Rapport public - La Cour des comptes épingle la “réforme inaboutie" des Opca

Par - Le 01 mars 2013.

La formation professionnelle continue fait partie des sujets sur lesquels la Cour des comptes a choisi de travailler cette année. Son rapport public 2013, présenté le 12 février dernier, recense des dysfonctionnements qu'elle avait déjà identifiés en 2008 : dispersion des Opca, insuffisante mutualisation des fonds entre les entreprises et “incapacité du système à orienter efficacement ces fonds vers les salariés les plus fragilisés".

Ces observations avaient été alors suivies de recommandations : diminution du nombre des Opca, création de structures propres à orienter l'effort vers les moins qualifiés, etc. La loi du 24 novembre 2009 a notamment abouti à une réforme du réseau des Opca et a créé une nouvelle structure de mutualisation sous l'appellation de Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP). La Cour des comptes s'est donc à nouveau penchée sur ces résultats. Le verdict est plus que mitigé.

Des fusions qui coûtent très cher

“Nous nous sommes intéressés au suivi des Opca qui ont véritablement diminué, et c'est un véritable progrès", constate Anne Froment-Meurice, présidente de la cinquième chambre, qui a travaillé sur le sujet. “En revanche, nous constatons que l'économie des frais de gestion ne se manifeste pas vraiment", poursuit-elle. Les 20 nouvelles structures devraient ainsi coûter 14 millions d'euros de plus que les 65 anciennes en 2012 ! “Nous expliquons cette augmentation à la fois par des fusions qui coûtent très cher et par une amélioration des services rendus", note encore Anne Froment-
Meurice. Pour la Cour, “la question d'une réduction des coûts en valeur absolue ne devra pas être éludée au cours des années à venir".

Bilan décevant des conventions d'objectifs

Les conventions triennales d'objectifs et de moyens (Com) ont été mises en œuvre au 1er janvier 2012. Elles ont été jugées “trop restreintes" par “nos rapporteurs qui les ont toutes très attentivement regardées", souligne Anne Froment-Meurice. Un reproche majeur est avancé : les Com conclues en 2012 ont vu leur objet limité à la question des frais de gestion, alors que la Cour indique que “rien n'interdit que ces conventions comportent des dispositions plus ambitieuses, relatives notamment aux types de formations financées ou aux publics visés". Les Com révèlent “un manque d'ambition de la part de l'État par rapport à sa mission de formation professionnelle des personnes les plus fragiles", indique la présidente de la cinquième chambre. Enfin, la mise en œuvre des Com n'a pas réduit les frais de gestion des Opca… qui sont encore de 5-6 % en moyenne, alors qu'ils pourraient plafonner à 3 % si la collecte était, par exemple, centralisée par les Urssaf (l'une des propositions 2008 de la Cour).

FPSPP : concertation insuffisante

Le Fonds paritaire opère une mutualisation en deux temps, assurant d'une part une péréquation permettant aux Opca qui ont des besoins de financement pour certains types d'actions de formation de faire appel à des financements complémentaires. Et d'autre part, il pilote des projets de formation ciblés sur des publics prioritaires et cofinancés par les Opca et des fonds de l'État ou du Fonds social européen (FSE), ou encore des Régions. La Cour note qu'“alors que le FPSPP a notamment été créé dans le but de favoriser la coordination entre les partenaires sociaux, l'État et les Régions, ces dernières n'ont pas été sollicitées dans le cadre des appels à projets lancés par le Fonds en 2010 et 2011. Cette orientation apparaît en contradiction avec les objectifs affichés dans l'accord national interprofessionnel du 7 janvier 2009". De plus, la Cour indique que dans les faits, le nombre des Opca bénéficiaires de la péréquation n'a que faiblement progressé, malgré l'augmentation des sommes redistribuées par ce mécanisme.

Trois recommandations "2013"

La Cour formule trois recommandations :

  rendre plus ambitieuses les conventions passées entre l'État et les Opca, en termes tant de réduction des frais de gestion que d'orientation de l'effort de formation ;

  limiter fortement le nombre d'indicateurs de gestion des Opca suivis par la DGEFP ;

  rendre plus transparente la redistribution opérée par la péréquation mise en œuvre au sein du FPSPP (publier le bilan annuel de la péréquation dans l'annexe au projet de la loi de finances).
71 % des recommandations de la Cour des comptes sont habituellement suivies d'effets, a souligné son premier président, Didier Migaud.