Thibaut Guilluy, directeur général de France Travail.
France Travail veut « associer » recrutement et formation des chômeurs
A partir de janvier 2025, la réforme de France Travail entre dans le dur. L'opérateur aura de nouvelles missions, dont l'accompagnement des allocataires du RSA, et devra composer avec une baisse d'effectifs et des moyens financiers limités. Cette rigueur budgétaire affectera aussi les crédits alloués à la formation des demandeurs d'emploi. Thibaut Guilluy répondait aux journalistes de l'Ajis (Association des journalistes de l'information sociale) sur ces différents sujets le 20 novembre.
Par Mariette Kammerer - Le 22 novembre 2024.
France Travail se prépare à mettre en œuvre dès janvier prochain les nouvelles missions prévues par la loi Plein emploi : inscrire et accompagner un million d'allocataires du RSA (revenu de solidarité active), multiplier par trois les contrôles des chômeurs pour arriver à 1,5 million, passer 200 000 à 600 000 prospections d'entreprises, orienter directement les demandeurs d'emploi handicapés, accompagner les personnes licenciées pour inaptitude (100 000 personnes), et généraliser le dispositif « avenir professionnel » pour 100 000 lycéens professionnels.
Moyens insuffisants pour les nouvelles missions
« Tout ça ne se fait pas sans rien, or les moyens financiers de France Travail n'augmentent pas assez en 2025 par rapport à 2024 pour faire tout ça en plus, estime son directeur général Thibaut Guilluy. Et la décision du gouvernement de supprimer 500 ETP au sein de France Travail lui paraît une mesure d'économie « discutable », surtout si cela conduit l'opérateur à « externaliser les suivis des allocataires du RSA, car on sait que ça coûte deux fois plus cher », souligne-t-il.
Selon lui, la généralisation du dispositif « avenir professionnel » « est une priorité de la ministre » et sera donc « sanctuarisé ».
Accompagnement des allocataires du RSA
Concernant la généralisation de l'accompagnement intensif des allocataires du RSA, « le déploiement sera progressif » : « On fera selon nos moyens », prévient le directeur général, qui entend préserver le ratio « d'un conseiller pour 50 ou 60 allocataires, car c'est ce qui fonctionne ». Voilà qui rassurera peut-être les organisations syndicales de France Travail qui, craignant une surcharge de travail, ont appelé à la grève. Thibaut Guilluy rappelle les bons résultats des expérimentations RSA déjà menées dans 49 territoires : « 42% des allocataires accompagnés sont sortis du RSA ». Pour les accompagner et remplir les 15H d'activité préconisées, France Travail et les départements se sont mis d'accord sur « un référentiel de 200 activités possibles », dont la formation et les immersions.
Baisse des budgets formation pour les demandeurs d'emploi
Alors que le chômage repart à la hausse, la formation des demandeurs d'emploi va être impactée par les baisses de crédits en 2025. Que ça soit au niveau du budget des Régions, de celui des PRIC – plans régionaux d'investissement dans les compétences –, ou du budget national du PIC, qui était de 600M€ et sera l'année prochaine de 200M€. « France Travail aura aussi moins d'argent pour financer des POEC (préparation opérationnelle à l'emploi collective), qui permettent pourtant 85% de retour à l'emploi. Cela va réduire la capacité des entreprises à former des candidats », regrette Thibaut Guilluy. Il reconnaît néanmoins que le système de formation des chômeurs n'est pas très efficace : « Sur le PIC on est seulement à 60% de taux de retour à l'emploi après une formation, y compris sur des métiers très porteurs comme le numérique ».
« Former pour recruter »
Avec la réforme de France Travail, il défend l'idée de « former pour recruter » et souhaite « associer plus fortement recrutement et formation » : « Quand il y a un projet de recrutement dans un secteur d'activité ou sur un territoire, on organise la formation en face ». Il préconise pour cela « un système plus simple, moins de dispositifs, mais plus orientés vers le retour à l'emploi ».
Et ce « sans délaisser les actions d'accès à la formation », en direction par exemple des allocataires du RSA ou des jeunes décrocheurs. Il rappelle également la nécessité « d'adapter l'offre de formation aux personnes handicapées », en développant notamment une offre à temps partiel.