2è édition de la Rentrée de l’apprentissage du 18 novembre 2019
Apprentissage : un marché concurrentiel qui offre aussi des occasions de partenariats
L'ouverture du marché de l'apprentissage donne aux entreprises la possibilité de s'impliquer directement dans la formation de leurs apprentis en créant leur CFA. Ce marché concurrentiel crée aussi des opportunités de coopération inédites.
Par Estelle Durand - Le 20 novembre 2019.
Les lignes bougent sur le front de l'apprentissage. Une soixantaine d'entreprises se sont déjà emparées de la possibilité offerte par la « loi avenir professionnel » de créer leur centre de formation d'apprentis (CFA). Et d'autres projets devraient émerger comme en témoignent les acteurs qui participaient à une table ronde organisée lundi 18 novembre par l'Association nationale des apprentis de France (Anaf) dans le cadre de la 2è édition de « la Rentrée de l'apprentissage ».
L'Opcommerce, par exemple, accompagne aujourd'hui une vingtaine d'entreprises dans leurs réflexions sur le sujet. Carrefour en fait partie. L'enseigne de la grande distribution envisage de se lancer dans la formation d'apprentis. Objectif : « développer l'apprentissage et répondre à nos problématiques de recrutement dans les métiers de bouche », explique Véronique Mort, directrice formation de Carrefour France.
Appui des opérateurs de compétences
Le groupe s'est tourné vers son opérateur de compétences pour évaluer la faisabilité de son projet et arbitrer entre plusieurs configurations : création d'un CFA ou association avec des acteurs existants. Une fois la décision prise, l'opérateur de compétences continuera à guider l'entreprise dans son projet. « Si elle souhaite créer sa propre structure de formation, nous l'aiguillerons vers des experts que nous avons référencés », explique Émilie Marchand, directrice de l'offre de services et innovation de l'Opcommerce. Si l'entreprise préfère s'appuyer sur des tiers, l'opérateur l'aidera alors à identifier des partenaires potentiels. Pour ce faire, l'Opcommerce a mis en place une cartographie des offres de formation en alternance dans le secteur du commerce.
Compétition et collaboration
Avec la réforme, les CFA existants se retrouvent face à de nouveaux concurrents. Mais l'ouverture du marché leur offre aussi la possibilité de s'inscrire dans des partenariats structurants. Le groupe Adecco aborde la formation en apprentissage avec deux stratégies différentes. Il vient ainsi de lancer son propre CFA des métiers du recrutement. Un projet qui répond à des enjeux « d'élargissement de nos capacités de recrutement en alternance mais aussi de transformation de nos métiers en interne », explique Renaud Damesin, directeur du développement des projets d'Adecco Group. Mais dans le domaine des métiers de la cuisine, le groupe a choisi de s'inscrire dans une logique de partenariat. Le CFA qu'il pilote avec d'autres entreprises s'appuiera au niveau opérationnel sur un réseau de prestataires de formation. Dans cette configuration de CFA « hors les mur », ces partenaires auront pour mission de proposer des contenus de formation répondant aux besoins des employeurs associés afin de renforcer l'attractivité des métiers.
Concurrence vertueuse
Créer sa propre structure permet de se doter d'une solution de formation adaptée à ses enjeux mais représente aussi un investissement important. Se pose notamment la question de l'implantation du CFA et de la déclinaison de l'offre dans les territoires. « Tout ne peut pas s'envisager sur la base d'un CFA centralisé », souligne Patrice Guézou, directeur général de Centre Inffo. À ce stade, « les projets qui commencent à émerger s'orientent plutôt vers un modèle de CFA « hors les murs » où les entreprises pilotent l'expression des besoins et s'associent des partenaires qui leur apportent des solutions », constate Guillaume Houzel, inspecteur général de l'éducation, du sport et de la recherche.
Qu'ils soient nouveaux entrants ou acteurs déjà existants, tous les CFA évoluent désormais dans un marché devenu plus concurrentiel et sont soumis à un nouveau modèle de financement. Avec la généralisation du niveau de prise en charge, « certains acteurs vont se retrouver davantage contraints sur le plan financier et vont devoir entrer dans des logiques de rationalisation » estime Patrice Guézou. À l'avenir, la compétition va se jouer en termes d'efficacité, de qualité mais aussi de façon de faire, considère Renaud Damesin, d'Adecco Group. Modalités pédagogiques, contenus des formations, façons d'enseigner, résultats en termes d'insertion : la concurrence, selon lui, va aussi inciter à améliorer ses pratiques et à innover pour se démarquer.