Karine Dartois, médiatrice de France compétences.
France compétences préconise une égalité d'accès à la reconversion
Source de clés d'interprétation utiles au bon déploiement du projet de transition professionnelle (PTP) et du conseil en évolution professionnelle (CEP), le rapport de la médiatrice France compétences permet aussi de révéler des « angles morts » du système. Et d'ainsi suggérer au législateur des pistes d'évolution.
Par Nicolas Deguerry - Le 08 juin 2023.
Entre arbitrage et conciliation, les quatre années d'activités de la médiation institutionnelle France compétences ont bâti, selon la médiatrice Karine Dartois, un « climat de confiance » et un « cercle vertueux » qui ont permis d'atteindre l'objectif initial de toute médiation : « une amélioration globale des services apportés. » En l'occurrence, le dispositif de projet de transition professionnelle (PTP) et le service de conseil en évolution professionnelle (CEP).
Quatre recommandations
En 2023, la médiatrice formule quatre recommandations. Et Karine Dartois le souligne dans son rapport, ses recommandations ne sont pas seulement utiles aux parties prenantes directes mais aussi sources d'inspiration pour le législateur. Ainsi notamment de deux nouvelles recommandations visant, « d'une part, à rétablir une égalité d'accès à la reconversion pour les salariés de droit privé et, d'autre part, à élargir le recours à une pratique qui favoriserait le déploiement de l'accès modulaire à la certification » souhaité par la loi Avenir professionnel de 2018.
Relative à l'iniquité entre salariés de droit privé au regard du régime assurantiel de leur employeur, la première recommandation invite à une évolution législative permettant aux salariés relevant de régimes d'auto-assurance d'accéder au dispositif de démission-reconversion dans les mêmes conditions que les autres salariés. La deuxième invite à clarifier les conditions d'éligibilité au PTP des certifications et habilitations enregistrées au Répertoire spécifique, afin de ne pas empêcher les reconversions qui ne peuvent être accompagnées par l'employeur. Le rapport insiste, il conviendrait aussi que les équipes techniques des associations Transitions Pro ne bloquent pas le dépôt des dossiers, la commission paritaire étant seule compétente pour apprécier la pertinence des projets.
Vers un « forfait parcours »
Sur constat d'une profonde inégalité de réalisation des bilans de positionnement préalable à l'entrée en formation et à leur faible impact quant à la durée de formation, la médiatrice recommande de lancer une réflexion sur la mise en œuvre d'un « forfait parcours » pour le PTP. Ceci, avec l'objectif de dépasser le modèle de la référence horaire comme unité d'œuvre sur laquelle s'appuie le financement des coûts pédagogiques, jugé peu incitatif au déploiement d'ingénieries de positionnement préalable et de formation individualisée.
Barème des priorités
Quelle que soit la pertinence du projet, les dossiers ont peu de chances d'aboutir s'ils ne bénéficient pas d'un nombre suffisant de points de priorité. Si l'inaptitude au poste de travail constitue à elle seule un motif évident de reconversion, elle ne compte à ce jour que pour un point, rendant très difficile l'accès au PTP des personnes ne répondant par ailleurs qu'à peu de critères de priorité. D'où la proposition de revoir à la hausse le nombre de points attribués à cette priorité.
Devenir des recommandations
Le rapport de la médiatrice aborde également la question du suivi des recommandations précédentes. Si la baisse volontaire de rémunération dès la formation pour les cadres de niveau 6 et plus afin de garantir l'égalité d'accès au PTP ne semble pas avoir été examinée, d'autres recommandations ont été prises en compte au bénéfice du système et parfois intégrées au Guide des projets de transition professionnelle publié à l'intention exclusive des associations Transitions Pro. Ainsi par exemple des salariés du particulier employeur qui bénéficient désormais d'une interprétation des conditions d'ancienneté régissant l'accès au PTP plus conforme à la réalité de leurs contrats.
MANQUE DE VISIBILITÉ Une remarque transversale du rapport insiste sur la nécessité de mieux faire connaître le service de médiation : « force est de constater que l'information sur son existence est non seulement peu visible mais qu'elle a perdu en visibilité dans plusieurs régions », regrette Karine Dartois. Et d'insister : « plus son rôle sera connu, plus les usagers auront de chance d'être entendus. » En 2022, la médiatrice France compétences a reçu 339 saisines dont 199 éligibles (256 en 2021). Parmi celles-ci, 191 concernaient le PTP et 8 le CEP. |
- Rapport de la médiatrice 2022, France compétences, 46 p., juin 2023 : format PDF - 1,31 Mo