Fralib, Sevelnord, Lohr, Doux : rentrée sous tension pour les unes, reprise de l'activité pour d'autres

Si Fralib fait partie des exemples, de plus en plus nombreux, de conflits qui se durcissent et qui durent, d'autres connaissent des sursis, parfois des sauvetages. C'est le cas de Sevelnord, grâce au chômage partiel, ou du groupe Lohr Industrie, grâce au Fonds stratégique d'investissement. Tour d'horizon.

Par - Le 01 septembre 2012.

“Tout est question de volonté politique. Nous attendons que le gouvernement tape du poing sur la table pour que la situation se débloque enfin", pointe Olivier Leberquier, délégué syndical CGT de Fralib. En lutte contre la fermeture de l'usine qui fabrique les thés Éléphant, et sa délocalisation en Pologne, les derniers salariés présents sur le site de Gémenos (Bouches-du-Rhône) entendent bien voir leur projet de Scop aboutir. C'est en 2010 qu'Unilever, dont Fralib est la filiale, a annoncé la fermeture de l'usine. Deux plans de sauvegarde de l'emploi ont été invalidés avant qu'un troisième ne soit déclaré conforme par la Justice. Malgré la procédure d'appel de ce jugement par les salariés, Unilever a négocié le départ de nombre d'entre eux. Sur 182 salariés, 103 sont restés. 80 ont d'ores et déjà donné leur accord pour être repris par la Scop. “Nous attendons une vraie négociation pour que notre projet aboutisse, mais les pressions sont fortes du côté d'Unilever, qui s'oppose à toute reprise d'activité depuis plus d'un an", observe Olivier Leberquier.

Si le projet de Scop se concrétise, l'activité reprendra et pourra même être diversifiée afin d'optimiser l'utilisation des machines. “Nous avons prévu d'élargir la production et d'enclencher à la reprise des formations d'adaptation." Mais avant cela, les syndicats souhaitent que des négociations s'ouvrent entre l'État, qui soutient le projet de Scop, les collectivités territoriales et Unilever. Et pas question d'attendre d'être licenciés pour aller devant le juge contester le motif économique du licenciement : “Cela prendrait six ans, nous ne pouvons pas attendre, prévient Olivier Leberquier. Je me souviens de la loi Gremetz sur les « licenciements boursiers ». Elle a été abrogée à la suite de l'alternance politique de 2002. Aujourd'hui, nous demandons l'instauration d'un droit de veto des salariés et l'obligation pour l'employeur de prouver la réalité du motif économique. Le président de la République s'est dit d'accord avec ce principe", rappelle le délégué syndical.

Sauvetage ou sursis ?

Chez Sevelnord, filiale du constructeur automobile PSA, à Hordain (Nord), trois syndicats, excepté la CGT, ont approuvé lors du comité d'entreprise du 26 juillet dernier un projet d'accord compétitivité-emploi, qui ne s'appliquera qu'en cas d'obtention du projet “K-Zéro" (futur véhicule utilitaire de PSA Peugeot Citroën). Si Force ouvrière considère que cet accord permet “la pérennité de l'entreprise", la CGT le juge “inacceptable" et dénonce “un chantage" pour l'attribution de ce projet K-Zéro. “Le texte va remettre en cause la vie familiale, les conditions de travail et le pouvoir d'achat", dénonce son représentant.
L'accord a été négocié pour trois ans, après plusieurs ajustements, notamment concernant son titre : d'abord intitulé “accord sur l'amélioration des performances", il sera finalement approuvé sous le titre “accord sur l'adaptation des conditions de travail, la pérennisation des emplois et le développement de Sevelnord". Dans ce document, la direction s'engage à ne pas recourir à un plan de sauvegarde de l'emploi, ce qui est considéré comme la principale avancée. Autre engagement important aux yeux des syndicats : sa prorogation tacite de deux ans, ce qui garantirait les emplois de Sevelnord pendant cinq ans.

L'accord comporte sept chapitres, portant sur la mobilité, la GPEC, le prêt de main-d'œuvre et l'intérim, l'organisation et la durée du travail, la modération salariale, l'emploi des jeunes et la modération salariale. La direction de l'entreprise y expose les enjeux, pour Sevelnord : “Poursuivre l'amélioration de la performance" et “étudier les modalités d'accompagnement de la baisse importante de l'activité prévisionnelle". En matière de mobilité, deux possibilités sont prévues : au sein de Sevelnord ou vers une entreprise du groupe PSA. Par exemple, un salarié ne pourra pas refuser un changement d'affectation “intrasite". Un principe valable même en cas de proposition d'un poste d'un niveau inférieur, “dès lors qu'un sureffectif est présent au sein de la catégorie", la direction s'engageant à ce que la période d'application de cette disposition soit limitée au maximum. La mobilité au sein d'une entreprise PSA se fera, quant à elle, sur la base du volontariat.

L'accord renforce par ailleurs le rôle de l'observatoire des métiers dans la GPEC, et la direction s'engage à renforcer les mesures formation concernant les salariés susceptibles d'occuper un métier “en tension". Une négociation avec les partenaires sociaux est prévue en 2013 avec pour thème les passerelles entre les différents métiers. Le recours au prêt de main-d'œuvre est également prévu. Outil de flexibilité, il doit permettre, selon l'accord, d'éviter les licenciements économiques et le recours au chômage partiel. L'accord prévoit également un aménagement de l'organisation et de la durée du travail, avec une réalisation des heures répartie sur trois à six jours, notamment. Enfin, direction et partenaires sociaux signataires sont tombés d'accord pour poursuivre l'intégration des jeunes du bassin d'emploi, avec un renforcement du tutorat et du parrainage.

Repreneurs

Lohr Industrie (constructeur de camions, bus et tramways, près de Strasbourg) a été placée en cessation de paiement début juin. L'entreprise avait déjà supprimé une centaine d'emplois début 2009, puis 150 en mai 2010. Un accord a été trouvé avec Alstom, permettant la reprise de l'activité de construction de tramway sur pneus Translhor, division du Lohr Industrie. Le ministère du Redressement productif n'a pas manqué de se réjouir à ce sujet. L'aide du Fonds stratégique d'investissement permet ainsi le maintien des emplois et des compétences. L'accord donne également les moyens au groupe Lohr de mener la restructuration de ses activités de ferroutage et de porte-voitures et ainsi de consolider des centaines d'emplois. 35 millions d'euros vont être déboursés pour mener à bien l'opération et permettre à Lohr de payer les salaires des 941 personnes qui travaillent encore pour l'entreprise.

Le volailler Doux, quant à lui, a vu son pôle “frais" liquidé par le tribunal de commerce de Quimper le 1er août dernier, avec offres de reprises jusqu'au 10 août, et le reste de ses activités placé “sous surveillance" jusqu'au 30 novembre. Le tribunal a tranché en faveur du plan de continuité du président de Doux, ce qui est “incompréhensible" pour les syndicats qui considère que le PDG transfère là sa responsabilité sociale sur des repreneurs avec le “cautionnement" de la Justice. Affaires à suivre.