Stéphane Diebold, le corsaire de la formation

Par - Le 01 avril 2014.

“Agitateur d'idées." Voilà une expression qui
revient souvent dans la bouche de Stéphane
Diebold. “Pirate", aussi. Et “corsaire". Et
“transgressif". Mais au palmarès des épithètes
que ce Provençal de 47 ans aime s'accoler
à lui-même, c'est “iconoclaste" qui revient
le plus souvent. Car il aime parler. De lui, en
premier lieu, l'homme assume volontiers une
part raisonnable de mégalomanie. “Je suis
Toulonnais, ça explique mon côté rayonnant !",
explique-t-il. Et de son Sud natal, s'il n'en a
pas l'accent, Stéphane Diebold a conservé
la tchatche. Difficile de l'arrêter tant son
débit vocal s'apparente à un tir soutenu
de kalachnikov. “Je suis un passionné ! La
formation, je peux en parler des heures,
des jours !", se justifie celui qui avoue être
tombé “par hasard" dans ce milieu alors qu'il
était encore doctorant en économie à la fac
d'Aix-Marseille, en étant amené à donner
des cours de management et de marketing à
l'ESCT Toulon, à l'Institut européen de design
et divers autres établissements provençaux au
milieu des années 1990. “Élu trois ans de suite
« professeur de l'année » par mes étudiants qui
n'avaient souvent qu'un ou deux ans de moins
que moi !", lâche-t-il avec cette exubérance
haute en couleur qui semble lui servir de
carburant.

Entré dans la formation comme on entre
en religion, Stéphane Diebold ne persiste
pas dans la carrière universitaire une fois
sa thèse en poche. “Pas assez vivant, pas
assez de challenge et un milieu trusté par des
enseignants qui n'ont jamais mis les pieds dans
une entreprise." Et peut-être pas assez charnel
pour celui qui a fait du concept d'“érotisation
de la formation" l'un de ses chevaux de
bataille, sinon son leitmotiv qu'il aime répéter
à l'envi. “Marre de ces responsables formation
qui fonctionnent comme des comptables ou
des directeurs administratifs et financiers,
les yeux rivés sur leurs tableaux Excel ! La
formation, ça doit être sexy, ça doit choquer !"
Une philosophie que le Toulonnais entend
appliquer tant en entreprise, en prenant les
rênes des politiques de formation chez Midas,
aux Galeries Lafayette, chez
Dancause & associés, ou au
sein du cabinet Tenma, qu'il
fonde en 2004, que dans le
monde associatif, notamment
au Garf, où il entre en 2001 et y
crée la commission de réflexion
sur l'évolution du métier de
responsable de formation,
think tank garfiste dédié à
l'innovation qui sera à l'origine
du GarfLab, de MyGarfTV
ou du Garf Campus… “pour
dé-fossiliser la fonction de
responsable formation".

“Diebolisation !"

“Je me suis régalé dans
toutes mes différentes
fonctions, c'était magique !",
se souvient celui qui a fait
de ces expériences autant de
laboratoires dans lesquels
mettre en pratique ses réflexions sur “le
développement du goût d'entreprendre", le
management comportemental, l'influence des
nouvelles technologies sur les pratiques de
formation, “l'entreprise liquide" − s'inspirant
en cela de la métaphore du surf comme
modèle de transversalité sociale, développée
par le biochimiste et prospectiviste Joël
de Rosnay. “Stéphane Diebold est comme
ça : il a mille idées à la seconde ! Certaines
positivement géniales, d'autres franchement
incohérentes… sans qu'il sache toujours
faire le distinguo entre ces deux catégories",
s'amuse, un peu vachard, un de ses anciens
condisciples garfistes. “Mais ce qui surprend
chez lui, c'est surtout sa capacité à revenir
par la fenêtre quand on lui a fermé la porte.
Pirate ? Indéniablement…"

Moins érotique, cependant, fut sa présidence
du Garf, débutée en fanfare et terminée
en série noire [ 1 ]L'Inffo n° 846, p. 15. par sa démission, puis
son exclusion. Conclusion abrupte pour
l'iconoclaste : “Mon éviction fut violente, j'ai
été victime d'une véritable « diebolisation » !",
estime aujourd'hui celui qui ambitionnait
de révolutionner, peut-être un peu trop
brutalement, une maison qui fête ses soixante
ans cette année. Si son successeur, Alexis
Hluzsko[ 2 ] L'Inffo n° 851, p. 10., reste sur de prudentes réserves,
estimant que “la page est tournée", d'anciens
garfistes, eux, n'hésitent pas à qualifier leur
ex-président de “manipulateur". Lui estime
avoir subi les conséquences “d'une querelle
entre les Anciens et les Modernes" au sein
d'une association “qui compte peut-être un
peu trop de retraités". Rancunier ? Il s'en
défend, bien décidé à passer à autre chose
au travers de sa nouvelle structure, l'Affen [ 3 ]Association française pour la formation en
entreprise et les usages numériques.
,
lancée officiellement le 13 mars dernier − sur la
scène du théâtre Darius Milhaud − et des cinq
ouvrages qu'il annonce vouloir écrire durant
l'année. Pour agiter les idées. Toujours.

2004 2012 2014
Fondateur de l'organisme de formation Tenma Président du Garf Fondateur de l'Affen

Notes   [ + ]

1. L'Inffo n° 846, p. 15.
2. L'Inffo n° 851, p. 10.
3. Association française pour la formation en
entreprise et les usages numériques.