Soft skills : comment l'IA doit permettre un recrutement plus inclusif ?

Le livre blanc publié par fondation Mozaïk et l'association Article 1 plaide pour une meilleure prise en compte des soft skills (compétences comportementales) dans les processus de recrutement, et estime que l'IA (intelligence artificielle) peut y contribuer et faire reculer les discriminations à l'embauche. Le sujet était débattu lors d'une table-ronde chez leur partenaire Accenture, vendredi 5 juillet.

Par - Le 10 juillet 2024.

La fondation Mozaïk et l'association Article1 sont engagés avec Accenture dans un projet destiné à favoriser l'accès à l'emploi de 100 000 jeunes en leur permettant de révéler leurs soft skills grâce à une solution basée sur l'intelligence artificielle (IA). Dans leur livre Blanc intitulé "Soft skills : comment l'IA doit permettre un recrutement plus inclusif ?", ils rappellent d'abord que les entreprises ont intérêt à valoriser les soft Skills dans leurs recrutements, notamment la capacité à apprendre et à s'adapter, qui est déterminante dans un monde du travail en rapide évolution. Ils estiment que l'IA peut aider à mieux repérer et évaluer ces Soft skills, ce qui permettrait d'accorder moins de poids au diplôme et de donner plus de chance à des profils différents, qui n'auraient pas été retenus via leur seul CV.

Gain de temps et outils pour repérer les Soft skills des candidats

Le problème des recruteurs est souvent de traiter un très grand nombre de candidatures en un temps restreint. D'où la sélection par le diplôme, qui s'avère simple et rapide mais peu inclusive, et pas toujours pertinente au regard du poste visé. Le groupe Accenture rapporte son expérience d'utilisation de l'IA pour élargir ses profils de recrutement. « Avant, pour limiter le nombre de candidatures, on n'étudiait que celles provenant de grandes écoles, en utilisant un « proxy » grandes écoles, rapporte Julien Fanon, directeur exécutif talent et organisation chez Accenture. Aujourd'hui, nous utilisons un jeu pour repérer chez les candidats certaines compétences importantes dans le métier du conseil. On peut ainsi étudier un plus grand nombre de candidatures et élargir notre cible à tous les candidats de niveau Bac+5. Donc on est un peu plus inclusifs, maisce n'est pas suffisant ».

Pour aller au-delà, Accenture souhaite développer des Chatbot. « Le robot conversationnel peut poser certaines questions, discuter avec le candidat, et le mettre dans des situations définies pour évaluer les soft Skills recherchées », explique Julien Fanon. Au-delà des réponses en elles-mêmes, l'outil peut évaluer le langage utilisé, la formulation, la rapidité d'écriture. Cette étape de présélection fait ressortir des aptitudes et des points faibles, cela permet de gagner du temps et de guider le recruteur dans les entretiens à mener.

Bien paramétrer l'outil pour ne pas reproduire les biais

En amont de cette démarche, « il faut définir les soft skills clés pour le poste - par exemple, esprit critique, créativité, autonomie - puis à associer à chaque soft skill des comportements observables, qui serviront de base à vos outils d'IA », indique Jérémy Lamri, cofondateur du Lab RH. Il faut également veiller à gommer les biais inconscients qui faussent les évaluations. « Il faut être attentif à ces biais et pouvoir les corriger dans le paramétrage du modèle, pour éviter que l'IA ne les reproduise. Et il faut toujours avoir un regard critique sur ce que propose la machine, ne pas lui faire une confiance aveugle », souligne Laurence Devillers, professeure à l'université Paris Sorbonne et chercheuse. Julien Fanon souligne toutefois que « l'usage de l'IA dans les RH est encore balbutiant », et que « la Data RH est en retard par rapport à d'autres domaines ».

S'entraîner et développer ses Soft Skills

Le livre blanc classe les soft skills en « compétences sociales » (communication, gestion des conflits, négociation, travail en équipe), « compétences méthodologiques » (apprendre à apprendre, analyse, résolution de problèmes, créativité), et « compétences personnelles » (adaptabilité, auto-évaluation, leadership positif).

L'IA pourrait aider les candidats à s'entraîner et à se préparer en amont du recrutement.

« On peut imaginer des Chatbot qui vont aider les candidats à identifier leurs soft skills, à les développer, et à affiner leur présentation », poursuit Julien Fanon. Pour la Fondation Mozaïk, il est important que l'IA ne soit pas réservée à une élite:  « Il faut que les jeunes des quartiers populaires qu'on accompagne soient conscients de ce processus et puissent l'intégrer quand ils candidatent à un poste », indique Géraldine Plenier-Latieule, directrice générale.