La nouvelle loi formation-orientation définitivement adoptée

Par - Le 16 octobre 2009.

Le projet de loi “ relatif à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie" - passé en commission mixte paritaire du 6 octobre - a été voté définitivement par l'Assemblée nationale dans la nuit du 13 au 14 octobre. La promulgation de la loi n'interviendra cependant pas dans les prochains jours, car un recours devant le Conseil constitutionnel a été déposé par des sénateurs de l'opposition sur l'article 53 (transfert des personnels chargés de l'orientation de l'Afpa).

Devant l'Assemblée, le secrétaire d'État chargé de l'Emploi, Laurent Wauquiez, a souligné que le texte représentait une “avancée décisive" en direction d'une sécurité sociale professionnelle. “Il fallait rompre avec la « balkanisation » : le nombre des Opca sera réduit à une quinzaine." Il s'est félicité du meilleur contrôle qu'instaure la loi, notamment sur l'activité des sectes dans le champ de la formation. Estimant aussi que le texte “représente une bonne articulation entre démocratie sociale et démocratie parlementaire : il reprend les grandes bases de l'Ani du 7 janvier 2009 négocié par les partenaires sociaux et les parlementaires ont réalisé des apports fondamentaux sur les angles morts de cet accord".

Par ailleurs, Laurent Wauquiez a proposé d'organiser une séance de travail entre les parlementaires qui se sont fortement impliqués dans le projet de loi et les partenaires sociaux.

Mais pour le député Jean-Patrick Gille (Indre-et-Loire, groupe Socialiste, radical, citoyen et divers gauche), le texte ne reprend pas l'Ani, et “on glisse du paritarisme à une forme de tripartisme. Il ne règle pas les grandes questions comme le pilotage de la formation professionnelle, voire il la rend plus complexe, avec les partenaires sociaux qui s'investissent désormais dans la formation des demandeurs d'emploi". Il s'est déclaré surpris que la loi ne comprenne aucune référence à la “stratégie de Lisbonne".

Jean-Paul Lecoq (Seine-Maritime, groupe Gauche démocrate et républicaine) est déçu à plusieurs titres : “L'Ani n'est pas repris, notamment certains salariés ne bénéficieront pas de la portabilité du Dif, le droit à la formation différée n'a pas été retenu." Surtout, le texte “entraîne la destruction du service public de l'emploi avec le transfert des personnes de l'orientation de l'Afpa vers Pôle emploi et le transfert du patrimoine immobilier vers l'association : plus qu'un symbole, c'est un affront", juge le député. Considérant quant à lui que le texte s'inscrit bien dans la stratégie de Lisbonne : “Avant tout fournir au marché une main d'œuvre opérationnelle."

Francis Vercamer (Nord, Nouveau centre) a jugé que le texte respectait l'Ani sur de nombreux points (portabilité du Dif, élargissement du passeport formation, etc.). Il a cependant regretté que le droit à la formation initiale différée n'ait pas été repris.

Claude Goasguen (Paris, UMP) s'est interrogé : que restera-t-il du texte dans quelques années ? “La prise en considération de la crise, l'adaptation de la formation à l'emploi". Mais “hors crise ?" Regrettant le retour de l'État dans un secteur qu'il croyait définitivement acquis à la décentralisation, il souhaiterait qu'on puisse revenir à une conception décentralisatrice. Parallèlement il a relevé des points positifs sur les Opca, “où l'argent de la formation fondait comme neige au soleil" et où le travail de transparence a commencé.

Michel Issindou (Isère, groupe SRC) a déclaré que certains points ne lui paraissaient pas acceptables : le texte fait preuve à son sens “d'une défiance vis-à-vis des partenaires sociaux et l'État pourra par décret définir les grandes orientations et les grands choix du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels". Même chose pour les Opca. En outre, les Régions se voient “dépouillées de leurs compétences". Pour le député, c'est un retour de l'État qui ne lui semble pas de bon augure, avec un copilotage à tous les niveaux qui débouchera “sur une gouvernance improbable".

Alain Rousset - député de Gironde (groupe SRC) et par ailleurs président de l'Association des Régions de France - a rappelé la procédure de concertation qui a précédé le projet de loi. S'il s'est déclaré en accord sur les enjeux (égalité des chances, meilleure compétitivité des entreprises) et sur certaines avancées, il s'est demandé pourquoi le texte n'avait pas repris l'ensemble de l'Ani, notamment le “droit à la formation différée". Il a notamment suggéré la création d'un “Observatoire de l'apprentissage et de la formation professionnelle" qui aurait une triple tâche : l'évaluation des politiques de formation, un rôle d'impulsion et de réorientation. Finalement, le texte, à son avis, représente “un recul flagrant pour les partenaires sociaux et les Régions. Que reste-t-il de la gouvernance, essentielle à l'efficacité ?" Car “l'État veut tout faire : être ordonnateur et acteur sur le terrain, régleur de normes et acteur territorial, alors que les Régions ont créé les compétences et les services". Il est très déçu que la CMP ait repris la transformation du PRDF en contrat de plan - “c'est un recul et c'est inefficace". Et d'ajouter : “Un contrat de plan, c'est 50/50. Quels moyens l'État mettra-t-il ?" Pour le président de l'ARF prend date : “La réforme est passée à côté d'un enjeu essentiel : quel est l'opérateur, quelle est la gouvernance ? Il faudra y revenir", conclut-il.

[(L'amendement du gouvernement sur les apprentis sans contrat de travail

Cet amendement, qui a été adopté, encadre les conditions de l'accueil des apprentis sans contrat d'apprentissage : il se fera sur la base du volontariat pour les CFA ; la période est réduite à deux mois (au lieu de quatre au Sénat). Il s'agit d'une expérimentation limitée à un an (jusqu'au 31 octobre 2010). Une évaluation de cette mesure sera réalisée par les parlementaires (deux députés et deux sénateurs).)]