Le député Bruno Fuchs présente à l’Assemblée nationale la proposition de loi contre la fraude au CPF, le 6 octobre 2022.
« Un équilibre entre protection et liberté d'entreprendre » (Bruno Fuchs)
Rapporteur de la proposition de loi contre la fraude au CPF et le démarchage, Bruno Fuchs, député (Modem) du Haut-Rhin, revient sur les droits et interdictions à venir des organismes de formation, les obligations de référencement des sous-traitants, les prérogatives de l'administration. Il table sur une entrée en application du texte début 2023.
Par Emmanuel Franck - Le 10 octobre 2022.
Le quotidien de la formation. La proposition de loi visant à lutter contre la fraude au CPF et le démarchage, adoptée le 6 octobre à l'Assemblée nationale et dont vous êtes le rapporteur, a fait l'objet d'un amendement sur les sous-traitants. De quoi s'agit-il ?
BF. Cet amendement vise à lutter contre les fraudeurs qui « louent » un numéro d'agrément[ 1 ]NDR : Numéro de déclaration d'activité.. Ils se servent d'une entreprise enregistrée auprès de l'administration pour proposer des formations dégradées voir pas de formation du tout. Comme il est impossible de contrôler, la loi imposera au sous-traitant de s'enregistrer auprès de l'administration, de même que le prestataire de formation avec qui il est en contrat. Si le sous-traitant ne respecte plus les conditions de référencement, la Caisse des dépôts et consignations (CDC) déréférencera son client. Les modalités de mise en œuvre de cet article feront l'objet d'un décret qui sera discuté avec la profession.
QDF. Les parlementaires ont également travaillé à accélérer le recouvrement des sommes indues. De quelle manière ?
BF. L'objectif est que les sommes indûment perçues soient rapidement récupérées afin qu'elles ne s'évaporent pas. Dans la précédente version du texte, la CDC devait passer par la voie administrative pour récupérer ces sommes. La CDC pourra désormais délivrer une contrainte qui comportera les mêmes effets qu'un jugement.
QDF. La proposition de loi n'interdit pas tous les démarchages. Pouvez-vous préciser ce que les organismes de formation auront le droit de faire et ce qu'ils ne devront pas faire ?
BF. Le texte auquel nous sommes parvenus est un équilibre entre protection des Français et liberté d'entreprendre des organismes de formation. Ce qui sera interdit, c'est la prospection directe d'un titulaire d'un CPF, par téléphone, mail, SMS en vue de lui faire conclure un contrat, sous peine d'une amende jusqu'à 375 000 euros, sans compter les poursuites pénales. En revanche, les organismes de formations pourront continuer de faire la publicité de leurs prestations, y compris par SMS. Notre objectif est aussi de protéger les prestataires vertueux.
QDF. Cette loi sera-t-elle efficace pour faire cesser les fraudes et les démarchages intempestifs ?
BF. Le législateur met en place un nouveau cadre. Les sanctions prévues dans le texte sont, je pense, dissuasives, l'administration est plus efficace, et les prestataires et sous-traitants sont soumis à davantage d'obligations en vue de fournir des formations de qualité. Mais il faudra que le gouvernement donne des moyens notamment à la direction de consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Il y a aussi un angle mort. Entre le 33700, Bloctel et la plateforme CPF, il existe trop de lieux où les personnes peuvent signaler un problème. Il faudrait simplifier les choses.
QDF. Les députés ont adopté votre proposition de loi à l'unanimité. Comment les choses se présentent-elles au Sénat ?
BF. Normalement, le Sénat devrait adopter le texte dans les mêmes termes que l'Assemblée nationale. Si c'est le cas, nous gagnerons du temps. J'espère que le texte entrera en vigueur début 2023.
Notes
1. | ↑ | NDR : Numéro de déclaration d'activité. |