Jean-Luc Peuvrier, président de Stratice.
IA en formation : des usages à accompagner (enquête Stratice)
Présentée en avant-première mercredi 11 décembre en marge du congrès de la Fnadir, l'enquête Stratice sur l'intelligence artificielle en formation témoigne d'une adoption croissante de l'IA par les apprenants et les formateurs. Un besoin d'accompagnement se fait sentir.
Par Nicolas Deguerry - Le 12 décembre 2024.
Conduite de juin à novembre 2024 auprès de 1 774 personnes (664 formateurs et 1 110 apprenants), l'enquête Stratice sur l'IA en formation, réalisée en partenariat avec Ainoa (ex Fffod), révèle des usages majoritairement individuels et spontanés. Président fondateur du cabinet Stratice, Jean-Luc Peuvrier en retire un enseignement majeur : si plus de 60 % des formateurs et de 70 % des apprenants utilisent l'IA, il s'agit essentiellement d'usages non prescrits dans le cadre de la formation, avec moins d'un tiers des formateurs qui prescrivent l'IA dans les activités pédagogiques de leurs apprenants. « Comme il y a 20 ans avec le numérique, les formateurs, qui n'ont pas encore une maîtrise parfaite de l'outil, semblent craindre d'être pris en défaut par des apprenants qui en sauraient plus qu'eux », sourit Jean-Luc Peuvrier. Pour lui, un besoin d'encadrement de l'utilisation de l'IA se fait sentir, similaire à l'arrivée des téléphones portables. Des chartes sont d'ailleurs en cours d'élaboration pour définir les droits et les devoirs des formateurs et des apprenants concernant l'IA, notamment pour les devoirs notés et la citation des sources.
Côté apprenants
Côté apprenants, l'usage de l'IA augmente avec le niveau de diplôme, en formation comme en entreprise, avec un pic pour le niveau 6 (bac+3). Pour les apprenants, le premier motif de recours à l'IA concerne la recherche, en remplacement des moteurs traditionnels. Stratice souligne que si 36 % ont déjà testé le rendu de devoir avec une IA, ils ne sont que 13 % à y avoir recours souvent et 3 % tout le temps. Est également souligné le fait que l'usage de l'IA ne leur est recommandé par les formateurs, ou prescrit dans une activité, que dans 31 % des cas. Les usages les moins répandus sont la production de vidéos et de podcasts, la réalisation de supports visuels et la rédaction de mails. L'usage de l'IA en formation décroît fortement à partir de 35 ans et il est délaissé par les deux tiers ou plus dans toutes les catégories d'âge en entreprise. S'agissant des avantages perçus de l'IA, les apprenants placent en tête l'aide à la rédaction (52 %), le gain de temps (32 %) et la recherche d'une plus grande efficacité (20 %). Dans une moindre mesure mais à la (bonne) surprise des enquêteurs, la perspective d'un meilleur entraînement pour les évaluations, examens et soutenance séduit 9 % des apprenants. Côté inconvénients, c'est la perte d'autonomie qui domine (35%) suivi par la tricherie (25%) et l'accès à leurs données personnelles (17 %).
Côté formateurs
Concentrés sur la recherche de nouvelles idées, la rédaction et la reformulation des contenus de formation, l'approfondissement de sujets et la création d'activités pédagogiques, les usages de l'IA par les formateurs visent « plus le fond que la forme et nécessitent [donc] un certain niveau de compréhension du fonctionnement des IA génératives et une bonne analyse critique des résultats. » Si près des trois quarts des formateurs utilisateurs d'IA se déclarent peu inquiets par ces nouvelles pratiques, ils sont aussi 58 % à souhaiter être accompagné dans la découverte de l'IA et dans la prise en main des outils et 68 % vers des usages responsables. Jean-Luc Peuvrier le souligne, cette demande d'accompagnement est partagée par les apprenants et couvre un large spectre, de la découverte à l'utilisation pratique des outils en passant par la maitrise des aspects éthiques.
Un risque d'uniformisation
Au-delà des données brutes, c'est aussi la rapidité de la courbe d'adoption qui interpelle le président fondateur de Stratice. Le recours croissant à l'IA interroge l'impact sur la créativité, avec un risque d'uniformisation de la pensée qui s'étend au-delà des enjeux individuels. Ainsi par exemple de l'utilisation de l'IA pour répondre à des appels d'offres, qui soulève selon Jean-Luc Peuvrier des questions sur la standardisation des réponses. Alors que se profile le sommet pour l'action sur l'IA accueilli par la France les 10 et 11 février prochains, le président fondateur de Stratice y voit l'occasion de pousser l'enjeu de souveraineté européenne face à des IA majoritairement anglo-saxonnes et notamment nord-américaines. Avec cette conviction : la maîtrise des données d'entraînement et des algorithmes est capitale pour une utilisation optimale et éthique de l'IA dans la formation.
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