Valérie Michelet, juriste senior, consultante experte sur le droit et les politiques de formation, et Fouzi Fethi, responsable du pôle Droit et politiques de formation à Centre Inffo.
Droit de la formation : une trajectoire de contrôle et d'économies
Dans le contexte de la nouvelle donne politique, le « Club du droit » de Centre Inffo du 8 octobre a décrypté les potentielles évolutions législatives et réglementaires à attendre en matière de formation professionnelle.
Par Raphaëlle Pienne - Le 10 octobre 2024.
La longue « pause » imposée par la dissolution de l'Assemblée nationale et l'attente de la formation d'un nouveau Gouvernement a aussi touché le droit de la formation. Le paysage législatif et réglementaire en cette rentrée reste donc assez similaire à celui qu'il était lors du dernier « Club du droit » en juin dernier. Mais les prochains mois, qui seront marqués par le vote de la loi de finances, pourraient voir les choses changer. « Les évolutions règlementaires que l'on a déjà connues en 2024 donnent le ton de ce que l'on peut attendre : le contrôle et les économies », prévoit Fouzi Fethi, responsable du pôle droit et politiques formation chez Centre Inffo.
Dépenses publiques : des pistes pour réduire la facture de l'apprentissage
En matière de dépenses consacrées à la formation, le nouvel exécutif devrait poursuivre la trajectoire des mesures d'économies déjà amorcée cette année. Pour cela, il s'inspirera peut être de certaines des préconisations formulées par les inspections générales des affaires sociales et des finances. « Au total, il y a une dizaine de propositions qui visent pratiquement 1 milliard d'euros d'économies et également des recettes complémentaires évalués à 421 millions d'euros uniquement sur le champ de l'apprentissage », présente Valérie Michelet, juriste-experte chez Centre Inffo. Certaines de ces propositions, comme l'abaissement du seuil d'exonération de cotisations sociales sur les salaires des apprentis, pourraient être inclues au projet de loi de finances. Mais les deux juristes rappellent également que d'autres mesures, comme la suppression de l'aide exceptionnelle à l'embauche ou la modulation du montant de l'aide unique à l'apprentissage, peuvent être prises par décret simple.
Réforme de la VAE : les délais ne seront pas tenus
La réforme de la VAE est pour sa part au point mort. « Ce qui s'est passé en juillet peut même être vu comme un recul », observe Valérie Michelet. La plateforme France VAE a connu une suspension de service cet été. Faute de budget, elle n'a rouvert que pour concerner des parcours concentrés sur 24 certifications – contre 208 certifications à son lancement. « Le choix de se resserrer sur les métiers du care [soin] a néanmoins peut-être été fait parce qu'il s'agissait des métiers les plus préparés », nuance la juriste. Reste que le temps réglementaire continue à courir. « Le projet était censé tourner à plein régime au 1er janvier 2025. […] Il faut un décret pour modifier le précédent car on ne pourra pas tenir les délais », explique Fouzi Fethi.
Contrôles et certifications : bientôt de nouveaux décrets ?
Les travaux sur la qualité de la formation et sur les certifications professionnelles poursuivent en revanche leur avancée. « Malgré le [contexte] politique incertain, nous avons un calendrier et un cap sur ces chantiers. On peut considérer qu'on sera dans la continuité », estime Fouzi Fethi. Celui-ci rappelle en outre que la nouvelle ministre du Travail a repris les équipes du Haut-commissariat à l'enseignement et à la formation professionnels, récemment dissous. « Une réunion du comité de pilotage [des 5 groupes de travail sur la régulation et le contrôle qualité] s'est tenue le 23 juillet. Chaque groupe de travail s'est vu remettre une feuille de route, avec une remise pour novembre. Cela pourrait alimenter au moins des propositions de modifications par voie réglementaire », indique Valérie Michelet. Le constat est le même pour les travaux sur les certifications professionnelles, autour notamment des pistes pour faire évoluer les procédures d'enregistrement de droit des certifications délivrées au nom de l'Etat ou pour renforcer les procédures de contrôle des certificateurs. « Il n'est pas exclu que sur ces sujets, déjà bien avancés, et s'il n'y a pas de turbulences politiques, nous ayons des décrets », analyse Fouzi Fethi.