Languedoc-Roussillon : la GPEC territoriale au cœur de la IVe Université d'été “Emplois, compétences et territoires" de Montpellier
Par Agathe Descamps - Le 16 septembre 2010.
Au cœur de la rencontre, deux thèmes principaux : les seniors et la GPEC territoriale. Plus de trois cents personnes se sont réunies les 25, 26 et 27 août à Montpellier pour assister à l'Université d'été organisée par la Direccte Languedoc-Roussillon et la Fondation Entreprendre de l'Université de Montpellier-I.
Grande nouveauté cette année, “nous avons invité des acteurs nationaux de l'emploi et de la formation afin d'échanger les uns les autres sur nos expériences", comme s'en est félicité Alain Soussen, chef du service mutations économiques de la Direccte.
Au plan local, un accord-cadre Edec de territoire pour le Pays de Corbières-Minervois a été signé lors de la première journée (voir l'entretien).
En Languedoc-Roussillon, une GPEC territoriale est mise en place depuis début 2008, et se décline dans les différents pays de la région. Mais quelles sont les clés du succès d'une “GPECT" ? Quels principes respecter ? Les GPECT fonctionnent-elles dans les Pôles de compétitivité ? Des questions auxquelles ont répondu les intervenants d'un atelier sur la sécurisation des parcours professionnels. Quand on parle de GPEC, “il faut se demander quels sont les objectifs et se rendre compte que c'est une démarche volontaire qui a des conséquences collectives", a rappelé Geneviève Saint-Genieis, consultante en ressources humaines et ancienne directrice de la valorisation du capital humain du groupe Ricoh. La clé, pour la consultante, est “la communication, afin d'éviter que les gens prennent la GPEC comme un "flicage"". Enfin, la GPEC amène à une responsabilisation dont le pilier est la DRH. L'importance des partenaires sociaux et le fait qu'elle demande du temps ont également été soulignés.
Ces bases étant posées, comment passe-t-on à une GPECT ? Frédéric Bruggeman, directeur des mutations économiques au sein du groupe Amnyos, l'a reconnu : ces mutations “posent de nombreuses questions", et “la GPEC, dans la pratique, concerne essentiellement des grandes entreprises". Toutefois, il a relevé un point commun fondamental : “GPEC ou GPECT, il est question de trajectoire. Les partenaires, qu'ils travaillent dans l'entreprise ou au sein d'un territoire, s'accordent sur le fait que la prévision est essentielle dans une économie en mouvement." Mais pour Frédéric Bruggeman, une GPECT doit “obligatoirement être portée par un ensemble d'acteurs". La question des compétences transversales et la mise en place de l'évaluation de la GPECT sont également essentielles pour celui qui a rappelé qu'il n'existait “pas de dispositif d'entrée dans la GPECT pour les précaires".
Isabelle Menant, chef de projet GPEC territoriale à la Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) a expliqué, quant à elle, pourquoi l'État promeut la GPECT. “Les entreprises de plus de 300 salariés ont une obligation légale d'organiser une GPEC, mais n'est pas toujours effectif. En outre, ces GPEC sont limitées à un espace clos, celui d'une entreprise ou celui d'une branche. Or, les mobilités des salariés, consenties ou non, sont réelles et doivent donc être accompagnées." La représente de la DGEFP a reconnu que “la crise a servi la cause de la GPECT, car il est souvent très difficile de se déplacer d'un territoire à un autre en raison d'un bien immobilier, du travail du conjoint, etc." Mais attention à l'effet de mode, a-t-elle prévenu : “L'intérêt pour les entreprises est de comprendre la logique globale du territoire. Même si les chefs de PME disent souvent ne pas connaître leur devenir à trois mois, ils doivent apprendre à l'appréhender grâce à leur connaissance du secteur, des compétences, etc." Certes, les PME sont parfois frileuses, “car elles sont en réalité conscientes qu'il est possible d'anticiper". Or, “mieux vaut payer une formation à une personne quand elle est salariée plutôt que lorsqu'elle est au chômage, car elle préfère alors retrouver un emploi que d'investir du temps pour se former".
