UHFP 2025, table ronde transition écologique, le 23 janvier 2025.

Transition écologique : sans déclinaison locale, pas d'effectivité !

Peu de créations de métiers jusque-là inconnus, mais de nombreuses nouvelles compétences à acquérir et des emplois qui se transforment. Cet impact de la transition écologique est désormais connu. Mais au-delà de ce constat général, une prise en compte des enjeux locaux et une action concertée des acteurs territoriaux de l'emploi et de la formation s'impose. C'est le constat dressé lors d'une table ronde à l'Université d'hiver de la formation professionnelle, jeudi 23 janvier.

Par - Le 24 janvier 2025.

Près de trois millions. C'est le nombre d'actifs qui devront être formés d'ici à 2030 dans les secteurs clé de la planification écologique. Cette même transition devrait conduire à la création de 150 000 emplois d'ici à 2030. Précisément, autour de 100 000 créations nettes d'emplois sont attendues.

Ces trois chiffres ont été établis par France Stratégie, dans le cadre de sa stratégie emplois et compétences. Et rappelés par Eva Tranier, sa responsable du réseau emplois et compétences à l'Université d'hiver de la formation professionnelle, le 23 janvier, au cours d'une table ronde intitulée « la nécessaire coopération territoriale pour répondre à la transformation des métiers : l'exemple de la décarbonation ».

Une coopération d'autant plus indispensable que la transition écologique est « vitale » et « induit un effort » économiquement coûteux, a souligné d'entrée de jeu Catherine Beauvois, directrice du programme compétences 4.0 et accompagnement des mutations économiques de France Travail. C'est à ses yeux une des spécificités de cette transition, perçue comme plus contraignante qu'attrayante, à la différence de l'autre importante transition en cours, numérique celle-là.

Se doter d'une « vision d'ensemble »

L'opérateur du service public de l'emploi a choisi d'aborder cette nécessaire prise en compte des enjeux environnementaux dans les métiers de demain notamment au travers de sa réforme du Rome (Répertoire opérationnel des métiers et des emplois). Sur les 2 000 fiches attendues d'ici la fin de l'année, certaines concerneront directement des métiers dits verts, autour de la réduction des déchets par exemple. D'autres seront consacrées à des métiers stratégiques pour la planification écologique sans être qualifiés de verts pour autant, à l'image des réparateurs de vélo en lien avec le développement des mobilités douces ou même des soudeurs, fort sollicités par exemple pour fabriquer les palmes des éoliennes. Ce Rome nouvelle mouture sera complété par un observatoire des emplois et des compétences, porté par le réseau Carif-Oref, bâti en partenariat avec France Travail. Il devrait être mis à disposition d'ici l'été, selon Catherine Beauvois. Et permettre de lier les données du marché de l'emploi, de l'éducation, de la formation… Pour une vision encore plus large des enjeux.

Or, « se doter d'une vision d'ensemble, construite de manière collégiale », en « produisant des analyses systémiques », voilà un préalable indispensable à une bonne préparation aux métiers et compétences de demain, en lien avec la transition écologique, selon Eva Tranier.

Sans coloration territoriale, pas d'efficience

Mais pour être opérationnels, ces exercices prospectifs doivent se voir déclinés sur le plan régional. C'est ce qu'a illustré Philippe Delhoume, directeur de la formation, de l'orientation et des parcours professionnels de la Région Sud. Ainsi l'institution a-t-elle demandé aux organismes de formation de développer des « modules de compétences climat ». Et elle a aussi exigé des « plans de progrès », pour favoriser leur propre transformation, leur propre avancée sur le chemin de la transition écologique. Pour les soutenir dans cette démarche, la Région a initié un fonds d'innovation formation, pour leur permettre d'expérimenter des programmes.

Les entreprises, elles aussi, doivent être accompagnées sur le chemin de leur décarbonation. Là encore, la maille locale est apparue adaptée. Ainsi la directrice régionale de l'Opco 2i (secteur de l'industrie), Sandra Couinaud, a-t-elle expliqué le rôle de son organisation dans l'aide des employeurs à identifier leurs besoins en formation et compétences. Et ensuite sur la façon de les acquérir.

« Ne rien lâcher »

Dans ce cadre, Ludovic Bertrand, directeur du Réseau des Carif-Oref (RCO), a souligné la nécessité de soutenir les organismes de formation pour qu'ils repensent leurs certifications, pour les adapter aux besoins réels des entreprises. Quitte à supprimer ce qui semblerait décalé. Autre point d'attention des Carif-Oref, la réalisation d'une cartographie des plateaux techniques, à l'échelle locale. Car sans cet outil, certaines des formations ne peuvent pas être mises en œuvre.

Reste que tous ces engagements requièrent des fonds. Or, a souligné Catherine Beauvois, « le contexte budgétaire est compliqué, et le contexte international aussi ». « Mais il ne faut rien lâcher ! » Aussi, pour contourner l'obstacle, a-t-elle invité à s'appuyer sur l'idée de souveraineté « dans l'air du temps », davantage que la transition écologique dans la bouche de certains politiques. Puisque, a-t-elle argumenté, ce qui sert la transition écologique peut aussi soutenir la souveraineté, à l'instar du recyclage, qui peut sécuriser des approvisionnements