En Normandie, une formation inclusive est menée par l’Umih 27 (Union des métiers et des industries de l’hôtellerie) et le CFAie (centre de formation des apprentis interconsulaire) de l’Eure.
Entre allocataires du RSA et personnes handicapées, la sauce prend en cuisine
En Normandie, l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie (UMIH) et le centre de formation des apprentis interconsulaire de l'Eure (CFAie) expérimentent une formation consacrée aux bases des métiers de l'hôtellerie-restauration. Particularité de ce parcours inclusif : il est s'adresse à des allocataires du RSA et à des personnes en situation de handicap.
Par Jonathan Konitz - Le 19 avril 2024.
« C'est la formation de l'emploi autrement », s'enthousiasme Didier Guérard, président de l'UMIH 27. Pas d'angélisme pour autant : oui, des couacs arrivent en cuisine, comme la fois où « un petit clash a eu lieu entre un demandeur d'emploi et un jeune homme autiste sans filtre dans ses propos... Mais ça va s'arranger car l'autre est assez âgé pour prendre de la distance », rassure-t-il. Avec le CFAie de l'Eure, il porte sur ses épaules le poids de cette expérimentation « unique en France » lancée en février dernier.
Six allocataires du RSA, et sept personnes handicapées, ont signé pour un parcours de 11 semaines en CFA dont quatre en entreprise. Pour apprendre « à porter un plateau, dresser des plats, faire des cocktails basiques, des sauces, etc. », énumère Didier Guérard, « ... ainsi que des prestations en hôtellerie comme faire un lit, le ménage dans une chambre, etc. », complète Nathalie Zumsteg, responsable pédagogique du CFA, qui a crée la maquette du parcours de zéro.
Attestation et badge numérique
A la fin, les stagiaires recevront une attestation et un badge numérique pour justifier leurs compétences. « A mettre sur le CV et consultable par l'employeur avec un QR Code », précise-t-elle. « Nous n'avons pas la prétention de sortir des grands diplômés en 11 semaines, prévient, Didier Guérard, l'objectif est d'être opérationnel pour la pleine saison, dès la fin de leur cursus en mai. Dieu sait si on va avoir besoin d'eux ! Les Jeux Olympiques vont arriver dans la foulée, et nous sommes une base avancée... Il ne faut pas se louper. » Si l'insertion dans le marché du travail est le but recherché, rien n'interdit les stagiaires de poursuivre vers un contrat de professionnalisation, par exemple.
Dénicher la perle rare
L'autre objectif de cette expérimentation, c'est d'offrir un autre horizon professionnel aux personnes en situation de handicap que celui des Instituts médico-éducatifs (IME) et des Établissements et services d'accompagnement par le travail (Esat). « On leur a dit voilà, chez vous, il y a probablement des petites perles qui sont cachées. Ce qu'on aimerait, c'est que vous les fassiez sortir de leur nid et que vous nous les envoyez pour une sélection, réalisée par l'équipe pédagogique du CFA », expose le président de l'UMIH 27.
La question du financement
Malgré toutes les bonnes volontés, la question du financement de la formation reste cruciale. « Le CFA prend tout en charge cette première année : des salaires des formateurs dédiés, à l'achat des tenues et des matières premières nécessaires à l'apprentissage », expose Nathalie Zumsteg. Si le financement public ne suit pas derrière « on ne pourra plus le supporter », alerte-elle. Comprendre : une deuxième promotion n'est pas garantie.
Trouver des subventions publiques est donc l'actuel souci de Didier Guérard. Il compte approcher la Région Normandie dans les prochaines semaines. Il craint une fin de non-recevoir. « La formation n'est ni certifiante ni diplômante, ne dure pas cinq ou six mois. » L'inclusivité, et le taux d'insertion professionnelle, pourraient bien constituer des arguments de poids en sa faveur.