Une Licence Pro « Enquêteur technologies numériques » destinée aux cyber-gendarmes

Par - Le 01 février 2011.

"Les Experts" ne sont pas les seuls représentants des forces de l'ordre confrontés à une cybercriminalité galopante et toujours à la pointe des nouvelles technologies. En dépit des restrictions budgétaires que connaît la gendarmerie nationale, la lutte contre la cybercriminalité, elle, ne saurait s'offrir de pause. « Il faut nous habituer à faire mieux avec moins », résume Louis-Joseph Brossollet, directeur du service formation continue de l'Université de technologie de Troyes (UTT), laquelle a mis en œuvre une Licence professionnelle « Enquêteur technologies numériques » (NTech) s'adressant aux gendarmes enquêteurs , en coopération avec la Direction générale de la gendarmerie nationale. La première promotion a été sélectionnée par le jury d'admission et comprendra, au total, 24 étudiants-gendarmes. La formation en elle-même se déroulera sur un an et débutera à la mi-janvier 2011.

« Les compétences visées par cette Licence Pro sont, entre autres, l'analyse des supports numériques, l'intervention chez un particulier ou une entreprise, le conseil technique auprès des magistrats (et notamment des juges d'instruction) et la participation à l'enquête judiciaire », indique Louis-Joseph Brossollet. « Ainsi, par exemple, en cas de détention de photographies de nature pédophile, il est nécessaire aux enquêteurs de pouvoir prouver l'existence de ces photos délictuelles sur un support numérique et ce, lors des 24 heures de garde à vue, même si ces dernières ont été effacées ». Autre thématique prise en compte par cette Licence professionnelle : l'internationalisation croissante des métiers d'enquêteurs NTech pour lesquels les officiers de police judiciaire français sont amenés à travailler avec leurs homologues étrangers. Pour le directeur du service formation continue de l'UTT, la problématique soulevée par la création de ce diplôme répond à une menace en perpétuelle évolution : « le développement des nouvelles technologies numériques représente une véritable boîte de Pandore pour les délinquants et criminels, qu'il s'agisse de réseaux pédophiles, de hackers[ 1 ]Pirates informatiques. ou de fraudeurs. Il était donc normal que les forces de l'ordre disposent de formations techniques sur des compétences très sensibles afin de pouvoir faire face à la délinquance en ligne ! »

Trois questions à Louis-Joseph Brossollet, directeur du service formation continue de l'UTT

Cette Licence professionnelle n'est pas le premier diplôme que l'UTT
consacre à la sécurité.

En effet, nous formons des étudiants à un Master « Ingénierie et management de la sécurité globale et appliquée », en partenariat avec l'Institut national des hautes études en sécurité, un autre Master « Sécurité des systèmes d'information », qui reçoit chaque année plusieurs spécialistes issus de la gendarmerie, mais aussi des professionnels de la sécurité en entreprises. Nous proposons également un diplôme universitaire « Analyse des risques et menaces contemporaines » dont l'une des mentions sera remplacée, dès janvier 2011, par la nouvelle Licence professionnelle.

Quel est l'intérêt, pour des gendarmes disposant déjà d'accréditation d'officiers de police judiciaire (OPJ) de valider un tel cursus universitaire plutôt que de s'en tenir à des formations internes classiques ?

Outre les réductions de budgets que connaît l'institution, la titularisation des compétences acquises permet aux gendarmes de valoriser leur formation. Pour eux, bien entendu, mais aussi lorsqu'ils sont face à des juges d'instruction auxquels ils doivent expliquer certains principes techniques. Il existe également une autre problématique : certains accusés ont, en effet, les moyens de s'adjoindre les services d'avocats ou d'experts particulièrement diplômés qui peuvent faire montre d'un certain mépris envers les gendarmes interrogeant leurs clients. La possession de ce titre universitaire peut permettre aux « cyberpatrouilleurs » de disposer d'une crédibilité accrue face à ces publics.

Quels sont les composantes de ce diplôme ?

Elles s'articulent en trois modules : l'un est consacré aux enseignements généralistes, un autre à la formation réseaux et le troisième à la formation aux outils spécifique des missions que ces « cybergendarmes » seront amenés à mener. Plus qu'un enseignement figé, nous souhaitons les aider à acquérir la mécanique d'intégration des connaissances, s'adapter à des technologies en perpétuelles évolutions et progresser en compétences. La gendarmerie nationale est reconnue comme l'une des forces de police européennes les plus performantes, mais elle doit toujours se montrer meilleure que les délinquants. A termes, cette formation pourrait être ouverte à la police nationale, aux douanes ou à toute autre institution de lutte contre la cybercriminalité.

Notes   [ + ]

1. Pirates informatiques.