Julien Gondard et Joël Fourny, directeur général et président de CMA France, ont alerté, le 31 août 2023, sur l’impact de la révision du financement des CFA.
Financement des CFA : CMA France tire la sonnette d'alarme
La nouvelle baisse des niveaux de prise en charge qui doit entrer en vigueur ce 1er septembre menace l'équilibre financier de plus de la moitié des formations dispensées par les CFA des Chambres des métiers et de l'artisanat selon leur tête de réseau.
Par Estelle Durand - Le 01 septembre 2023.
«L 'apprentissage est en péril et par ricochet un grand nombre de professions artisanales sont menacées de disparaître. » C'est le message d'alerte lancé par Joël Fourny, président de CMA France lors de la conférence de rentrée du réseau des Chambres des métiers et de l'artisanat, jeudi 31 août. En cause, la révision des niveaux de prise en charge des contrats d'apprentissage programmée pour le 1er septembre. Cette nouvelle baisse de 5 % en moyenne aura des conséquences importantes sur les 137 CFA du réseau de CMA France qui forment partout sur le territoire à des métiers parfois très pointus qui nécessitent d'investir dans des plateaux techniques lourds.
57 % des formations déficitaires
Les cursus qui débouchent sur des CAP et préparent à des métiers qui sont au cœur du secteur de l'artisanat seront particulièrement touchés. Selon CMA France, la révision des niveaux de prise en charge telle qu'envisagée va se traduire globalement par une baisse de 8 % des financement au sein d'un réseau dont le taux de marge se situe en moyenne à 9 %. En conséquence : « 57 % de nos formations seront déficitaires », détaille Julien Gondard, directeur général de CMA France. Celles-ci concernent 55 % des effectifs d'apprentis formés au sein du réseau. Parmi les parcours les plus menacés figurent une quinzaine de CAP dont celui de boulanger. Son niveau de prise en charge qui était de 6 683 euros a été revu à 6 015 euros le mois prochain. Pour ce cursus dont le coût de revient s'élève à 6 055 euros en 2022, le taux de marge qui était de 9,39 % passera à - 0,8 %. L'impact serait encore plus important pour les CAP peinture en carrosserie (7,25 % de déficit).
Des métiers menacés
Ce nouveau contexte financier inquiète CMA France, car à terme, il met en danger les futurs apprentis, les métiers de l'artisanat et les entreprises du secteur. « Comment continuer à développer les compétences dont nos entreprises ont besoin en formant à perte ? » s'interroge Joël Fourny. Si l'équilibre financier n'est plus assuré, les CFA seront amenés à réduire leurs dépenses, à repenser leurs pratiques et à revoir leur organisation. Baisse de la qualité des formations, arrêt des sessions à faible effectif, fermeture de sites en zones rurales… : autant de risques qui pèsent aujourd'hui sur l'apprentissage, selon CMA France.
Incompréhension
Le réseau des Chambres des métiers et de l'artisanat, comme d'autres acteurs de l'apprentissage, s'est mobilisé à plusieurs reprises pour alerter le gouvernement sur les conséquences d'une nouvelle baisse. Une décision que Joël Founy juge « injuste, inacceptable et incompréhensible » au regard des ambitions du gouvernement en termes de développement de l'apprentissage et d'emploi des jeunes. « Nous comprenons la nécessité de trouver des sources de financement pour équilibrer le système mais si on reste dans une logique purement arithmétique, les conséquences seront néfastes », souligne Julien Gondard. CMA France demande au gouvernement de reporter la baisse des niveaux de prise en charge ou, à minima, de trouver des aménagements pour les CAP les plus touchés, et de repenser le financement de l'apprentissage en lançant une grande concertation sur le sujet.
Tenir compte des priorités
A plusieurs occasions, CMA France a fait des propositions pour sécuriser la dynamique de l'apprentissage et préserver les CFA qui préparent à des diplômes de niveau bac et infra bac. Le réseau des Chambres des métiers milite pour un système tenant compte des « priorités stratégiques » avec, par exemple, un mécanisme de financements complémentaires pour des formations qui répondent à des besoins en compétences prioritaires et à des problématiques particulières des territoires. La balle est maintenant dans le camp du gouvernement. Si rien n'est fait, dans le pire des scénarios, « les Chambres des métiers et de l'artisanat ne seront plus en mesure de garantir l'accueil des jeunes pour les formations devenues déficitaires », alerte Joël Fourny. Sur le terrain, certains CFA commencent à s'interroger sur le maintien d'investissement qu'ils avaient programmés pour des formations à des métiers rares ou sur le regroupement de certains sites de formation.