Reconnaissance au travail : c'est la culture d'entreprise qui prime

Par - Le 01 janvier 2011.

“Mon expérience de DRH m'a montré que la reconnaissance, sur le plan humain, était un signe de performance durable des entreprises et ce, de manière universelle, qu'importe la culture géographique." Ancien directeur des ressources humaines de plusieurs sociétés internationales (Yoplait, Schlumberger, Compass Group, etc.) Christophe Laval, président du cabinet de conseil VPHR (Vision, performance, humain, reconnaissance), a eu l'occasion de constater les effets de la reconnaissance manifestée par les managers sur la qualité du travail des collaborateurs des entreprises sur plusieurs continents.

Auteur de Plaidoyer pour la reconnaissance au travail, ce spécialiste de la “professional recognition" et, par ailleurs enseignant à l'Université Laval, de Québec, était l'un des invités du colloque “Globalisation et développement des compétences", organisé par le Garf le 1er décembre dernier, afin de faire le bilan d'une étude sur la reconnaissance professionnelle aux États-Unis, en France et au Canada.

Ce sont 684 entreprises qui ont été sondées par les équipes de VPHR. “Nous avons constaté de grandes disparités culturelles en termes de valorisation des collaborateurs au travail, ce qui est, somme toute, logique. Nous avons pu en déduire que globalement, par exemple, si les Québécois sont très américains en termes de performances et d'objectifs de travail, ils demeurent très européens sur le plan de la reconnaissance au travail."

Trois façons de concevoir le “travailler ensemble"

Afin d'établir cette enquête, Christophe Laval s'est basé sur les typologies développées par Jean-Pierre Brun, spécialiste du bien-être au travail et titulaire d'une chaire à l'Université Laval. Au nombre de quatre, ces dernières concernent la reconnaissance existentielle (“suis-je reconnu en tant qu'individu ?"), la reconnaissance par les pratiques de travail, la reconnaissance par les résultats obtenus et, enfin, la reconnaissance issue de l'investissement dans le travail.

“La culture d'entreprise a bien plus d'impact sur les individus que la culture géographique, a souligné Christophe Laval. Ainsi, aux États-Unis, si 90 % des entreprises sondées indiquent mettre en place une procédure de reconnaissance, 60 % de leurs collaborateurs estiment ne pas être reconnus ! Quant à la reconnaissance proprement dite, 70 % des salariés français estiment qu'elle doit se manifester par des primes ou des bonus, en termes financiers, alors que seulement 50 % des salariés américains pensent la même chose."

La raison de ces différences ? “Elles proviennent essentiellement du système éducatif, a estimé Christophe Laval. Alors qu'en France, nous avons une culture du contrôle et de la sanction, aux États-Unis et au Québec, la culture tend davantage vers la délégation. Sans oublier notre culte du diplôme national ! A l'ouest de l'Atlantique, les dispositifs diplômants équivalents à la VAE permettent de valoriser l'expérience et la capacité à travailler en équipe, alors qu'à l'est, le processus de validation des acquis de l'expérience est généralement observé avec méfiance".

Trois manières de considérer la reconnaissance dans l'entreprise, trois systèmes différents. “Nous avons tous nos valeurs, a observé Christophe Laval, et, au final, chaque système présente ses inconvénients et ses défauts. Les salariés français sont 46 % à reconnaître leurs difficultés à admettre la souffrance au travail, alors que seuls 28 % des nord-américains sont dans cette situation. En revanche, 55 % des travailleurs américains avouent manquer de temps pour effectuer leurs tâches, contre 49 % des canadiens et seulement 33 % des français. Chaque modèle présente des spécificités en matière de « travailler ensemble »".