RHÔNE-ALPES
LA GPECT dans les Pôles de compétitivité
Ludivine Calamel et Ingrid Mazzilli, doctorantes et enseignantes en sciences de gestion à l'Université de Grenoble (Cerag), ont présenté - à l'occasion de la de la IVe Université d'été à Montpellier - leur étude[ 1 ]Contact : ludivine.camalel@iae-grenoble.fr, mandatée par la Région pour étudier les pratiques RH. sur la mise en place d'une GPECT dans des Pôles de compétitivité en Rhône-Alpes. Douze Pôles ont ainsi été suivis pendant deux ans. 17 entretiens ont été réalisés au printemps 2009 et une vingtaine au printemps 2010. Trois d'entre eux ont été présentés.
En Haute-Savoie, Arve Industrie[ 2 ]Fabrication de petites pièces métalliques. est composé de TPE et PME implantées depuis longtemps sur le territoire. Ce Pôle a lancé un programme intitulé “Talents 2010", dont le but était la valorisation des métiers d'industrie, la mise en place d'une GPECT, et la constitution d'un intranet. Le deuxième Pôle, Minalogic, spécialisé dans les micro et nanotechnologies et situé à Grenoble, a organisé la mise à disposition des salariés d'une entreprise vers un centre de recherche public. 55 salariés ont ainsi été “mutés " pendant dix-huit mois, ce qui a permis, en période de crise, d'alléger la masse salariale de l'entreprise. Enfin, Viameca, Pôle spécialisé dans l'industrie de la mécanique, met en place le programme “Vis ma vie", qui va permettre aux enseignants chercheurs d'échanger leur poste avec des chefs d'entreprises.
L'étude montre que “la mutualisation des données reste difficile à réaliser". En outre, “s'il est souvent question de compétences, en réalité peu d'études qualitatives sont réalisées", ont affirmé les deux chercheuses. Leur travail a également pointé une absence de stratégie RH globale dans les Pôles de compétitivité et enfin, pour la plupart d'entre eux, “des plans de communications très peu développés".
“Les Pôles travaillent sur la création d'outils, mais peu sur des processus sociaux", a précisé Ludivine Calamel. Deux autres points ont été soulignés : l'approche “top-down", qui ne permet pas à tous d'être impliqués, et, enfin, une paradoxale vision à court terme. Afin de développer une GPECT, pour les deux chercheuses, “il est nécessaire de distinguer les différents niveaux RH et de désigner un animateur territorial avec un rôle précis". Et d'interroger : “Pourquoi vouloir à tout prix créer des nouveaux outils quand d'autres existent déjà, et que les Pôles pourraient tout simplement mettre en musique ?"
CIRCULAIRE DU 29 JUIN RELATIVE AU DÉVELOPPEMENT DE LA DYNAMIQUE TERRITORIALE DE LA GPEC
Lors de la de la IVe Université d'été à Montpellier, la chef de projet GPEC territoriale de la DGEFP, Isabelle Menant, a évoqué la récente circulaire signée par les ministres chargés de l'Économie, de l'Industrie, du Travail et de l'Emploi. Énonçant clairement que “la GPECT n'est pas l'affaire de l'État, qui n'a rien à imposer et a le même poids que les autres partenaires". Elle a aussi reconnu qu'il était “primordial que l'animation d'une GPECT se fasse au niveau territorial", et donc par les Direccte, qui doivent s'organiser avec l'échelon régional et départemental et animer le réseau. Afin de rassurer les instances locales, Isabelle Menant a souligné qu'il était “hors de question de venir sur le terrain de la Copire". L'État ne devant pas déterminer de modèle, “chaque territoire aura une GPECT différente".
Notes
1. | ↑ | Contact : ludivine.camalel@iae-grenoble.fr, mandatée par la Région pour étudier les pratiques RH. |
2. | ↑ | Fabrication de petites pièces métalliques. |