprentis sera donc pour les contrats conclus à compter du 8 août 2019 fixée en fonction de leur âge et de leur progression dans le cycle de formation faisant l'objet de l'apprentissage. Elle ne tiendra plus compte du niveau de diplôme préparé. Cette mesure, précisent les auteurs de l'amendement précité « ne fait pas obstacle au versement d'une majoration de rémunération, dans des conditions qui seront précisées par décret ».
Loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, article 12-1
Loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, article 62
Développement de l'apprentissage dans la fonction publique hospitalière
Deux amendements identiques adoptés lors des discussions à l'Assemblée nationale suppriment (amendement AN 855 et AN 910 ) un frein au développement de l'apprentissage dans la fonction publique hospitalière, en sécurisant juridiquement le recrutement d'apprentis et leur parcours de formation, pour les professions d'infirmier, de masseur-kinésithérapeute, de pédicure-podologue, d'orthoptiste et d'orthophoniste.
Ces modifications évitent toute confusion entre le statut de l'apprenti et celui d'un agent de droit commun, et donc de risque d'exercice illégal d'une profession réglementée, dès lors que l'apprenti n'intervient qu'au titre et dans le cadre de son cursus de formation. En effet, l'exercice de ces professions est conditionné à l'obtention d'un diplôme d'État. Toute personne qui les exerce illégalement est passible de sanctions pénales qui s'élèvent par exemple à un an d'emprisonnement et à 15 000 euros d'amende pour les orthophonistes.
À titre dérogatoire, les étudiants peuvent effectuer certains actes pendant leur formation, sous la responsabilité d'un professionnel diplômé. La loi du 6 août 2019 étend cette dérogation aux apprentis.
Article L. 4311-12 du code de la santé publique modifié
Article L. 4323-4-1 du code de la santé publique modifié
Article L. 4323-4-2 du code de la santé publique modifié
Article L. 4344-4-1 du code de la santé publique modifié
Article L. 4344-4-2 du code de la santé publique modifié
Loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, article 61
Expérimentation pour permettre la titularisation des apprentis en situation de handicap
A titre expérimental et pour une durée de cinq ans à compter de la publication de la loi du 6 août 2019 (soit dès le 7 août 2019), les bénéficiaires de l'obligation d'emploi peuvent être titularisées, à l'issue d'un contrat d'apprentissage, dans le corps ou cadre d'emplois correspondant à l'emploi qu'elles occupaient.
Cette titularisation est conditionnée à la vérification de l'aptitude professionnelle de l'agent. Une commission de titularisation se prononce au vu du parcours professionnel de l'agent et après un entretien avec celui-ci.
Un décret en Conseil d'Etat définira les modalités de cette expérimentation. Il précisera les conditions minimales de diplôme exigées et les conditions du renouvellement éventuel du contrat d'apprentissage. Une évaluation de cette expérimentation sera présentée au Parlement un an avant son terme.
Les personnes handicapées peuvent déjà être recrutées en apprentissage et ce, quel que soit leur âge. Bien que cette voie d'accès contractuelle et temporaire à la fonction publique soit plus accessible que les concours, elle conduit toutefois à une impasse : à l'issue de leur contrat, les travailleurs handicapés ne peuvent pas être titularisés dans leur poste.
Cette voie d'accès à la fonction publique offre donc moins d'opportunités que les contrats ad hoc qui permettent aux personnes handicapées d'intégrer la fonction publique après un an de service. Dans bien des cas, l'agent est contraint « d'enchaîner » un contrat d'apprentissage puis un contrat ad hoc pour obtenir sa titularisation. C'est cette situation à laquelle souhaite remédier la loi du 6 août 2019 introduite par un amendement des rapporteurs du texte au Sénat (Amendement COM-9 )
Loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, article 91
LOI n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique
Décision n° 2019-790 DC du 1er août 2019