Soutien à l'apprentissage : l'enveloppe des Régions en forte baisse
Un arrêté réduit de 50 millions d'euros le montant du financement alloué aux Régions pour le soutien aux dépenses de fonctionnement des centres de formation d'apprentis (CFA). La décision, qualifiée « d'injustifiée et scandaleuse » par David Margueritte de Régions de France, pourrait menacer des engagements financiers déjà actés par les collectivités.
Par Raphaëlle Pienne - Le 24 mai 2024.
Après l'aide à l'embauche en contrat de professionnalisation ou le CPF, c'est au tour du fonds de soutien à l'apprentissage aux Régions d'être affecté par le tour de vis budgétaire exigé par Bercy. Un arrêté du 13 mai 2024, publié au Journal Officiel du 16 mai, fixe à 88 millions le montant de l'enveloppe affectée chaque année aux Régions par France compétences afin de financer les dépenses de fonctionnement des CFA. Soit une diminution de 36 %, répartie uniformément entre les Régions, par rapport au montant fixé depuis 2019 à 138 millions d'euros.
Des mesures d'économies à arbitrer
Face à l'obligation de procéder à des mesures d'économies, le ministère du Travail a procédé à des arbitrages. Dans un courrier du 2 mai de la ministre Catherine Vautrin à Carole Delga, présidente de Régions de France, annonçant cette baisse, il est ainsi précisé que la seconde enveloppe affectée aux Régions, pour financer les dépenses d'investissement des CFA (180 millions d'euros), est préservée. Reste que pour l'enveloppe dédiée au financement du fonctionnement des CFA, dont le principe n'est cependant pas remis en cause, la diminution s'avère non négligeable. Le niveau des économies réalisées peut avoir été motivé par l'utilisation par les Régions de ce budget. C'est le cas du financement de certaines dépenses (par exemple de promotion de l'apprentissage) éloignées de l'objectif initial de majoration de la prise en charge des contrats d'apprentissage, pour corriger des cas où les niveaux de prises en charge (NPEC) s'avèreraient trop faibles. Depuis ses débuts, cette enveloppe de fonctionnement est aussi globalement sous-consommée. Une situation qui a amené l'Etat à accepter de mettre en place depuis 2022 un mécanisme de fongibilité des ressources dédiées au « fonctionnement » vers celles « d'investissement ».
Colère des Régions, sur le fond comme sur la forme
Du côté des Régions, la baisse a été très mal accueillie. « Cette décision est injustifiée et scandaleuse. Alors que la réforme de l'apprentissage ne fonctionne pas et se fait à coup de déficits, on vient menacer l'investissement public dans les CFA », réagit David Margueritte, vice-président de la Région Normandie et président délégué de la commission « formation » de l'association Régions de France. L'élu régional rappelle en effet que les Régions peuvent, grâce au mécanisme de fongibilité, affecter jusqu'à 80 % des ressources de l'enveloppe de fonctionnement pour investir dans des établissements. « Sans compter qu'avec la baisse des NPEC, l'enveloppe de fonctionnement pourrait se révéler d'autant plus utile », ajoute-t-il. David Margueritte est aussi en colère sur la forme qu'a pris cette baisse de ressources, qui s'est faite sans consultation préalable. « Le gouvernement a franchi un nouveau cap dans son mépris à l'égard des Régions », estime-t-il. Mais le problème principal reste le calendrier, la décision faisant irruption brutalement et en plein exercice budgétaire. « Les Régions ont pris des engagements que l'Etat nous empêche de tenir. Les CFA doivent savoir que des décisions de financement, de fonctionnement ou d'investissement, ne pourront pas être tenues », avertit celui-ci. Il rappelle en outre que le soutien régional bénéficie en particulier à des CFA ruraux. Dans un courrier adressé au Premier ministre, Carole Delga a exigé que la baisse soit reportée au prochain exercice budgétaire des Régions. Le conseil d'administration de France compétences ayant déjà acté la mesure et le versement des sommes aux Régions devant avoir lieu avant le 1er juin, il est cependant peu probable que cette requête aboutisse.