World skills Lyon 2024

Les centres de formation, fabriques des futurs champions

La Compétition mondiale des métiers, WorldSkills, qui se tenait à Lyon depuis mardi, s'est achevée dimanche 15 septembre. Zoom sur ce vivier de compétiteurs que sont les centres de formation. Quel que soit leur statut, ils jouent un rôle primordial dans la préparation des jeunes à la compétition. Un investissement financier et humain.

Par - Le 16 septembre 2024.

Mercredi 11 septembre à 10 heures, les premières épreuves de la finale mondiale de WorldSkills débutent dans le brouhaha de l'Eurexpo, à Lyon. Basile, son casque sur les oreilles, a les yeux rivés sur son ordinateur. Voilà trois ans que le champion de France de conception assistée par ordinateur (CAO) se prépare à cette compétition, au sein du lycée Jules Haag, à Besançon (Doubs). Comme d'autres établissements – lycées, mais aussi CFA, Greta, écoles spécialisées…­– ce dernier a été désigné centre d'excellence par l'association WorldSkills France, chacun de ces centres étant tenu de former dans un métier précis les candidats à la finale mondiale de cette compétition des métiers.

Enseignants volontaires et amoureux de la compétition des métiers

Mais l'aventure WorldSkills commence avant, dans bien d'autres centres de formation, partout en France, qui incitent leurs élèves à s'inscrire aux sélections régionales de la compétition. L'élan naît alors souvent d'enseignants volontaires, « amoureux » des WorldSkills, à l'image de Marc Rougerie : « J'ai rejoint le mouvement en tant que juré régional, et je suis aujourd'hui expert international », résume ce formateur maintenance et robotique au Pôle Formation UIMM Limousin. Voilà plus de 15 ans qu'il prépare des jeunes, des qualifications régionales à la compétition mondiale. Mise au point des entraînements, identification et fourniture du matériel, élaboration des épreuves nationales… « C'est un engagement personnel, il ne faut pas compter ses heures, sinon ça fait peur », confie l'enseignant. Même écho du côté de François-Xavier Durain, formateur à Jules Haag, qui a entraîné Basile deux matinées par semaine durant plusieurs mois. Certaines années, il a estimé à environ 600 heures supplémentaires le temps accordé à la compétition. « Mais la première fois que j'y ai participé, ça m'a regonflé en tant qu'enseignant ! », témoigne-t-il plus de dix ans plus tard.

Bénévolat

Cette implication reste très largement bénévole, dans la mesure où WorldSkills France ne rémunère pas ses formateurs. « Notre direction d'établissement nous soutient en nous libérant du temps que l'on consacre à WorldSkills », note Denis Marjollet, attaché à cet engagement volontaire. Formateur à la MFR de Saint-Martin en Haut (Rhône), il accompagne régulièrement des jeunes dans la compétition, et est venu prêter main forte à Eurexpo, sur l'atelier de Technologie automobile.

Trouver des partenaires

Comme le lycée Jules Haag, certains établissements décident de s'engager encore davantage en devenant les sites officiels d'entraînement des membres de l'équipe de France. Là aussi, l'initiative repose souvent sur des enseignants impliqués dans la compétition. Mais pour devenir centres d'excellence, un certain niveau d'équipement est requis : des matériaux de BTP pour les métiers du bâtiment, des denrées alimentaires pour les métiers de bouche, des véhicules pour les métiers du transport… Du matériel dont dispose déjà la plupart des centres, sans que celui-ci corresponde nécessairement aux standards des épreuves. Des partenariats peuvent alors se nouer avec des fournisseurs. Certaines associations professionnelles mettent aussi la main au portefeuille, rapporte Sébastien Bonnet, responsable territorial Auvergne Rhône-Alpes de l'Association nationale pour la formation automobile : « Nous proposons des enveloppes spécifiques aux centres engagés dans WorldSkills ». De manière indirecte, les régions contribuent également à aider ces centres d'excellence : « Nous finançons certains équipements des établissements, décrit Hélène Sainmont, référente WorldSkills en Bourgogne Franche-Comté. Nous avons par exemple équipé le lycée Jules Haag d'ordinateurs et d'imprimantes 3D, pour la pédagogie quotidienne, mais ce matériel sert aussi pour la préparation à la compétition. »

Vecteur d'attractivité ?

Mais l'investissement est aussi celui du centre d'excellence : « Je provisionne un budget, pas extraordinaire, dédié à WorldSkills, pour l'hébergement des jeunes, l'organisation de soirées, de visites… tout ceci sur nos fonds propres », énumère Damien Naviliat, responsable de formation au Campus de la CCI de Vaucluse. WorldSkills France attribue aussi quelques dotations, au cas par cas. « Jusqu'à présent, j'avais un peu l'impression que les centres d'excellence œuvraient dans l'ombre, avance François-Xavier Jurain, mais ça a un peu changé. » Une volonté de mieux reconnaître ces structures est en effet en réflexion. Car l'impact sur la réputation de l'établissement reste encore à démontrer : « Les apprentis qui arrivent chez nous ne connaissent pas forcément WorldSkills, observe Damien Naviliat, mais dans cet engagement, je pense uniquement aux jeunes, et non à l'image de marque du centre de formation », affirme-t-il.