Priorité : relancer l'apprentissage

Par - Le 01 octobre 2014.

Une prime de 1 000 euros
aux entreprises de moins
de 250 salariés, sans
condition, jusqu'en juin
2015. C'est l'annonce
majeure des Assises de
l'apprentissage, qui ont
réuni une cinquantaine
de représentants
syndicaux, patronaux,
des Régions et des
Chambres consulaires
(commerce et industrie,
artisanat, agriculture)
le 19 septembre dernier
à Paris

Il y a à peu près 420 000 jeunes
qui sont en parcours d'alternance
ou d'apprentissage, c'est
trop peu. D'ailleurs, la tendance en
2013 a été plutôt à la baisse, comme
pour les contrats de professionnalisation",
a déploré le président de la
République, François Hollande, à
l'occasion des Assises de l'apprentissage,
qui se tenaient le 19 septembre à
Paris. Il a confirmé l'objectif de
500 000 apprentis d'ici 2017. Et pointé
les leviers à actionner pour y parvenir

Une prime “sans condition,
pour cette rentrée"


François Hollande veut que l'État et
les collectivités publiques donnent
l'exemple, “en accueillant des apprentis
en plus grand nombre qu'aujourd'hui. Il
faut savoir que l'État forme 700 apprentis
aujourd'hui. 700 ! L'objectif serait
que d'ici deux ans, l'État puisse accueillir
10 000 apprentis".

Le deuxième levier est financier. La
nouvelle prime de 1 000 euros pour les
entreprises de moins de 50 salariés qui
embauchent un premier apprenti, votée
en juillet par le Parlement, s'appliquera
finalement “à tout apprenti supplémentaire",
concernera les entreprises
jusqu'à 250 salariés. Pour les moins
de 11 salariés, elle s'ajoutera à celle de
1 000 euros qui leur était accordée par
les Régions. Cette prime sera accordée
“sans condition, pour cette rentrée", a
annoncé le président de la République.
Cependant, elle ne sera prolongée à la
rentrée 2015 que pour les entreprises
des secteurs “ayant signé un accord de
branche" d'ici juin prochain.

Mobilisation
de l'Éducation nationale...


François Hollande veut affecter
150 millions d'euros aux centres de
formation d'apprentis. Soit un effort
de 80 millions d'euros consacré à l'hébergement
des jeunes. Pour le chef de
l'État, l'implication de l'Éducation nationale
est indispensable pour la réussite
de cette politique de promotion de
l'apprentissage.
Il entend porter le nombre de jeunes en
apprentissage dans les établissements
publics d'enseignement de 40 000 à
60 000. “Afin de compléter l'offre des
centres de formation d'apprentis, les lycées
professionnels, qui sont des établissements
de grande qualité, devront avoir les soutiens
indispensables et être sur les bonnes
filières de formation."
Symbole de cette implication, selon le
chef de l'État, une instruction adressée
le 14 septembre par la ministre de
l'Éducation nationale, Najat Vallaud-
Belkacem, aux recteurs d'académie,
les invite à élaborer des “plans de développement
de l'apprentissage" destinés à
augmenter de 50 %, d'ici à 2017, le
nombre d'apprentis formés dans les
établissements publics.

... des entreprises...

Afin de mobiliser les entreprises,
François Hollande demande la mise en
place d'une cartographie, “pour que tous
les gisements d'apprentissage puissent être
exploités". Elles devront être disponibles
dans toutes les branches professionnelles.
“Il y a un lien à établir entre le pacte
de responsabilité et les négociations qui
doivent avoir lieu. Les négociations de
branche doivent tenir compte de la nécessité
de proposer des emplois aux jeunes.
L'apprentissage fait partie des engagements
que les entreprises doivent souscrire
dans le cadre du pacte de responsabilité",
a-t-il rappelé.

... et des Régions

Les Régions étant au coeur du dispositif
d'apprentissage, comment ne pas les
inclure dans les plans d'amélioration
du système d'apprentissage ?
Le chef de l'État a demandé une évaluation
des emplois, des besoins et
des métiers : “La mobilité se prépare
aujourd'hui par la formation. C'est donc
dans les régions que nous devons réaliser
des formations pour que cela puisse déboucher
sur les emplois qui sont proposés dans
les territoires." Pour François Hollande,
“ce qui compte, c'est moins le chiffre luimême
que la qualité de la formation, de
l'accompagnement permettant d'accéder
à un emploi et à un véritable métier".

