10 ans du compte personne de formation le 21 novembre 2024.

CPF : une co-construction des parcours encore très marginale

Le compte personnel de formation (CPF) ne tient pas toutes ses promesses : les parcours professionnels sont encore bien rarement le fruit d'un accord entre une entreprise et ses salariés. En cause : un manque d'outils, disent les employeurs, une acculturation à peaufiner, soutiennent les organisations syndicales. C'est la ligne de fracture apparue lors du colloque organisé au ministère du Travail et de l'emploi le 21 novembre à l'occasion du 10e anniversaire du CPF.

Par - Le 25 novembre 2024.

« La formation n'est pas un objet de consommation ! Ce n'est pas un acte d'achat spontané. Le salarié doit choisir des choses qui lui sont utiles, puisqu'aujourd'hui, nous suivons plusieurs carrières. »

Ces mots sont ceux de Rachel Becuwe, adjointe au délégué général à l'emploi et à la formation professionnelle. Elle les a prononcés lors d'un colloque, le 21 novembre, au ministère du Travail et de l'emploi. Une façon de se défendre d'un changement de philosophie sur le CPF, que les pouvoirs publics veulent voir se rapprocher des besoins des entreprises et du marché du travail, plus que de la seule réponse aux souhaits individuels. « Le CPF est un outil individuel, décrypte Rachel Becuwe. Mais son impact est amplifié quand l'employeur l'accompagne. Aussi le cofinancement est-il un enjeu clé. »

Une co-construction marginale

Pour y inviter, des mesures ont été mises en place, comme l'absence de reste à charge pour le salarié en cas d'abondement de l'employeur. Et les services de la Caisse des dépôts poursuivent leurs travaux sur l'outil informatique pour automatiser certaines procédures, ce que réclament fortement les entreprises, qui se disent entravées par le manque de souplesse de l'outil et sa complexité.

Reste que pour l'heure, la co-construction demeure marginale. En 2023, seules 30 000 salariés ont bénéficié d'un abondement de leur employeur, sur les près d'un million et demi de dossiers acceptés dans le cadre d'un CPF.

Un besoin d'acculturation

Outre une difficulté d'utilisation des outils de co-construction, Séverine Garandeau-Martin, secrétaire confédérale chargée de la formation à la CFDT, a pointé une nécessaire acculturation puisqu'à ses yeux, la formation reste un parent pauvre du dialogue social. En outre, elle a évoqué un risque, celui que le salarié n'ose pas toujours dire non à son employeur qui choisirait pour lui une formation adaptée à l'entreprise plus qu'à ses souhaits, en utilisant pourtant l'argent de son CPF.

Autrement dit, difficile aujourd'hui, la co-construction, demain, pourrait-elle redevenir en réalité une décision de l'entreprise qui formerait ses salariés selon ses besoins à elle ? Le passeport compétences, qui peine à se mettre en place, nuancera-t-il ce risque ? La table ronde a laissé les questions ouvertes.