Portée par la réforme de 2018, la libéralisation du marché de la formation et l'accélération de la transformation digitale, l'activité des start-ups de l'Edtech a connu en France une croissance inédite. Selon une étude du cabinet E&Y, leur chiffre d'affaires dépassait le milliard d'euros en 2021. Tirée par la formation professionnelle, la filière reste dominée par le segment BtoB constitué par les entreprises et les organismes de formations. De plus en plus intégrées dans les politiques publiques, près de la moitié de ces jeunes pousses ont perçu des subventions. Leurs solutions innovantes répondent particulièrement bien aux enjeux décisifs de la gestion des compétences, la construction de parcours individualisés, l'attractivité pédagogique, les mobilités professionnelles, l'orientation ou encore de l'évaluation des actions de formation. Mais le profil atypique de ces jeunes pousses aux méthodes agiles bouscule les habitudes de l'écosystème. « Il reste un mur difficile à franchir pour la Edtech entre le marché de la formation professionnelle sur fonds publics et le marché privé des entreprises. Il y a un besoin réciproque de professionnalisation de la part des financeurs et de nos start-ups », confirme Antoine Amiel, vice-président d'Edtech France. L'association en a fait une de ses priorités en 2023.

Développer la veille et le lobbying

Edtech France prévoit ainsi de mettre en place des groupes de travail autour de la veille réglementaire, une communication et la diffusion d'informations ou encore des échanges de bonnes pratiques au sein de son réseau pour aider ses start-ups à mieux comprendre le fonctionnement de l'écosystème de la formation professionnelle. Un rapport de France stratégie publié fin 2021 pointait la nécessité de ce rapprochement entre ces deux mondes et formulait cinq propositions. Des préconisations en ligne avec la nouvelle feuille de route d'Edtech France. « Nous devons gagner en visibilité au sein de l'écosystème de la formation, nouer des partenariats avec les acteurs de l'emploi, suivre de près les évolutions de la réglementation et mieux appréhender les règles d'accès au financement dans un marché très mouvant », complète Justine Abecassis, sa vice-présidente. Mais les efforts doivent être partagés.

Des freins au développement de l'Edtech

Encore peu familiers des spécificités de l'e-learning, les financeurs ne devraient pas centrer leur approche sur la réduction des coûts mais étudier de plus prsès le contenu des parcours.  Il leur faut également sortir d'une tarification à l'heure et adopter une culture de la qualité et de l'évaluation. Les pouvoirs publics ont besoin de comprendre l'univers des start-ups. « Les appels à projets dont le process sont souvent trop longs ne sont pas adaptés à leur fonctionnement et à leurs ressources », note Antoine Amiel. Autre enjeu l'Edtech, les évolutions d'une régulation qui se cherche encore depuis la libéralisation du marché de la formation génèrent de l'incertitude et fragilisent leur modèle économique. Le durcissement des critères d'enregistrement aux répertoires nationaux mais surtout sur la plateforme « mon compte formation » inquiète tout particulièrement les start-ups.

Vers une consolidation du marché ?

« Le débat autour de la régulation du CPF a été manqué. Contraire à l'esprit de ce dispositif, le reste à charge risque de casser la dynamique et pénaliser les plus éloignés de la formation. De même, les mesures attendues sur la sous-traitance pourraient limiter le recours au mentorat et aux professionnels, pourtant essentiel dans la construction des parcours », pointe Justine Abecassis. Ces difficultés à se projeter sont aggravées par un contexte plus tendu pour l'Edtech. En plein essor depuis 2020, le marché pourrait amorcer une phase de consolidation. « Nous entrons dans un cycle moins favorable après la forte croissance portée par la réforme de 2018 et l'accélération de la digitalisation observée depuis la crise de la Covid. On peut s'attendre à des rapprochements stratégiques au sein de l'Edtech et entre les start-ups et les acteurs de la formation traditionnels », confirme Antoine Amiel.

Université d'hiver de la formation professionnelle

Président d'EdTech France, Yannig Raffenel interviendra lors de l'Université d'hiver de la formation professionnelle, pendant la séquence dédiée au thème  "formations immersives et metavers: enjeux et pratiques", jeudi 27 janvier de 9 heures à 10 heures 30, à Cannes.