“Annonces encourageantes"

La satisfaction était presque générale
chez les partenaires sociaux, au sortir
de l'Hôtel de Marigny, où se tenaient
les Assises de l'apprentissage. “Ces annonces
prouvent que la chute du nombre
de contrats d'apprentissage constatée en
2013 représente une préoccupation pour
les pouvoirs publics et qu'ils entendent y
remédier", notait Jean-Michel Pottier,
président de la commission éducationformation
de la CGPME.

Pour autant, a-t-il ajouté,“l'an prochain,
ces primes seront conditionnées
à la conclusion d'accords de branche.
Qu'adviendra-t-il des petites entreprises
rattachées à des branches qui n'auront pas
conclu d'accords ou qui n'adhèrent à aucune
fédération professionnelle ? Il existe
un risque important de voir ces PME et
TPE passer à côté de ces primes".

Dans l'économie sociale
et solidaire


Un secteur en particulier, celui de l'économie
sociale et solidaire, emploie peu
d'apprentis : en effet, les employeurs
associatifs, non assujettis à la taxe d'apprentissage,
sont plutôt concernés par
les contrats aidés tels que les emplois
d'avenir. Mais, alors que “80 % des entreprises
restent des structures de moins de dix
salariés, ces primes peuvent les encourager
à s'engager", observait Alain Cordesse,
président de l'Udes.

Orientation
et filières d'avenir


C'est avec une belle unanimité – tant
du côté patronal que chez les syndicats
de salariés – qu'ont été accueillies les
annonces concernant les mesures de
renforcement du suivi des jeunes par
les centres de formation, en vue de
prévenir les ruptures de contrat, ainsi
que l'implication accrue des acteurs
de l'orientation dans l'information
des futurs apprentis sur les filières qui
recrutent.

“On compte 20 à 25 % de décrocheurs
en cours de contrat. Il suffirait de ramener
ces chiffres à zéro pour quasiment
atteindre l'objectif de 500 000 apprentis
en 2017", calculait Jean-Pierre Therry,
secrétaire confédéral de la CFTC en
charge du dossier de la formation.

“Donner un statut à l'apprenti, renforcer
son accompagnement, lui permettre de se
loger ou de se déplacer plus facilement...
tout cela va dans le bon sens pour développer
l'apprentissage", soulignait pour
sa part son confrère de la CFDT, Yvan
Ricordeau, dont
la confédération
défendait, lors de ces assises, l'implication
accrue des services publics régionaux
de l'orientation (SPRO) et des
Missions locales dans l'information
et l'accompagnement des jeunes vers
l'apprentissage.

“Développeurs de l'apprentissage"

À condition, toutefois, que cette
orientation ne s'achève pas dans une
voie sans issue et que les filières choisies
soient de nature à déboucher sur
l'emploi. “Nous avons rappelé au président
que, pour nous, la formation
professionnelle doit répondre aux objectifs
d'émancipation des hommes et des
femmes dans un monde de plus en plus
complexe et aux besoins des entreprises.
Encore faut-il que celles-ci puissent nous
dire quels sont les métiers de demain",
avertissait Thierry Lepaon, le secrétaire
général de la CGT.

Une identification des secteurs porteurs
d'emploi et des priorités de branche
que l'Unsa se propose de faciliter par la
création de “développeurs de l'apprentissage"
− comme il en existe déjà au
sein des Chambres de commerce et
d'industrie – chargés de faire se rencontrer
apprentis et entreprises en fonction
des besoins des territoires.

Coopération Travail-Éducation

La présence à ces assises de la ministre
de l'Éducation nationale et de plusieurs
représentants du monde enseignant
(FSU, Conférence des présidents
d'Université) a été également
jugée encourageante. “Le Travail et
l'Éducation qui acceptent de s'asseoir
à la même table pour parler ensemble
d'apprentissage, il était temps !", soufflait
un syndicaliste.

Changement de paradigme ? En tous
cas, même du côté patronal, on salue
la performance : “L'éducation, c'est le
début de la chaîne d'orientation et d'entrée
des jeunes dans la vie active", expliquait
Patrick Liébus. Alors que, de son
côté, la CFTC n'hésitait pas à évoquer
la création d'une “prime à la rentrée des
apprentis", calquée sur celle qui existe
déjà dans le système scolaire.