Contrats de génération : Michel Sapin demande aux partenaires sociaux d'accélérer les négociations de branche
Par Claire Padych - Le 15 janvier 2014.
Lancé voici plus de dix mois - le 1er mars 2013 [ 1 ]Le contrat de génération a été créé dans
le cadre de l'accord national interprofessionnel
du 19 octobre 2012. -, le contrat de génération peine à rencontrer
son public. Le ministre du Travail a, à différentes reprises, souligné sa montée en puissance, mais
les entreprises, dont les obligations comme les aides différentes selon leur taille, restent souvent
dans l'expectative. L'accent est donc mis sur les accords de branche.
Le transfert de compétences est très
charnel…", indiquait Michel
Sapin, ministre du Travail,
de l'Emploi, de la Formation
professionnelle et du Dialogue
social, lors d'une rencontre au sein de
son ministère, le 17 décembre dernier,
pour récompenser les trois lauréats du
“Trophée contrat de génération". Lors
de cette première, qui concernait des
entreprises de moins de 50 salariés, il
a précisé que, comme pour les emplois
d'avenir, les contrats de génération
étaient trop souvent critiqués. “On utilise
des images de véhicules en insistant
sur le fait que « ça n'avance pas » ou que
« ça ne décolle pas »... Mais ce n'est pas
vrai !", s'est exclamé le ministre, précisant
que le dispositif “est un outil qui est
désormais entre les mains des entreprises.
Il n'est pas imposé !"
Le dispositif peut être utilisé pour aider
aux reprises d'entreprise qui passent
par une “transmission" entre le jeune de
moins de 26 ans et le chef d'entreprise
senior. Pour les entreprises de plus de
300 salariés, qui représentent plus du
tiers des salariés en France (8,4 millions
de salariés dans 4 500 groupes), 3 000
accords ou plans d'action ont été signés.
Ces accords sont le fruit de la négociation.
Dans les entreprises moyennes
de 50 à 300 salariés, qui représentent
environ 2,7 millions de personnes, les
contrats de génération représentent environ
1 900 accords ou plans d'action
d'entreprise. De plus, quarante accords
de branche ont également été signés,
notamment dans des secteurs comme
la métallurgie. “Ce sont des dizaines de
milliers d'emplois qui sont programmés
dans les trois ans qui viennent", a spécifié
le ministre.
Une “dynamique de négociation
qui s'amplifie"
Dans les entreprises de moins de 50 salariés,
le ministère de l'Emploi assure
que “la montée en charge se déroule de façon
satisfaisante". Un bilan chiffré avait
été fait le 22 octobre 2013 (sans actualisation
officielle depuis cette date) :
près de 13 000 demandes d'aide au
contrat de génération, avec un rythme
de 700 demandes par semaine. Dans
les entreprises de 50 à 300 salariés le
ministère avait estimé en octobre dernier
que “le niveau des contrats de génération
[était] encore trop modeste". En
effet, dans les entreprises de moins de
300 salariés, les plans d'action étaient
majoritaires (57 %) sans qu'il soit possible
de faire la part entre des situations
d'absence de représentants susceptibles
de signer un accord et des situations
d'échec des négociations.
Michel Sapin a donc interpellé les partenaires
sociaux sur la nécessité d'accélérer
la mobilisation autour du contrat
de génération et en particulier la négociation
de branches. Fin 2013, vingtquatre
d'entre elles avaient conclu ou
étaient en passe d'avoir conclu un accord
de branche : organismes de sécurité
sociale (accord du 11 juin 2013,
agréé le 31 juillet) ; métallurgie (accord
du 12 juillet 2013, arrêté du 2 octobre)
; sociétés d'assurance (accord
du 8 avril 2013, arrêté du 2 octobre) ;
industries pharmaceutiques (accord
du 3 juillet, arrêté du 25 octobre) ;
inter-secteur papier-carton (accord du
4 juillet, arrêté du 25 octobre) ; industries
de carrières et matériaux (accord
du 18 juin 2013) ; bâtiment-travaux
publics (accord du 16 octobre) ; interbranche
agroalimentaire ; aéraulique ;
aide à domicile ; alimentaires-produits
élaborés industries ; analyses médicales
laboratoires ; animation ; assurances
courtage ; audiovisuel électronique
commerce de détail ; casinos ; hospitalisation
privée ; hôtellerie de plein air ;
jardineries et graineteries ; organismes
de formation ; prestataires techniques
secteur tertiaire ; promotion immobilière
(ex-promotion construction) ; télécommunications
; viandes industries
et commerces en gros.
… et des organisations
syndicales partagées
Si certains accords ont donc été signés,
l'unanimité n'est pas de mise
au sein de la représentation syndicale.
D'importantes divergences sont
visibles. Par exemple, le contrat de
génération des organismes de sécurité
sociale (qui couvre près de 167 000
salariés) signé par la CFDT PSTE, la
CFDT SNPDOS, la CFTC PSE et
CFTC Snapdos ne l'a pas été par la
CGT, qui explique qu'il “s'agit d'un
accord globalement vide, sans aucune
obligation d'embauche, faisant une fois
de plus la part belle aux cadeaux aux
employeurs (4 000 euros par an et par
salarié) et qui sera pour les organismes
un effet d'aubaine. Ceux-ci profiteront
en effet de l'argent public dans le cadre
d'embauches qu'ils auraient, à terme,
obligatoirement dû engager".
De son côté, FO a signé le contrat de
génération dans la branche métallurgie
(qui compte environ 1,4 million de salariés).
Frédéric Homez, secrétaire général
de FO Métaux, indique que “cinq
séances de négociation ont été nécessaires,
dans un contexte assez difficile, puisque
la crise économique et les problèmes
d'emploi étaient en permanence dans la
discussion". Il souligne que les engagements
pris “de passer de 24 % à 27 % les
recrutements annuels en CDI des moins
de 26 ans et de maintenir le taux des salariés
de 55 ans et plus à 11 %" en font
“plutôt un bon accord", avec d'autres aspects
positifs comme “la valorisation du
tuteur ou du référent, ainsi que la mise en
place d'un livret d'accueil pour les jeunes
embauchés qui pourront découvrir l'aspect
social destiné à promouvoir l'action
collective". Frédéric Homez note toutefois
qu'“une revoyure est prévue, avec un
calendrier prévisionnel sur trois ans".
Un contrat de génération qui ne
pourra qu'évoluer, si on en croit
une “Étude prospective sur l'évolution
des emplois et des métiers de la
métallurgie" (Observatoire paritaire,
prospectif et analytique des métiers
et qualifications de la métallurgie,
juin 2012) : “En 2009, entre 28 % et
32 % des effectifs de plusieurs branches
de la métallurgie avaient plus de 50 ans.
Ces mêmes salariés ont aujourd'hui plus
de 53 ans. Près d'un tiers des salariés
partiront donc à la retraite d'ici 2020."
La transmission des savoir-faire devra
donc être anticipée grâce à ce dispositif…
ou d'autres, car le rapport
note également que “le nombre total
d'emplois salariés dans les branches
de la métallurgie devrait diminuer de
17 000 personnes par an en moyenne
entre 2010 et 2020 – comparé à des
baisses de 35 500 en moyenne annuelle
entre 2005 et 2010. Presque toutes les
branches verront le nombre de salariés
diminuer sur la période – à l'exception
de la fabrication de matériels de
transport autres que l'automobile, qui
créera quelque 1 000 emplois par an en
moyenne entre 2010 et 2020".
Notes
1. | ↑ | Le contrat de génération a été créé dans le cadre de l'accord national interprofessionnel du 19 octobre 2012. |