Faut-il inciter les entreprises à externaliser la formation ?

Par - Le 01 juin 2014.

“Il faut que les individus puissent
faire jouer leur droit en matière
de formation de manière plus
autonome. C'est le manque d'autonomie
qui empêche aujourd'hui
notre système d'évoluer." C'est
à l'occasion d'un séminaire sur
les politiques de l'emploi, organisé
par la Direction générale du
Trésor le 13 mai dernier à Bercy,
que Marc Ferracci, économiste
spécialiste de l'évaluation de la
qualité de la formation, a livré
son point de vue sur l'efficacité
du système à l'aune de la loi du
5 mars 2014.

“Gaspillages et sous-investissement"

Pour lui, l'amélioration de la formation
professionnelle doit se
traduire par une responsabilisation
plus grande des personnes.
“Cela passe inévitablement par la
reconnaissance du principe suivant
: celui qui tire un rendement
de la formation professionnelle
doit payer. Malheureusement, le
système français ne permet pas
que ce principe soit respecté, ce
qui engendre des gaspillages et
un sous-investissement."

Comment “relever
la qualité
des formations" ?


Si les bonnes intentions ont été
affichées lors de la mise en place
de la nouvelle réforme, pas sûr
que la loi du 5 mars permette de
changer les choses. “La création
du compte personnel de formation
est un bon dispositif, notamment
grâce à son aspect portable.
Idem pour la suppression du
0,9, qui permet de simplifier les
démarches de l'employeur, ainsi
que pour la création du conseil en
évolution professionnelle qui renforce
l'autonomie des personnes
en offrant une information sur la
qualité de la formation. Le problème,
c'est que le diable est
dans les détails. À y regarder de
plus près, on voit que la loi ne
permet ni de relever le niveau
de qualité de la formation, ni de
modifier l'architecture générale
du financement.".

L'“intermédiarisation"
en question

“La complexité de l'offre, des
mécanismes et des dispositifs
est un des défauts majeurs du
système de formation professionnelle.
Pour plus de simplicité, il
faudrait permettre le décloisonnement
selon les publics et selon
les statuts."

Pour ce faire, l'économiste propose
une “désintermédiarisation".
Expliquant : “La suppression du
rôle de collecte des Opca permettrait
de faire renouer une relation
directe entre les individus et les
prestataires." Encore une fois, il
martèle que cela ne pourra pas se
faire sans une plus grande autonomie
des individus. “Cela suppose
la mise en place d'un conseil en
accompagnement, mais aussi
l'existence dans l'entreprise d'un
dialogue social de qualité."
également présent ce matin-là
au ministère, le consultant Jean-
Pierre Willems ne voit pas les
choses du même oeil : “La moitié
de la collecte des Opca se fait
au titre du plan de formation.
L'intermédiation joue donc un rôle
assez faible et ne s'oppose pas au
développement de l'autonomie et
de l'employabilité du salarié."

Des financements
“insuffisants et mal
ciblés"


Le système actuel présente des
effets modestes sur les salariés
et, dans le même temps, un
impact fort sur la productivité.
“L'entreprise capte les bénéfices
de la formation, reprend Marc
Ferracci. Nous avons perdu de
vue la fonction de mobilité professionnelle
ascendante des
salariés, dans ce contexte de
chômage de masse. Je pense au
contraire qu'il ne faut pas trop la
négliger."
_, Depuis 1970, la tendance a été
à la réduction du temps passé
en formation dans le même
temps que l'accès est devenu
plus fréquent et plus massif.
Selon l'économiste, il est nécessaire
de repenser le système de
financement en tenant compte
de l'incitation des entreprises à
l'externalisation. “Pourquoi ne
pas passer par des subventions
pour encourager les entreprises
dans cette démarche ?"