Apprentissage : la Cour des comptes estime « indispensable » d'engager la baisse du soutien de l'État
Dans une revue de dépenses rendue publique jeudi 9 janvier, la Cour des comptes appelle de nouveau à un recentrage des aides sur les formations des niveaux 3 et 4 dans un souci d'économies budgétaires.
Par Sarah Nafti - Le 10 janvier 2025.
« L'amplification des aides dans le contexte post-crise sanitaire n'est plus soutenable », estime la Cour des Comptes dans une revue de dépenses publiée jeudi 9 janvier. Le coût du soutien public à l'apprentissage « devrait être du même ordre de grandeur en 2024 qu'en 2023 », soit 16,5 Md€ dont 7,5 Md€ portés par le budget de l'État et 8,7 Md€ par France compétences. Or cette politique a mené à « une extension du champ des bénéficiaires et une dégradation de leur ciblage, au bénéfice de publics qui en ont moins besoin ».
Recentrage des aides
La Cour des comptes juge « indispensable » d'engager la baisse du soutien de l'État et appelle d'abord à « un recentrage des aides sur les formations des niveaux 3 et 4 ». En effet, la Cour remarque que l'objectif annuel du million d'apprentis « ne figurait pas dans la loi du 5 septembre 2018 » et repose désormais essentiellement sur l'enseignement supérieur. Les étudiants représentaient 33,9% des nouveaux contrats en 2015 contre 61,4% en 2023. « Cette évolution conduit à mobiliser l'aide de l'État pour des publics qui rencontrent pourtant moins de difficultés d'accès à l'emploi. » A contrario, le nombre d'apprentis préparant des diplômes du secondaire, pour lesquels l'apprentissage favorise le mieux l'insertion, n'a que peu augmenté. La Cour propose de renvoyer les étudiants vers les contrats de professionnalisation, « moins onéreux pour les finances publiques ».
Restriction du périmètre des aides
L'autre levier sur lequel la Cour suggère d'agir est le niveau d'aide à l'embauche. Le maintien de l'aide à l'embauche de 6000 euros a coûté, en 2023, 3,2 Md€ et devrait atteindre près de 3,9 Md€ en 2024. La Cour suggère de restreindre son périmètre à celui de l'avant crise : seuls seraient éligibles les apprentis des niveaux 3 et 4 et les entreprises de moins de 250 salariés. Et elle propose de revenir aux conditions de l'aide unique de 2019, dégressive (4 125€ la première année, 2000 € la deuxième année et 1200 euros la troisième année). Les économies attendues, si ce scénario était retenu, sont estimées à 745 M€ en 2025, 2 936 M€ en 2026 et 2 857 M€ à horizon 2027.
Baisse du niveau de prise en charge ?
Parmi les autres pistes explorées figure la baisse du niveau de prise (NPC° en charge des formations : au vu de l'augmentation du nombre de contrats, le financement des CFA à l'activité « a dégradé structurellement la situation financière de France compétences ». L'opérateur a bénéficié d'une subvention exceptionnelle de 1,8 M€ en 2023, qui devrait atteindre 2,3 Md€ en 2024.Le déficit cumulé atteint 10,52 Md€. La Cour souhaite que « les niveaux de prise en charge soient redéfinis au plus près du coût de revient des diplômes », alors que France compétences estime que 36 % des NPC, représentant 44 % des contrats, sont encore supérieurs aux coûts de référence. La Cour propose aussi de plafonner les niveaux de prise en charge des contrats pour les diplômes de niveau 6 et 7 (7 695 € pour le niveau 6 et 8 486 € pour le niveau 7) et de prévoir un reste à charge pour les employeurs. Ce scénario représenterait une économie estimée à 255 M€ par an dès 2025.