Les pistes des partenaires sociaux pour sécuriser davantage l'apprentissage
Inciter les entreprises à embaucher les jeunes après leur formation, développer les prépa-apprentissage, soutenir les contrats en cours : devant les députés de la Commission des affaires sociales, organisations syndicales et patronales ont fait des propositions pour aller plus loin dans la relance de l'apprentissage.
Par Estelle Durand - Le 01 juillet 2020.
Sur le principe, elle répond à leurs attentes. Mais dans le détail ce n'est pas tout à fait la configuration qu'ils avaient imaginée. Auditionnés le 24 juin par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, les partenaires sociaux [ 1 ]CFDT, CFTC, CGT, CPME, Medef, U2P., ont pointé les limites et les risques de l'aide exceptionnelle à l'embauche présentée par le gouvernement le 4 juin dans le cadre du plan de relance de l'apprentissage.
Certaines organisations auraient souhaité qu'elle s'applique à tous les niveaux de diplôme mais aussi qu'elle soit étendue aux contrats de professionnalisation. Sur ce dernier point, leur demande devrait être entendue dans le cadre du futur plan de soutien à l'emploi des jeunes. Du côté patronal, le Medef regrette par ailleurs que la prime soit conditionnée à un quota d'alternants pour les entreprises de plus de 250 salariés. « Vu la violence de la crise, l'échéance de 2021 pour atteindre les 5 % d'alternants est trop proche », considère Marie-Christine Oghly du Medef. Les organisations syndicales comme la CGT ou la CFTC, auraient, au contraire, souhaité que l'aide à l'embauche d'apprentis soit assortie d'engagements en faveur de l'emploi afin d'éviter les effets d'aubaine.
Recruter après la formation
Pour amplifier et pérenniser les effets du plan de relance de l'apprentissage, des mesures complémentaires pourraient être envisagées. Marie Dupuis-Courtes de la CPME suggère ainsi de mettre en place un « bonus » pour les entreprises qui dépassent leur quota d'apprentis ou embauchent davantage de jeunes que les années précédentes. Alain Griset, président de l'U2P, préconise, quant à lui, de soutenir les employeurs qui embauchent les apprentis une fois leur formation terminée. Une mesure qui permettrait de sécuriser davantage le parcours des jeunes. Dans cette logique, Maxime Dumont, de la CFTC évoque aussi la possibilité de financer, via les contributions volontaires, des formations complémentaires qui permettraient aux apprentis de renforcer leur employabilité.
Conçue pour inciter les employeurs à signer de nouveaux contrats d'apprentissage, l'aide financière décidée par le gouvernement ne résout pas les difficultés que pourraient rencontrer les apprentis actuellement en poste. Craignant une hausse des ruptures de contrat, Alain Griset, président de l'U2P, milite pour une « prise en charge de la rémunération des apprentis applicable aux contrats en cours, pendant un an ».
Développer les prépas-apprentissage
Lors de leur audition, les partenaires sociaux ont par ailleurs souligné l'intérêt des prépa-apprentissage. Financés par le plan d'investissement dans les compétences (PIC), dans le cadre d'appels à projets, ces « sas » qui permettent de sécuriser l'entrée des jeunes en apprentissage et de réduire les risques de rupture devraient, selon eux, être davantage mobilisés à l'avenir. Pour ce faire, Yvan Ricordeau de la CFDT suggère de renforcer les crédits du PIC alloués à ce dispositif. La CPME estime de son côté que les CFA devraient pouvoir déployer ces prépas à plus grande échelle sans passer par des appels à projets.
Accompagner les CFA
La situation des CFA (centres de formation d'apprentis) a aussi été évoquée devant les députés. Leurs revenus étant directement liés au nombre d'apprentis formés, certains établissements pourraient se retrouver en difficulté en cas de baisse des effectifs. Sans compter les frais liés aux mesures sanitaires à mettre en place (achats d'équipement de protection, éventuels dédoublements de classes, etc.) et les investissements à poursuivre en matière de formation à distance. Dans ce contexte, Angeline Barth de la CGT milite pour une remise à plat complète du système de financement, tandis que les autres organisations plaident pour des ajustements.
Ainsi, l'U2P préconise de revoir à la hausse les « coûts-contrats » et d'augmenter les dotations allouées aux Régions pour soutenir les CFA les plus fragiles, notamment ceux implantés dans les zones rurales. La CPME, quant à elle, suggère d'encourager davantage l'innovation dans le cadre du PIC et des pactes régionaux. L'enveloppe mobilisée par France compétences (5 millions d'euros) pour soutenir les investissements des CFA souhaitant développer leur offre de formation devrait également être renforcée, selon Marie Dupuis-Courtes. Des marges de manœuvre pour faire bouger les curseurs existent, considère pour sa part Yvan Ricordeau : « Si on s'aperçoit qu'il y a des difficultés dans une branche ou une autre, une révision des coûts-contrats est possible. »
Notes
1. | ↑ | CFDT, CFTC, CGT, CPME, Medef, U2P. |