Tourisme : vers un Opca unique ?

Par - Le 01 juin 2014.

Récemment clôturées, les Assises du tourisme ont permis aux partenaires sociaux d'engager
des réflexions sur les métiers de la branche. Si bien que l'idée de créer un “Opca Tourisme" a effleuré
quelques acteurs. Enquête.

Tout a commencé par une dépêche
AEF [ 1 ]Dépêche du 15 avril de l'Agence éducation
formation, citée notamment par la Lettre
d'information du Carif-Oref Midi-Pyrénées, 22 avril.
. Le Fafih serait depuis
quelque temps en discussion
avec les partenaires sociaux
pour créer un Opca Tourisme.
L'organisme collecteur de la branche
hôtellerie-restauration réfléchirait à
l'éventualité d'élargir son périmètre
d'activité. Des échanges sont même
évoqués avec plusieurs organismes de
la filière tourisme, comme Agefos-
PME (interprofessionnel) ou encore
l'Afdas (culture, médias et loisirs).
Et l'annonce n'est pas tombée dans
l'oreille de sourds.

Pas de démarche, mais
des réflexions


Contacté par L'Inffo, le Fafih s'empresse
de démentir. Si certains interlocuteurs,
notamment l'administrateur Christophe
Dez (secrétaire fédéral de la CFDT
Services), admettent examiner des pistes
de convergences afin de mener une
politique de formation de branche et
de créer des passerelles entre les métiers
du tourisme, pas question aujourd'hui
de chapeauter un Opca du tourisme.
“Nous sommes sur le point de rendre public
un communiqué pour revenir sur cette
information, qui n'est pas exacte", indique
l'attaché de presse du Fafih. Pourtant, pas
de trace d'une telle publication dans les
jours qui suivent. À la place, une invitation
à échanger avec la présidence. Mais,
attention, pas avant la fin des Assises du
tourisme, se clôturant d'ailleurs quelques
jours plus tard.

À l'heure de l'entretien, les positions
sont plus nuancées. Pas de renvoi catégorique.
“C'est un voeu que nous formulons,
mais ce n'est pas pour l'instant une
réalité. Lors des Assises du tourisme, plusieurs
idées ont été évoquées, dont celleci",
confie Didier Chastrusse, président
du Fafih. Donc, on en parle. Mais seuls.
“Le Fafih était le seul organisme collecteur
présent lors des Assises du tourisme.
Quand on est seul et porteur d'idée, il
est normal que les références s'imposent."
Aucune discussion n'a été ouverte en ce
sens avec d'autres Opca concernés par
la branche tourisme.

Le vice-président, Bruno Croiset [ 2 ]Représentant la partie employeurs, Bruno Croiset
est responsable de l'emploi et des systèmes éducatifs
chez Accor France.,
le
justifie de la manière suivante : “Il ne
s'agit pas d'aller voir les Opca pour se
rapprocher. Les filières qui travaillent sur
des sujets communs et des problématiques
liées aux métiers du tourisme ont beaucoup
de compétences liées. Elles doivent
donc logiquement engager des réflexions
pour travailler en bonne intelligence.
Cela permettra d'optimiser les outils et
les moyens. Il n'appartient pas aux Opca
de décider à la place des politiques et des
branches !"

Des discussions à mener
avec les branches


Du côté des autres organismes collecteurs
relevant de la branche tourisme,
le sujet n'est pas passé inaperçu.
“Nous avons vu passer l'annonce, mais
je confirme qu'il n'y a pas eu de discussions
engagées avec le Fafih. Il n'y a pas
de rapprochement en vue en ce moment",
répond Nicolas Borsarello, délégué
adjoint grands comptes et branches,
en charge du secteur du tourisme, chez
Agefos-PME.
Même tonalité à l'Afdas. Si Sophie
Huberson, vice-présidente de l'Opca
et présidente du Syndicat national des
espaces de loisirs, d'attractions et culturels
(Snelac), laisse entendre que le Fafih
prospecterait effectivement pour élargir
son champ de compétences, l'organisme
collecteur du spectacle et des loisirs
n'a pas les mêmes ambitions. “Il n'y
a aucune volonté de notre part de créer un
Opca du tourisme. D'ailleurs, le Fafih ne
nous a pas contactés officiellement en ce
sens." Pour elle, les réflexions en matière
de politique dans le secteur touristique
ne doivent pas être menées au niveau de
l'organisme collecteur. “Les Opca sont
des outils de gestion. Ce n'est ni à l'Afdas
ni au Fafih de dicter la politique de
branche. Si réflexion il y a sur la création
d'un Opca Tourisme, ce sont les branches
qui doivent entamer les discussions pour
faire émerger un consensus."
Et d'ajouter. “Les politiques n'ont pas
suffisamment pris le pouvoir dans les
branches, les prérogatives ne sont pas suffisamment
manifestées. C'est pour cette
raison que les outils de gestion s'en emparent.
Pour moi, on prend le problème
à l'envers..."

