Thibault Ronsin, directeur des ressources humaines du groupe SOS.
PrepApp, une innovation pour pallier les pénuries de main d'œuvre
« Une formation, ça ne change pas la vie, ben en fait si ! » Cette conviction, affichée à l'accueil de la conférence organisée par l'agence régionale de santé d'Île-de-France et le groupe SOS le 7 mars 2024 à St-Denis, illustre les effets du dispositif PrepApp, dédié à inverser la pénurie de main d'œuvre dans la filière médicosociale.
Par Christelle Destombes - Le 20 mars 2024.
Reconnue région prioritaire par les autorités de santé, devant « rattraper » l'offre de prise en charge du handicap, l'Île-de-France cherche des solutions : avec des taux de vacances variant entre 5 % en Ehpad et 12 % dans les services de soins infirmiers à domicile et des perspectives d'embauche estimées à 4 000 postes pour les prochaines années, l'ARS soutient le dispositif PrepApp, imaginé par le groupe SOS dans le cadre du PIC « 100 % inclusion ».
Lancé en 2021 en Seine-Saint-Denis, cette préparation à l'apprentissage vise à accompagner des jeunes décrocheurs scolaires vers une formation dans deux métiers en tension des secteurs sanitaire et médico-social : aide-soignant et accompagnement éducatif et social. Près de 500 jeunes en ont bénéficié depuis (dont 300 en Île-de-France) : majoritairement issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville, à 90 % des femmes, à 60 % « hors radar » des politiques publiques, ils sont aujourd'hui à 65 % en apprentissage.
Remobiliser, préparer…
Il a fallu aller les chercher, en activant les associations de quartier, les missions locales, et désormais le bouche-à-oreille. Les mobiliser pour qu'ils s'engagent dans ce parcours de 14 semaines, non rémunéré. PrepApp mêle des formations aux savoirs de base, savoirs métiers et savoir-être à un accompagnement social pour régler les freins périphériques (mobilité, gardes d'enfants, santé, logement…). Des temps d'immersion en établissements permettent la découverte des métiers et des interventions, auprès des personnes âgées comme des SDF. Une préparation à l'apprentissage ouvre les portes à une réintégration dans un parcours scolaire, avec le CFA du Groupe SOS et des écoles partenaires.
« J'étais en rupture scolaire totale, témoigne Fatoumatah 30 ans, 4 enfants, première promo PrepAPP. Je prépare aujourd'hui un diplôme de psychologue en quatre ans ». « J'ai pris 16 accueils PrepApp, j'ai eu 7 personnes embauchées en contrat de pro », témoigne Richardson Peras, chef de service Lits halte soins santé Les Voisins à St-Denis. Des deux côtés, le dispositif implique de s'affranchir des présupposés : les employeurs, plus habitués aux profils classiques des sortants d'Ifsi doivent s'acclimater à ce nouveau public, qui doit quant à lui acquérir certains savoir-être professionnels.
« C'est parfois un choc des cultures, admet Thibault Ronsin, directeur des ressources humaines du groupe SOS. Mais ce n'est pas un échec de donner une chance à des personnes qui, peut-être, ne resteront pas dans nos métiers. PrepApp est une démarche engagée d'employeur responsable ». Si les établissements du groupe SOS ont ouvert leurs portes à cette expérimentation, il s'agit désormais de convaincre d'autres structures de faire ce pari de la jeunesse des QPV. Le Groupe SOS essaime en 2024 en région Aura, Bourgogne, Occitanie avec un objectif de 430 jeunes recrutés