Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT.
Sophie Binet revendique une amélioration des droits des apprentis
Financement de la formation, compte personnel de formation, apprentissage, réforme du lycée professionnel : Sophie Binet, nouvelle secrétaire générale de la CGT, s'est exprimée sur la politique du gouvernement et a formulé sa vision sur les enjeux de formation, lors d'une rencontre avec l'Association des journalistes de l'information sociale, vendredi 16 juin.
Par Mariette Kammerer - Le 20 juin 2023.
Sophie Binet estime que « le problème majeur » de la formation professionnelle est celui du « financement » : « Les aides publiques augmentent mais la contribution des entreprises a chuté depuis la loi de 2014, notamment celle des grands groupes, qui se désengagent ». Cette baisse du financement de la formation est selon elle « gravissime » dans un contexte où il faudrait au contraire « investir massivement pour répondre aux enjeux de transformation numérique et environnementale, avec des sauts technologiques très importants. On sait que le déficit de compétitivité de la France est essentiellement lié à un déficit de formation initiale et professionnelle ».
Droit du salarié à choisir sa formation
La CGT dénonce « évidemment » les mesures d'austérité du gouvernement et les « tentatives d'imposer un reste-à-charge sur le CPF des salariés », qu'elle juge « scandaleux ». Sur le compte personnel de formation, la secrétaire générale note qu'il faudrait « travailler davantage » pour « empêcher les fraudes des officines qui se multiplient pour capter cet argent ». Dans ce contexte, « face aux défis qui nous attendent », la CGT rappelle son attachement à l'Afpa : « On a besoin d'un organisme de formation public pour prévoir les formations de demain avec un vrai contenu qualifiant ». La CGT défend enfin « le droit du salarié à choisir sa formation professionnelle ».
Taux de rupture élevé des contrats d'apprentissage
Sophie Binet souligne que la politique coûteuse de soutien à l'apprentissage - « 20 milliards d'euros d'argent public » - a eu des effets « essentiellement dans l'enseignement supérieur, alors que sur les niveaux 4 et 5 les taux de rupture de contrat restent très élevés, de 20% à 30% ». Elle préconise de « cibler l'argent public sur les premiers niveaux de qualification, sur des dispositifs d'accompagnement renforcés, et améliorer les droits des apprentis ». La CGT estime que ces derniers sont « dans une zone de non-droit », leur rémunération est « beaucoup trop faible, encore indexée sur l'âge, alors qu'elle devrait prendre en compte le niveau du diplôme visé ». Il faut selon elle « renforcer leurs droits dans les CFA et face aux patrons, sur des sujets concrets comme le harcèlement sexuel ».
Lycée professionnel
Le lycée professionnel est un sujet bien connu de la secrétaire générale puisqu'elle y a travaillé en tant que CPE (conseillère principale d'éducation), en Ile-de-France et dans les quartiers nord de Marseille. Et la réforme actuelle du gouvernement ne la convainc pas. Le volume des enseignements généraux, « considérablement réduit par la réforme du Bac pro en trois ans qui a supprimé une année de formation », va être à nouveau réduit par la réforme actuelle. Pour ces élèves qui « en difficulté sur les savoirs fondamentaux » il faudrait selon elle « mettre le paquet sur cette question-là, avec des pédagogies différentes qui partent du concret ». Elle pointe également le problème de « l'orientation subie » en Bac Pro, qui créé du décrochage et ne donne pas accès à des « filières d'avenir ». Elle pose enfin la nécessité de « renforcer les moyens socio-éducatifs des lycées professionnels - en conseillers principaux d'éducation, infirmières, assistantes sociales ».
Projets alternatifs
Enfin, face à l'enjeu de transition écologique - dans l'automobile, les centrales à charbon, par exemple -, la CGT estime qu'il faut « proposer des projets alternatifs, sécuriser le contrat des salariés, et mettre le paquet sur la formation pour reconvertir les salariés ». Les syndicats ont « un rôle majeur à jouer pour proposer des projets industriels alternatifs, mais il faut leur en donner les moyens ».