L'accompagnement en formation des jeunes en milieu rural

Dans ses “kits du praticien", l'ANLCI défriche le champ des initiatives régionales face à la problématique de l'illettrisme dans le cadre de son Forum permanent. En Languedoc-Roussillon, une thématique particulière est consacrée à la formation des jeunes en situation d'illettrisme en milieu rural.

“Il n'y a pas de spécificité rurale à l'illettrisme", indique Anne Castillo, formatrice spécialisée en français langue étrangère, alphabétisation, post-alphabétisation et illettrisme à l'Atelier de pédagogie personnalisée (APP) de Pézenas, dans l'Hérault. “La problématique de l'illettrisme des jeunes en milieu rural ne diffère pas de celle de leurs homologues en milieu urbain." Si l'Éducation initiale ne semble pas en cause dans le développement de ce problème de société, la formatrice identifie plusieurs pistes expliquant cependant la recrudescence de l'illettrisme parmi les 16-25 ans. “L'utilisation systématique du langage « texto » fait énormément de mal aux jeunes, explique-t-elle. Le public auquel nous nous adressons se compose principalement de jeunes déscolarisés ayant perdu le sens de la lecture et de l'écriture. De plus en plus d'entre eux présentent des carences en la matière du fait de leur habitude de ne communiquer qu'en langage SMS ou MMS. Nous le constatons lorsque nous leur demandons d'écrire : ils se révèlent incapables de communiquer autrement qu'en « texto »."
Afin de répondre aux problèmes de ces jeunes, l'APP de Pézenas, associé aux Missions locales, à Pôle emploi et à un réseau d'assistants sociaux, a développé un programme de ré-acquisition des fondamentaux. “Même si l'inscription peut commencer dès l'âge de 16 ans, notre programme concerne la formation pour adultes. Généralement, ces jeunes sont orientés vers nous par l'intermédiaire des Missions locales d'insertion", précise Anne Castillo. Les ateliers de formation sont personnalisés en fonction de chaque niveau et besoin spécifique. “En moyenne, nous consacrons 200 heures de formation par jeune. Parfois plus."

“Nous prenons en compte les centres d'intérêt exprimés par le stagiaire, explique Anne Castillo. Prenons l'exemple d'un jeune passionné de football. Son formateur dédié lui demandera de rassembler de la documentation sur ce sport et travaillera à partir de cette base en lui posant des questions sur la structure des phrases dans les articles de la presse sportive, en lui faisant travailler la compréhension des textes ou en lui demandant d'imaginer un dialogue entre deux supporters en fonction de l'actualité footballistique du moment. C'est un bon vecteur pour l'intéresser à l'apprentissage des compétences de base."

L'objectif final des formateurs de l'APP est de conduire les bénéficiaires au certificat de formation générale, un diplôme de niveau V bis, légèrement inférieur au CAP, mais qui constitue un premier tremplin. Dans ce but, l'APP a développé ses propres outils contre l'illettrisme, à l'image du programme “Lettris" visant à faire acquérir des compétences en français et en mathématiques.

Depuis 2009, l'APP connaît des difficultés du fait d'une modification radicale de son mode de financement. “Jusqu'en 2008, nous bénéficiions du programme Irill, qui nous permettait de disposer d'une enveloppe définie en début d'année, indique Anne Castillo. Qui nous permettait d'anticiper les formations à effectuer tout au long de l'année. Depuis 2009, l'APP doit répondre à des appels d'offres. Nous devons travailler de manière décalée par rapport aux besoins rencontrés."

À ce problème d'ordre financier s'ajoutent plusieurs difficultés propres au milieu rural : la dispersion des populations sur une région aussi contrastée géographiquement que le Languedoc-Roussillon (qui alterne territoires côtiers et montagneux et comprend de nombreux espaces ruraux enclavés), le refus de certains jeunes de s'engager dans une formation sur les savoirs de base et les problèmes de “mobilité psychologiques" qui constituent un frein au désir de ces populations de suivre une formation.