Nécessité de transversalité
dans les métiers du tourisme


Tous s'accordent aujourd'hui sur la
nécessité de mener une politique en
faveur de la transversalité des métiers.
Les démarches s'effectuent surtout au
sein des Opca. Exemple avec l'Afdas,
qui s'intéresse de près au sujet : “Quand
on peut faire avancer la transversalité, des
démarches sont menées pour la favoriser.
Nous menons en ce sens des travaux de
cartographie métiers, par exemple dans le
secteur de la restauration."

Agefos-PME, quant à lui, recouvre
plusieurs branches professionnelles en
matière de tourisme : les transports
avec la SNCF, la restauration rapide,
les organismes de tourisme, l'hôtellerie
de plein air, les loisirs (téléphériques,
navigation de plaisance…) ou encore le
commerce d'articles de loisirs. Un secteur
stratégique, pour lequel le taux de
collecte s'élève à 21,6 millions d'euros.
Pour construire des politiques cohérentes
autour de la transversalité des
métiers, Agefos-PME travaille de manière
étroite avec les branches : “Nous
appelons de tous nos voeux le développement
de passerelles métiers pour assurer
la transversalité qui caractérise le secteur.
C'est un travail que nous menons déjà
avec les branches sur des sujets comme la
transition numérique, ou encore sur les
mutations économiques. Nous sommes
friands d'échanges des bonnes pratiques et
de mutualisation pour essayer de développer
ce qui fonctionne."

En effet, les professions liées à l'activité
touristique sont bien souvent exercées
par des acteurs mobiles. Beaucoup de
saisonniers changent non seulement
d'employeur, mais de métier, d'une saison
à l'autre “Un salarié peut se retrouver
à travailler dans un camping, puis la saison
suivante dans un hôtel et ensuite dans
un restaurant. Ce sont des cas fréquents
auxquels nous devons nous adapter."

Un besoin de restructuration ?

Le Fafih aurait-il en fait besoin de se
restructurer ? L'Opca, au-delà de sa volonté
de se positionner sur les activités
touristiques, pourrait bien avoir besoin
d'élargir son champ d'attribution pour
continuer à exister. En effet, la restructuration
du financement de la formation
opérée par la loi du 5 mars 2014
ne restera pas sans conséquence sur le
montant de la collecte des organismes.
Depuis la loi du 24 novembre 2009,
l'agrément est soumis à un seuil minimum
fixé à 100 millions d'euros. Or,
la nouvelle réforme participe à la baisse
de la participation des entreprises versée
aux Opca. La suppression du 0,9
affecté au plan de formation, ainsi que
la nouvelle contribution obligatoire
de 1 %, ou 0,55 % pour les moins de
10 salariés, va diminuer le taux de collecte
de certains organismes.

Pourtant, Didier Chastrusse reste prudent
avant la publication des décrets,
qui apporteront davantage de précisions
sur les véritables changements.
“Nous anticipons effectivement une
baisse, mais personne ne sait encore
ce qu'il va se passer. La collecte s'élève
aujourd'hui à 145 millions, donc nous
avons encore de la marge. D'autant que
92 % de nos entreprises sont des TPE.
Cela va largement limiter l'impact des
mutations du financement de la formation."
À suivre.

SECTEURS DU FAFIH

 Restauration traditionnelle

 Caféterias

 Hôtels

 Débits de boissons

 Restauration collective

 Thalassothérapie

 Bowlings

 Casinos jeux

 Monde de la nuit

 Services de traiteurs

SECTEUR DU TOURISME

 Restauration

 Transports
Voyages

 Hébergement

 Loisirs

Notes   [ + ]

1. Dépêche du 15 avril de l'Agence éducation
formation, citée notamment par la Lettre
d'information du Carif-Oref Midi-Pyrénées, 22 avril.
2. Représentant la partie employeurs, Bruno Croiset
est responsable de l'emploi et des systèmes éducatifs
chez Accor France.,