Cap vers un marché de la formation professionnelle plus dynamique ?
Pression à l'innovation pédagogique, concurrents plus agiles issus du digital, relation client à redéfinir : Nicolas Le Corre, auteur d'une étude publiée par Xerfi Precepta revient sur les bouleversements du marché de la formation et les tendances qui vont s'accentuer à l'avenir.
Par Jonathan Konitz - Le 26 avril 2022.
A l'horizon 2024, la dépense nationale en matière de formation professionnelle continue et apprentissage devrait atteindre les 27,7 milliards d'euros – contre 25 milliards en 2020 - et le chiffre d'affaires des organismes de formation devrait croître de 5, %, selon l'étude publiée par Xerfi Precepta en juillet 2021. « Ces prévisions datent de l'élaboration de l'étude, au printemps 2021, elles peuvent avoir évolué », nuance Nicolas Le Corre (ex-directeur d'études pour le cabinet d'études Xerfi), auteur du rapport « Formation professionnelle : affronter les défis de la transformation du marché à l'horizon 2024 ».
Pour autant, les possibles facteurs de croissance identifiés pour les organismes de formation restent d'actualité. A savoir, le boom de l'alternance et le développement du marché grand public aussi appelé BtoC (Business to consumer) en lien avec le succès du compte personnel de formation (CPF). Sans oublier un effet mécanique de rattrapage post-Covid, accompagné d'un phénomène de reconversion des salariés, « dans les faits assez limité malgré une forte médiatisation », juge Nicolas Le Corre.
Concurrence plus agile
Dans ce nouvel environnement concurrentiel à venir, les organismes de formation historiques, publics et privés, devront se frotter à de nouveaux entrants issus du digital-learning, « plus agiles et à l'expertise technologique marquée sur les nouveaux modes d'apprentissage ». Ces nouveaux concurrents sont souvent issus du secteur de l' Edtech (1,3 milliard d'euros de chiffre d'affaires en 2021), mais pas toujours. Particularités de ces nouveaux entrants sur le marché : ils sont en mesure de vendre des formations directement aux apprenants par le biais de départements marketing performants, avec une vraie stratégie de conquête de parts de marché, qui ne se cantonnent plus aux entreprises ou aux appels d'offres publics.
Au coeur du jeu concurrentiel
« Depuis la crise, ces acteurs sont très courtisés par les grandes écoles et les institutionnels comme Pôle emploi, désireux de s'associer avec des acteurs du digital-learning. Ils se placent de plus en plus au cœur du jeu concurrentiel, avec une grande capacité d'attraction auprès d'investisseurs et d'apprenants », analyse Nicolas Le Corre. Une agilité accrue par un fort pouvoir d'innovation pédagogique, et une capacité à bouleverser le marché en constituant des écosystèmes d'affaires au gré d'alliances judicieuses. « De la rencontre entre l'école de code Le Wagon et l'IESEG (école de commerce privée) est née un MBA [ 1 ]Master of business administration en leadership et code », cite-il en exemple.
De lourds investissements à prévoir
Pour les organismes de formation « traditionnels », tout n'est pas perdu. Conquérir des parts de marché, accélérer sa transformation digitale et renforcer sa stratégie BtoC est encore possible, au prix de l'acquisition de nouvelles compétences (en nouvelles modalités de formation, en marketing, etc.) par les équipes en interne ou par le biais de fusions-acquisitions et autres rapprochements avec des pépites du secteur. « Durant l'été 2019, l'organisme Apave avait racheté la startup Variable pour la digitalisation de ses parcours de formation », illustre Nicolas Le Corre.
Des investissements lourds mais indispensables, « à condition d'avoir les reins assez solides, à l'image du centre de formation Cegos, d'être soutenu par un actionnaire, ce qui n'est pas le cas de tout le monde, ou de relever du secteur public comme l'Afpa », nuance Nicolas Le Corre.
Notes
1. | ↑ | Master of business administration |